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Insécurité grandissante : Minusma sur la sellette

L’accord de coopération et de soutien (logistique et renseignement) aux forces armées que la mission onusienne a récemment signé avec le gouvernement ravive les débats au sein de l’opinion nationale. La grande majorité des Maliens mettent fortement en cause l’utilité des Casques bleus. Et pour cause… L’insécurité a migré du nord au centre, voire même au sud du pays. Aujourd’hui, sur toute l’étendue du territoire, les attaques et embuscades se succèdent à un rythme infernal, avec leurs lots de victimes civiles et militaires.

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Toutes ces attaques, avec mort d’hommes et dégâts matériels, se font au nez et à la barbe des forces de la Minusma, si elles n’en sont pas elles-mêmes les cibles. Pourquoi la Minusma ne lutte pas efficacement contre ces terroristes qui écument le nord du Mali et au-delà ? S’interrogent bon nombres de Maliens. « Cela ne relève pas de leur mission », répondront les responsables de la mission onusienne. D’où ces voix qui s’élèvent de plus en plus pour décrier la présence de cette mission et demander son départ pur et simple. Quelle mission est-elle assignée à la Minusma ? Que dit son mandat ? Celui-ci est-il compatible avec la réalité du terrain ? Revue d’un mandat qui pose visiblement problème.

Les casques bleus des Nations unies ont atterri dans notre pays pendant la Transition, plus précisément après que l’opération Serval eut  sauvé le pays en chassant du territoire la meute de terroristes. Au fil du temps, le mandat de la Minusma évolue et s’étoffe. Ainsi, par l’adoption de la résolution 2164 du 25 juin 2014, le Conseil a décidé d’axer le mandat de la Minusma sur des tâches prioritaires : la sécurité, stabilisation et protection des civils, l’appui au dialogue politique national et à la réconciliation nationale, ainsi qu’à l’appui au rétablissement de l’autorité de l’État dans tout le pays, à la reconstruction du secteur de la sécurité malien, à la promotion et la protection des droits de l’homme, et à l’aide humanitaire.  

Tâches inutiles ?

En fonction de l’évolution de la situation politico sécuritaire, d’autres  résolutions viendront  déterminer les tâches spécifiques assignées aux casques bleus de l’ONU présents au Mali. En effet, par la résolution 2227 (2015), puis par la résolution  2364 (2017) prolongeant la mission   jusqu’au 30 juin2018. Le Conseil de sécurité a décidé que les tâches prioritaires de la MINUSMA étaient les suivantes :

  1. a) Sécurité, stabilisation et protection des civils, c’est-à-dire notamment, « appuyer les autorités maliennes, stabiliser les principales agglomérations, notamment dans le nord du pays, et, dans ce contexte, écarter les menaces et prendre activement des dispositions pour empêcher le retour d’éléments armés dans ces zones »; et « étendre sa présence, notamment grâce à des patrouilles de longue portée, dans la limite de ses capacités, dans le nord du pays, au-delà des principales agglomérations, et en particulier dans les zones où les civils sont en danger »; et « renforcer sa coordination opérationnelle avec les Forces de défense et de sécurité maliennes, dans les limites de ses moyens et dans ses zones de déploiement »
  2. b) Appui au dialogue politique national et à la réconciliation nationale, ce qui implique notamment de « se coordonner avec les autorités maliennes et les aider à engager un processus de négociation crédible et sans exclusive ouvert à toutes les communautés du nord du Mali », d’« user de ses bons offices et de mesures de confiance et d’encouragement aux niveaux national et local pour prévoir, prévenir, atténuer et régler tout conflit, y compris en renforçant les capacités de négociation et en favorisant la participation de la société civile, dont les associations féminines »; et d’« appuyer le cantonnement des groupes armés » ; mais aussi de « concourir, dans la mesure du possible et du nécessaire et sans préjudice des responsabilités des autorités maliennes, à l’action que celles-ci mènent en vue de traduire en justice ceux qui ont commis au Mali des violations graves des droits de l’homme ou des atteintes graves à ces droits, ou des violations »
  3. c) Appui au rétablissement de l’autorité de l’État dans tout le pays[à la reconstruction du secteur de la sécurité malien, à la promotion et la protection des droits de l’homme, et à l’aide humanitaire, ce qui signifie notamment : « aider les autorités maliennes à étendre et rétablir l’administration de l’État dans tout le pays, en particulier dans le nord, conformément à l’Accord préliminaire de Ouagadougou et à l’accord de cessez-le-feu du 23 mai 2014 »; « accompagner les efforts nationaux, et coordonner les efforts internationaux, visant à rebâtir le secteur de la sécurité malien […] ainsi que les secteurs de l’état de droit et de la justice, dans les limites de ses capacités et en étroite coordination avec les autres partenaires bilatéraux, donateurs et organismes internationaux menant des activités dans ces domaines, dont l’Union européenne » ; et « contribuer à créer les conditions de sécurité indispensables à la mise en œuvre de projets visant à stabiliser le nord du Mali ».

