La Direction Régionale du Budget de Mopti (DRBM) est l’une des plus importants services de la 5ème région, avec pour mission, l’assurance du budget des structures étatiques de la Venise malienne. Mais ce service, ploie sous l’effet de la plus pernicieuse forme de corruption systématique, adoptée sur les plans financier et technique de chaque travail ou paiement organisé par le Budget de Mopti.
À cette fin, voici un cas de corruption au sein de cette structure étatique, relatif à l’opération d’exécution des marchés et au paiement des mandats.
À en croire un document déposé à notre rédaction par des travailleurs de la boîte, les dysfonctionnements et les irrégularités financières au sein de la Direction régionale du Budget de Mopti, se sont traduit par des manquements dans le dispositif de contrôle interne et dans les opérations de dépenses.
En effet, depuis le retour de Malick Diawara (il est à sa deuxième nomination à se poste), à la tête du Budget de Mopti, nos sources expliquent que les magouilles, l’affairisme et bien d’autres phénomènes jugés diffus sont devenus courants au niveau de ce service régional.
Défaillances du contrôle interne sur fond de favoritisme
Selon l’enquête sectorielle dont nous avons une copie, la Direction Régionale du Budget de Mopti a attribué au Comptable matières des tâches ne rentrant pas dans ses missions. En effet, le Directeur Régional du Budget de Mopti, Malick Diawara, a confié au Comptable-matières le traitement de toutes les commandes des services déconcentrés. Ainsi, il exerce des missions liées à l’organisation des consultations restreintes et ouvertes ainsi qu’à la sélection des attributaires des marchés. L’exercice par le Comptable-matières des attributions non prévues par les dispositions réglementaires peut entamer la transparence dans les procédures de la commande publique.
Aussi, la Direction Régionale du Budget de Mopti n’enregistre pas, systématiquement, les offres des soumissionnaires aux marchés publics. Du coup, ce manquement ne permet pas une traçabilité des offres déposées. Pire, cette structure Régionale n’informe pas les soumissionnaires non retenus malgré qu’elle lance des appels d’offres. En effet, bien que les copies des lettres à adresser aux soumissionnaires non retenus existent, elles ne portent pas de mentions de décharges prouvant leur réception par les destinataires. La non-information des soumissionnaires non retenus ne permet pas de s’assurer de la transparence des procédures.
Pendant ce temps, la Direction du Budget de Mopti n’a pas exigé de garanties de bonne exécution à six titulaires de marché au cours de la période sous-revue. La non-exigence de la garantie de bonne exécution ne permet pas de couvrir les éventuelles défaillances des titulaires des marchés. Et le hic qui titille, c’est qu’elle organise des simulations de mise en concurrence. Ainsi pour matérialiser la mise en œuvre du principe de la concurrence, elle a présenté des lettres de demande de cotation non déchargées par les fournisseurs censés être les destinataires. De plus, ces correspondances n’ont pu être retracées dans les registres des courriers «départ » de la Direction du Budget de Mopti. La simulation de mise en concurrence contrevient aux principes du libre accès à la commande publique et de transparence dans les procédures.
Plus grave encore, la Direction Régionale du Budget de Mopti ne tient pas une comptabilité-matières régulière. Non plus, elle ne tient pas à jour le livre journal des matières, les fiches de casier et le Bordereau de Mise en Consommation des Matières. En outre, elle n’établit pas de rapport d’inventaire pour la Région. De plus, les réceptions ne sont pas matérialisées par les documents réglementaires requis comme le modèle type de Procès-verbal de réception prévu par les textes en vigueur. Et le flou artistique qui sied à la partie, c’est que le modèle qu’elle utilise ne donne aucun détail sur la quantité et les spécifications des articles réceptionnés. Cette non-tenue régulière des documents de la comptabilité-matières ne permet pas d’assurer le suivi et la sauvegarde du patrimoine de la Région. Ce n’est pas tout. Loin s’en faut.
