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Bakary Samb : « Une militarisation excessive ne répond pas aux causes profondes de l’insécurité au Sahel »

Dans cette interview, Dr. Bakary Samb, Président – Fondateur du Timbuktu Institute, examine les défis sécuritaires au Sahel, analyse l’évolution des groupes terroristes et souligne l’importance d’impliquer les communautés locales dans la recherche de solutions durables. Propos recueillis par Massiré Diop.

Comment décririez-vous l’évolution de la menace terroriste au Sahel ces dernières années ?

Les groupes terroristes ont redéployé leurs stratégies. L’État Islamique au Sahel s’étend dans le Liptako Gourma (Mali, Niger, Burkina Faso), en affrontant le JNIM, affilié à Al-Qaïda, qui contrôle de vastes zones. De nouvelles poches de menaces apparaissent dans le nord du Bénin et le nord-ouest du Nigeria, où extrémisme et criminalité se mêlent.

Quelle est votre évaluation des stratégies de lutte contre le terrorisme au Sahel ?

Les approches militaires, souvent combinées aux interventions étrangères, montrent leurs limites. L’AES (Mali, Niger, Burkina Faso) a amélioré la coordination régionale, mais la militarisation excessive ne traite pas les causes profondes de l’instabilité. Une approche communautaire est nécessaire pour éviter les radicalisations locales.

Pourquoi l’implication des communautés locales est-elle nécessaire ?

La menace est désormais interne, exploitant les frustrations des populations. Une sécurité humaine, centrée sur les besoins des communautés, est indispensable pour réduire le fossé entre forces de défense et populations. Le dialogue local, tel qu’initié au Mali, doit être renforcé.

En quoi la désinformation constitue-t-elle une menace pour la région ? 

La désinformation, souvent sur les réseaux sociaux, exacerbe les tensions politiques et communautaires. Elle perturbe les opérations sécuritaires, sape la crédibilité des États et alimente les conflits. Des solutions locales de régulation doivent être envisagées.

Quelles leçons les pays côtiers du Golfe de Guinée peuvent-ils tirer de l’expérience sahélienne ?

Ces pays doivent éviter la création de milices d’autodéfense, qui stigmatisent les populations et facilitent les recrutements terroristes. La lutte contre le terrorisme doit s’attaquer aux causes structurelles : pauvreté, injustices et absence de services publics. Une présence renforcée de l’État protecteur, en gagnant la confiance des populations, est importante.

Quels sont les principaux défis à anticiper ?

La communautarisation du terrorisme et les tensions entre États et populations locales favorisent les groupes extrémistes. Les bavures militaires et conflits intercommunautaires alimentent l’instabilité. Une coopération régionale inclusive et des stratégies impliquant les communautés sont essentielles pour stabiliser durablement le Sahel.

Source : Journal du Mali

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