Le 20 septembre 1979, José Eduardo dos Santos devient chef du Mouvement populaire de libération de l’Angola et président de la République d’Angola. Il est alors âgé de 37 ans.
Jose Eduardo dos Santos, décédé vendredi, a dirigé l’Angola pendant 38 ans.
Jamais élu directement par le peuple, l’ancien rebelle marxiste est mort à l’âge de 79 ans dans la clinique de Barcelone où il avait été hospitalisé en juin, plus de cinq ans après avoir quitté le pouvoir en 2017.
Il a régné sur l’Angola d’une main de fer et son dauphin et successeur, l’actuel président Joao Lourenço, avait surpris en lançant une vaste campagne contre la corruption dès son arrivée au pouvoir.
Isabel, la fille aînée de l’ex-président, surnommée la « princesse » et bombardée en 2016 à la tête de la compagnie pétrolière nationale Sonangol, est désormais traquée par les juges et fait face à une kyrielle d’enquêtes pour corruption. Et son fils Filomeno est en prison depuis 2019, tombé également pour corruption.
Lorsque José Eduardo dos Santos arrive au pouvoir en 1979, l’Angola connaît depuis quatre ans les affres de la guerre civile, après son indépendance du Portugal.
Une longue et difficile guerre – quelque 500.000 morts en 27 ans – qu’il mène, avec le soutien de l’URSS et de Cuba, contre l’Unita de Jonas Savimbi, appuyé par le régime d’apartheid sud-africain et les Etats-Unis.
Point chaud de la guerre froide, la guerre civile ne s’achève formellement qu’en 2002 après la mort de Savimbi.
Sonne alors l’heure du boom pétrolier. Dos Santos fait de l’Angola le premier producteur d’or noir d’Afrique – au coude à coude avec le Nigeria, mais au seul bénéfice d’une infime partie de la population.
Rare en public, il maintient un contrôle total sur son parti, le Mouvement pour la libération de l’Angola (MPLA), qui lui vaut d’être constamment reconduit à la tête du pays dont il dirige gouvernement, armée, police et juges.
« Grand stratège »
Sous son règne, les médias sont verrouillés et les rares flambées de contestation populaire matées.
Hors de ses frontières, sa longévité lui a permis de s’imposer comme un pilier politique de la région, où il fut un puissant soutien du président congolais Joseph Kabila, son voisin.
« Contre toute attente », dos Santos « a réussi à garder le pouvoir malgré le défi de la guerre et des élections », résume Alex Vines, du centre d’études Chatham House de Londres.
Il « a toujours été un grand stratège », renchérit Didier Péclard, professeur à l’université de Genève. « Il a su redistribuer les faveurs rendues possibles grâce à la rente pétrolière dans un cercle assez restreint de clients politiques ».
Né le 28 août 1942 d’une famille modeste, dos Santos a grandi dans le « barrio » ou quartier de Sambizanga.
Dans ce bidonville de la capitale, noyau de la lutte contre la puissance coloniale portugaise, ce fils de maçon adhère en 1961 au MPLA mais ne fait qu’un bref passage dans la lutte armée.
Deux ans plus tard, il obtient une bourse pour étudier en Azerbaïdjan où il décroche un diplôme d’ingénieur et épouse une Soviétique, Tatiana Kukanova, la mère d’Isabelle. Marié ensuite à Ana Paula, une ex-hôtesse de l’air de 18 ans sa cadette, il est père de plusieurs enfants.
Dans les années 1970, il poursuit son ascension politique en intégrant le Comité central du MPLA. Dauphin du premier président angolais Agostinho Neto, il devient son chef de la diplomatie à l’indépendance en 1975. A sa mort en 1979, il est investi chef de l’Etat par le parti, dont il prend la présidence.
Il n’a ensuite plus lâché le pouvoir au gré des scrutins et des changements de Constitution, sans jamais être directement élu.
En 1992, la présidentielle est annulée entre les deux tours après des accusations de fraude de son rival Jonas Savimbi. Une autre élection prévue en 2008 n’aura jamais lieu et la Constitution de 2010 lui permet d’être reconduit deux ans plus tard comme chef du MPLA, vainqueur des législatives.
La police réprime toute tentative de manifestation de masse. Ses adversaires politiques crient à la « dictature », lui s’en défend. « Nous sommes un pays démocratique. Nous avons plusieurs partis », souligne-t-il en 2013 dans un rare entretien à la presse.
« C’est un vrai despote, un faux démocrate« , tranche le rappeur Adao Bunga « McLife », du Mouvement révolutionnaire pour l’Angola.
Amateur de musique et de poésie, Zedu, comme il est surnommé, partage son temps entre le palais présidentiel d’un rose très colonial et une résidence dans le sud de Luanda.
En 2013, il confie à une télévision brésilienne sa lassitude du pouvoir en qualifiant son règne de « trop long ».
Fin 2016, alors que la rumeur le dit atteint d’un cancer, il annonce son retrait. Il laisse comme promis sa place quelques mois plus tard à son dauphin Joao Lourenço.
AfricaNews