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Interpellés à Gao : LES JEUNES DE OUELESSEBOUGOU N’ETAIENT PAS DES RECRUES DJIHADISTES

Ils avaient rallié les villes de Tombouctou et Gao dans l’espoir de pouvoir être recrutés dans l’armée à la faveur de l’accord d’Alger

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Le démantèlement d’un réseau de recrutement de jeunes gens au profit des groupes armés avait défrayé la chronique il y a quelques semaines. En effet, un groupe de jeunes, appréhendés à Gao par les forces de sécurité, avait été présenté comme ayant l’intention d’aller grossir les rangs des islamistes dans le Nord de notre pays. Ils étaient partis de Ouélessebougou pour la Cité des Askia.
Comment des jeunes natifs de Ouélessebougou se sont-ils retrouvés à Gao ? Qui sont-ils et que leur reproche-t-on ? Autant de questions auxquelles nous avons essayé de répondre en menant l’enquête à Ouélessebougou.
Situé à 80 km de la capitale sur la route nationale n° 7, Ouélessebougou est une ville carrefour célèbre pour une foire hebdomadaire qui se tient tous les vendredi. Commune rurale du cercle de Kati, la paisible agglomération de 42.563 habitants s’est retrouvée brusquement sous les projecteurs de l’actualité. Les habitants étaient tétanisés d’entendre que leur ville était devenue rien de moins qu’un réservoir de djihadistes.
Les 29 jeunes arrêtés à Gao viennent bel et bien de Ouélessebougou. Agés de 17 à 30 ans, il s’agit de 26 garçons et de 3 filles. La plupart sont des enfants des gendarmes à la retraite.
Pour comprendre l’odyssée qui les a conduits à Gao, un petit rappel s’impose. Tout a commencé en 2012, lorsque la partie septentrionale de notre pays a été attaquée et occupée par des bandits armés et leurs alliés narco-djihadistes. Avant l’intervention française de janvier 2013, on avait enregistré une mobilisation volontaire de jeunes qui voulaient participer à la reconquête du Nord.
A l’époque, des mouvements d’autodéfense et des milices furent créés qui animèrent même des camps d’entrainement dans la banlieue de Mopti pour la plupart. C’est ainsi que le major Efad Cissé, ancien chef de brigade de la gendarmerie à Ouélessébougou, a créé avec des compagnons, le Mouvement patriotique pour la restauration de la dignité du Mali. Ils entreprirent de former des jeunes pour aller défendre le pays contre l’invasion djihadiste. Ces « mouvements de libération » n’eurent pas le loisir de faire leur baptême du feu car l’opération Serval lancée par la France avait mis l’ennemi commun en déroute.
La majorité des milliers de jeunes qui avaient rallié les camps de formation militaire dans la Venise malienne, a été alors contrainte de rentrer chez elle. Par la suite, certains eurent la chance d’intégrer l’armée régulière à la faveur des recrutements de 2013. Les jeunes de Ouélessebougou n’ont pas eu cette chance et sont rentrés au bercail.
C’est à la faveur du processus de négociation d’Alger que le Mouvement patriotique pour la restauration de la dignité du Mali du major Efad Cissé refit parler de lui en rejoignant la Coordination des mouvements des forces patriotiques de résistance. Le major participera à ce titre à plusieurs rounds des négociations à Alger. Lorsque la conclusion de l’accord d’Alger s’est précisée, ce mouvement comme tous les autres a décidé d’envoyer ses membres à Gao et Tombouctou dans la perspective de leur cantonnement et éventuellement de leur intégration dans l’armée.

SUR DENONCIATION. Ainsi, il y a un mois, des jeunes de Ouélessebougou, pour la plupart des élèves et étudiants, qui avaient pris part à la formation de Mopti, prirent contact avec Efad Cissé pour faire partie des candidats à l’intégration dans l’armée au compte de son mouvement. Connaissant la plupart des jeunes pour avoir travaillé avec leurs parents, celui-ci accepta et leur proposa de gagner les villes de Tombouctou et de Gao avant la signature prochaine de l’accord d’Alger.
Les jeunes et leurs parents ont accueilli la proposition avec enthousiasme et organisèrent le voyage. Le groupe a ainsi quitté Ouélessébougou le 14 pour arriver à Gao le lendemain. Pour le voyage, chaque parent a versé 35.000 Fcfa soit 20.000 pour les frais de transports et le reste comme frais de restauration pendant 15 jours. A l’instar des 29 jeunes partis pour Gao parmi lesquels Efad Cissé compte deux enfants, un second groupe a rallié Tombouctou.
A Gao, les jeunes de Ouélessébougou n’ont pas été acceptés dans le camp des forces patriotiques. Installés dans un abri de fortune en attendant l’aboutissement de discussions entre leurs chefs, ils ont été dénoncés par des « camarades » de Gao qui craignaient de voir « leurs » places prises par des jeunes venus d’autres régions. Présentés comme des recrues djihadistes, ils furent cueillis dans la nuit du 18 avril par les forces de sécurité. Cependant, les éléments lourdement armés qui ont participé à leur arrestation, furent étonnés de se retrouver face à de jeunes désemparés, surpris en plein sommeil.
Après les premiers interrogatoires à Gao, les 29 interpellés seront envoyés à Bamako, au Camp I de la gendarmerie, où les pandores ont essayé de déceler de possibles connexions avec les mouvements armés ou les groupes djihadistes. Mais les investigations n’ont rien donné. Plutôt, elles ont établi que le major Efad Cissé n’est lié, ni de près, ni de loin, à un groupe djihadiste. « Il est le fondateur d’un mouvement d’autodéfense et membre des forces patriotiques. Sa moralité ou son intégrité ne souffrent d’aucune ambigüité », confirme une source proche de l’enquête.
Naturellement, l’arrestation des jeunes avait plongé leurs parents dans le désarroi. L’annonce de leur libération hier a donc été accueillie avec beaucoup de soulagement. Les enquêteurs ont acquis la conviction qu’il s’agissait de jeunes désireux, comme beaucoup d’autres, de profiter des opportunités de recrutement dans les forces armées ouvertes par l’accord d’Alger.

D. DJIRE

source : L Essor

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