De la lumière aux côtés des grandes stars de la musique malienne, Zoumana Téréta était tombé dans l’ombre de l’ingratitude avant de s’éteindre dans l’indifférence. Le So-kou (violon monocorde) a perdu son virtuose le 15 mai 2017 des suites d’une très longue maladie. Nous vous proposons ici l’article publié dans Le Reflet du 5 janvier 2017 pour alerter l’opinion nationale, surtout les stars de la musique malienne et les généreuses bonnes volontés, sur la détresse du talentueux violoniste.
Virtuose du “So-kou” (violon monocorde), Zoumana Téréta a accompagné presque tous les grands artistes musiciens du Mali (Oumou Sangaré, Djénéba Seck, Toumani Diabaté, Bassékou Kouyaté, le regretté Ali Farka Touré, Afel Bocoum, Samba Touré, Haïra Arby…).
Alité depuis très longtemps, cet artiste (instrumentiste, auteur/compositeur et interprète) est abandonné par tous. C’est ce que disent en tout cas ceux qui lui ont récemment rendu visite comme Aly Guindo, l’administrateur de la Fondation Ali Farka Touré. “Il traverse un moment très difficile de sa vie et a besoin de votre soutien…”, a alerté ce dernier sur les réseaux sociaux. Avec ce post, un élan de solidarité commençait à se mettre en branle autour de l’artiste. Ces bonnes volontés font aujourd’hui appel à notre générosité pour lui permettre de se soigner et subvenir à ses besoins les plus élémentaires, dont la location de la maison qu’il habite à Djélibougou près de la Sotelma, avec sa femme et ses enfants.
Zoumana Téréta dit Zou est originaire de Damdjé, à quelques encablures de Sianro, dans le cercle de Macina (Ségou/Mali). Ce Bozo bon teint, comme tous les camarades de son âge, a aimé et appris à jouer du “So-kou” (la queue du cheval) avec Issa, un jeune forgeron, qui lui a appris à confectionner cet instrument. Chauffeur de camion, Zoumana Téréta dit “Zou” a donc longtemps promené son “So-kou” sur les routes, notamment entre le Mali et la Côte d’Ivoire.
L’instrument est juste un passe-temps pour ce virtuose. Mais la passion sera la plus forte parce qu’il finira par s’y consacrer entièrement et de vivre de son talent d’instrumentiste. Depuis, il a joué et enregistré avec Sali Sidibé et s’est produit avec Ténin N’chini Damba, les sœurs Sidibé, Hawa Koni, Maï Koné, Oumou Sangaré et la regrettée Fantani Touré. Il a aussi été musicien au Badema national et à l’Ensemble instrumental national du Mali.
Grâce à une parfaite maîtrise de son instrument, il a su adapter le “So-kou” aux musiques urbaines, notamment le rap avec les Zion B, l’un des premiers groupes de rappeurs au Mali. Ce pur talent a également fait de nombreuses musiques de films. Son premier album “Niger Blues” est sorti en octobre 2003. Une belle œuvre dont il n’a presque rien tiré financièrement à cause de la piraterie.
C’est donc naturellement que Zoumana Téréta est aujourd’hui considéré comme l’un des rares maîtres du violon au Mali. Un virtuose qui se meurt presque dans l’indifférence après avoir apporté sa pierre au rayonnement du Mali à travers les arts et la culture, précisément la musique.
Prions que la mort soit pour Zou une grâce divine lui ouvrant les portes du Paradis. En effet, pour le violoniste Zoumana Téréta, la vie ne valait simplement plus la peine d’être vécue tellement il était désespéré de se retrouver si seul avec sa famille, abandonné de tous, après les immenses et louables services rendus à la culture malienne.
Moussa BOLLY