Même l’informel et le clanisme demeurent dans les tâches de la région de Mopti. En effet, le Régisseur du Gouvernorat n’a pas respecte les dispositions exigées pour son entrée en fonction. Il n’a pas prêté serment, bien qu’il soit en fonction depuis juin 2014. La tenue de la régie par un Régisseur non assermenté contrevient aux dispositions réglementaires encadrant la fonction de comptable public.
Des entorses dans les opérations de dépenses
Le Directeur Régional du Budget de Mopti, Malick Diawara, peut être fier de son passage à la tête de cette structure. Il a admis des contrats irrégulièrement enregistrés.
À en croire notre document, il ressort des travaux effectués auprès du Centre des Impôts de Mopti que trois contrats simplifiés ainsi qu’un contrat de marché et son avenant, tous conclus en 2016, comportent des faux cachets et signatures matérialisant le paiement des droits d’enregistrement. Le montant total des droits d’enregistrement qui n’ont pas été perçus s’élève respectivement à 511 230 FCFA pour les contrats simplifiés et 1,07 million de FCFA pour le contrat de marché, soit un montant total 1,58 million de FCFA.
Plus grave encore, le Directeur Régional du Budget de Mopti a justifié des dépenses par des pièces non probantes. Il s’agit de factures et attestations de service ayant fait l’objet de surcharges, de ratures et de traces originales de stylo sur des photocopies. De plus, des documents de la liasse des pièces justificatives desdites dépenses comportent des dates incohérentes. Malgré ces manquements, les factures y afférentes ont fait l’objet de liquidation par le Directeur régional et de certification par le Comptable-matières. Les dépenses concernées se chiffrent à 7,02 millions de FCFA.
Également, le DRB de Mopti, M. Diawara, a conclu un contrat dont le montant est surévalué par rapport au résultat des travaux d’évaluation des offres. En effet, sur la base du devis estimatif, la commission d’ouverture des plis et d’évaluation des offres a retenu le montant HT de 109 millions de FCFA, soit un montant TTC de 128,62 millions de FCFA. Toutefois, le Directeur régional a conclu et ordonné le paiement du contrat de marché pour la somme 159,99 millions de FCFA, soit un surcoût de 31,37 millions de FCFA.
Pendant ce temps, la complicité et le goût du lucre aidant, deux Régisseurs de la région ont justifié des dépenses avec de fausses pièces. C’est dans cette dynamique que le Régisseur du Gouvernorat de la Venise malienne et celui de la Direction Régionale du Budget de Mopti ont justifié des décaissements par de fausses pièces d’acquisition de carburant. En effet, les travaux d’effectivité ont permis de constater que les factures établies n’émanaient pas desdites sociétés. Le montant total des transactions concernées par ces factures s’élève respectivement à 135 millions de FCFA pour le Régisseur du Gouvernorat et 17,15 millions de FCFA pour celui de la Direction Régionale du Budget de Mopti, soit un montant total de 152,15 millions de FCFA. Ces montants, selon le rapport d’audit, sont des simulations d’achats.
Au tant de fraudes et de magouilles qui ont occasionné une perte sèche de 192,125 millions de francs CFA pour le contribuable malien. D’où le lieu pour une mission d’enquête de séjourner à la Direction régionale du Budget de Mopti.
À l’issue de cette mission, nos sources témoignent que les enquêteurs, à l’unanimité, ont fait des dénonciations à la justice portant, entres autres, aux marchés et contrats concernés par les droits d’enregistrement irrégulièrement enregistrés pour un montant 1 586 669 FCFA ; aux paiements de 17,15 millions de FCFA supportés par des pièces justificatives non reconnues par les fournisseurs et aux paiements de 135 millions de FCFA supportés par des pièces justificatives non reconnues par les fournisseurs.
Du coup, le Directeur régional du Budget de Mopti, Malick Diawara et ses complices ne dorment plus que d’un œil. Les détails dans nos prochaines éditions.
Jean Pierre James
Source: Nouveau Réveil