Le nouveau mandat de la Minusma adopté  le 29 juin  dernier par la résolution  2364  à l’unanimité pat le conseil de sécurité des Nations Unies  est presque identique à la précédente. Le plafond de troupes déployées  reste  inchangé avec 13000 casques bleus et 1920 policiers. La mission garde pour mandat  essentiel la mise en œuvre des accords de paix  mais elle devra maintenant appuyer la force G5 et les forces armées maliennes. Elle devra aussi, sur recommandation du secrétaire général, appuyer le redéploiement des forces de sécurité maliennes sur l’ensemble du territoire pour réinstaurer l’autorité de l’Etat.

Tout sauf l’essentiel…

Il était bon que l’opinion sache le mandat intégral de la Minusma afin de se faire une idée plus précise sur l’intérêt ou non de sa présence au Mali.

Dans ce chapelet de tâches, on constate que la Minusma est impliquée dans la gestion de tous les domaines de la vie nationale si elle ne se substitue purement et simplement à l’Etat, aux collectivités, aux partenaires techniques et financiers et aux populations.

Mais, nulle part dans le mandat, il n’est fait cas formellement de la lutte contre le terrorisme.

Or, le plus grand problème auquel le Mali est confronté aujourd’hui, à l’instar des pays de la bande sahélo-saharienne et au-delà, c’est la percée du terrorisme et du djihadisme.

Certes, les défis du développement, de la sécurité alimentaire, des infrastructures sociales de base (santé, éducation, eau et électricité…) se posent ; mais tous sont liés à la résolution des défis de la paix et de la sécurité.

Le Mali n’a jamais été aussi découvert sur le plan sécuritaire que maintenant. Il ne se passe quasiment plus de semaine sans que des populations civiles innocentes ou des éléments des forces armées maliennes ne meurent, victimes d’actes terroristes isolés ou de grande envergure. Alors que le territoire est quadrillé et peuplé de forces étrangères.

A quoi servent ces forces-là ? Absolument à rien, sinon qu’à attirer des ennuis au pays et aux populations.

En réalité, les terroristes et les djihadistes n’en veulent pas, à proprement parler, aux populations civiles, mais plutôt aux forces étrangères et aux ressortissants occidentaux ainsi qu’aux militaires maliens. C’est pourquoi, la plupart des attaques et attentats sont orientés vers eux, les civils n’étant que des victimes collatérales.

Ce qui fait croire que le mandat de la Minusma ne reflète aucunement la réalité du terrain, caractérisée par la présence des terroristes, qui cohabitent avec les Casques bleus.

Pourquoi ne pas étendre le volet « Protection des civils et stabilisation » du mandat de la Minusma à la lutte contre le terrorisme ? Pourquoi ne pas permettre aux Casques bleus de traquer les djihadistes jusque dans leurs derniers retranchements ? Pourquoi ne pas donner carte blanche aux militaires de l’ONU d’aviser en fonction de la situation qui se présente ? Pourquoi ne pas instruire à la Minusma d’agir, non pas sous l’autorité, mais sous les directives des autorités sur les questions sécuritaires globales ?

Même le laisser-aller qu’engendreraient ces questions vaudra mieux que l’état actuel du mandat de la Minusma sur lequel celui-ci n’a réalisé quasiment aucun volet. D’où l’interrogation légitime des Maliens : A quoi sert la Minusma ? Ou, pour être plus précis, la Minusma sert qui ?

La Minusma songe avant tout  à se protéger elle-même

Les populations maliennes dénoncent l’inaction des forces de l’ONU face aux attaques quotidiennes qu’elles subissent. Elles accusent la Minusma de veiller avant tout à la protection de son personnel, plutôt qu’à celle des populations. « Allez voir les camps de la Minusma, tous barricadés avec des tonnes de sables. Les soldats ne sortent que pour se ravitailler ou pour mener quelques actions ponctuelles avec tous les moyens dont ils disposent », tempête un jeune.

« A Bamako, tu ne peux pas passer devant une base de la Minusma sans être contrôlé. Et la population civile pour laquelle elle est là ? », s’insurge  Hamza Touré, une voisine  d’un camp de la mission de l’ONU à Bamako. Elle s’offusque des sommes colossales  dépensées par la mission onusienne  pour sa propre protection plutôt que celle des populations. Pour elle, la mission de l’ONU peut plier bagage.  “On ne voit vraiment pas l’efficacité de la Minusma “, estime-t-elle.

Comme elle, beaucoup de Maliens ont le sentiment que la Minusma ne veut point affronter le danger.

En clair, la mission onusienne est sur la sellette !

Mémé Sanogo

L’Aube

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