L’Assemblée nationale du Mali a adopté le lundi 11 décembre 2017, le projet de loi de finances 2018. Premier du genre, le Mali fait le passage d’un budget de moyens à un budget de résultats ou encore le basculement du budget en mode programme. Ce qui fait que le projet de loi de finances de 2018 comprend deux parties. La première partie consacrée aux conditions générales de l’équilibre budgétaire et financier concerne les articles 1 à 21 et la deuxième partie concerne les articles 22 à 48. Arrêté en recettes à 1 957,625 milliards de FCFA en termes de prévisions de recouvrement et à 2 330,778 milliards de FCFA en dépenses, le budget 2018 présente un déficit budgétaire global de 373,153 milliards de FCFA contre 356,183 milliards de FCFA dans le budget rectifié 2017, soit une augmentation de 4,76%. Ledit projet de loi de finance a été adopté à la majorité des députés à hauteur de 108 voix pour, 14 contres et 13 abstentions. L’opposition a rejeté ce budget tout en faisant savoir que non seulement il n’est pas réaliste mais que le déficit est exorbitant.
La séance plénière était présidée par le président de l’hémicycle, l’honorable Issaka Sidibé, en présence du ministre de l’économie et des finances, Dr Boubou Cissé qui défendait le projet de loi de finances 2018 et d’autres personnalités. Dans la présentation du rapport sur le projet de loi de finances 2018, le rapporteur de la commission des Finances, de l’Economie, du Plan et de la Promotion du Secteur Privé, Yacouba Michel Koné, a fait savoir que le budget d’Etat pour l’exercice 2018 met l’accent sur la mise en œuvre de l’Accord pour la Paix et la réconciliation au Mali issu du processus d’Alger, sur la Loi d’Orientation et de Programmation Militaire (LOPM), et sur la Loi de Programmation relative à la Sécurité Intérieure (LPSI). Avant d’ajouter que le budget d’Etat prend également en charge l’incidence financière des avantages accordés aux salariés suite aux négociations avec les partenaires sociaux ; le renforcement des crédits alloués au secteur de l’Agriculture, aux secteurs sociaux et aux dépenses en capital, en vue de stimuler la croissance et la création d’emplois ; les transferts budgétaires aux Collectivités territoriales pour atteindre l’objectif de 30%. A l’en croire, en 2018, les charges de trésorerie de l’Etat sont évaluées à 345,161 milliards de FCFA. Le rapporteur a fait savoir que les charges au titre du remboursement des produits des emprunts à court, moyen et long termes sont prévues pour 331,001 milliards de FCFA contre 156,000 milliards dans la loi de finances rectificative 2017, soit une hausse de 175,001 milliards de FCFA ou un taux de progression de 112,18%. Et de poursuivre que lesdites charges concernent le remboursement de la dette intérieure pour 224,169milliards de FCFA dans le PLF 2018 contre 58,371 milliards de FCFA dans la LFR et LFI 2017, soit une augmentation de 165,798 milliards de FCFA ou un taux de 284,04%; et le remboursement de la dette extérieure pour 106,832 milliards de FCFA dans le PLF 2018 contre 97,629 milliards de FCFA dans la LFR et LFI 2017, soit une augmentation de 9,203 milliards de FCFA ou un taux de 9,43%. « Arrêté en recettes à 1 957,625 milliards de FCFA en termes de prévisions de recouvrement et à 2 330,778 milliards de FCFA en dépenses, le projet de budget 2018 présente un déficit budgétaire global de 373,153 milliards de FCFA contre 356,183 milliards de FCFA dans le budget rectifié 2017, soit une augmentation de 4,76%. Ce déficit sera financé par les ressources provenant des aides budgétaires extérieures et la mobilisation de l’épargne à travers les titres d’emprunts émis par le Trésor », a précisé Yacouba Michel Koné.
Un budget non réaliste ?
Lors des débats, le président du groupe parlementaire VRD (Vigilance républicaine et démocratique), l’honorable Mody N’Diaye a fait savoir que la contreperformance de la campagne agricole 2017 et la tenue d’élections générales 2018 constituent des facteurs qui affecteront la croissance économique du Mali ainsi que le niveau d’inflation. « Déjà, le niveau élevé des prix agricoles notamment ceux des céréales sèches annoncent l’ouverture prématurée de la période de soudure. Cette situation nous amène à considérer que le taux de croissance et le niveau d’inflation de 1,4% retenu comme hypothèse ayant présidé à l’élaboration du budget 2018 sont loin de la réalité donc non réaliste. Ceci remet en cause le réalisme et la sincérité des projections de recettes du budget 2018 », a déclaré le président du groupe VRD qui anime l’opposition parlementaire. Selon l’opposant Mody N’Diaye, le niveau des recettes de la direction générale des douanes, de la direction générale des impôts et les services des domaines sont surévalués. « Ces prévisions seront négativement affectées par la crise alimentaire à laquelle le pays doit faire face en 2018… Notre pays s’apprête à faire l’enquête générale de la population en 2019. A ce titre, l’inscription de 2, 9 milliards de FCFA au fonds national de développement de la statistique dédié à cette activité est nettement insuffisant. Cette situation parait préjudiciable à la réalisation de cette activité », a souligné Mody N’Diaye. Selon lui, le niveau de déficit budgétaire est exorbitant parce que l’Etat doit chercher les moyens pour combler ce déficit de plus de 300 milliards de FCFA mais faire face au remboursement des emprunts obligataires qui sont arrivés à maturité pour plus de 200 milliards de FCFA. Au regard de tout ce qui précède, Mody N’Diaye a fait savoir que l’opposition a décidé de rejeter ce budget 2018 qui selon lui, n’est ni sincère, ni réaliste. Par contre d’autres députés dont l’honorable Belco Bah de la Majorité parlementaire ont apprécié les performances réalisées par le ministère. Cependant, plusieurs députés ont souhaité la relecture du code général des impôts pour éviter les tracasseries routières à propos des vignettes des engins à deux roues.
Selon le Ministre de l’Economie et des Finances, les principales conditions de l’équilibre budgétaire et financier de 2018 portent d’une part, sur le respect du déficit imputable à l’atteinte des objectifs de mobilisation des recettes et la maîtrise des dépenses, et, d’autre part sur la mobilisation des émissions des emprunts. Avant d’ajouter que ce budget est sincère. Concernant la dette intérieure, le ministre a fait savoir qu’un bureau d’étude a fait son travail et il en est sorti 80 milliards de FCFA sur lesquels 50 milliards ont été payés par l’Etat. Le reste, dit-il, qui n’est pas payé n’est bâti sur aucune pièce justificative. A l’en croire, il y’aura des sanctions du coté des agents de l’Etat et du coté des fournisseurs concernant le faux et usage de faux dans le dossier de la dette intérieure. En outre, le ministre a indiqué que 285 milliards de FCFA sont destinés à la mise en œuvre de l’accord. Il a mis l’accent sur la formation professionnelle afin de palier aux insuffisances. Enfin, le ministre dira qu’il est prévu une relecture du code général des impôts en 2018. A l’issue des débats, la première partie du budget 2018 a été adoptée par 108 voix pour, 14 députés de l’opposition ont voté contre, il y’a eu 13 abstentions.
Aguibou Sogodogo
Source: Le Républicain