La problématique de l’industrie de la viande au Mali » était le thème d’un Panel ce 1er février 2020, en marge de la 13è édition de la FEBAK au parc des exportations de Bamako. Ce panel était animé par Mme Tabara KEITA, coordinatrice du PRODEVIM ; Mme Ben Baba Jeamilla, promotrice d’abattoir modernes à Kayes et le Dr Hamadoun BOCOUM, représentant du Cabinet ITC. Des débats de ce panel, il ressort que notre pays ambitionne de devenir un exportateur de viande rouge afin de créer de la valeur ajoutée à tous les produits et sous-produits de la filière. Seul bémol, la qualité du bétail pose problème.
Dans son intervention, Mme Tabara KEITA, coordinatrice du PRODEVIM, a indiqué que dans cette optique, le Gouvernement à travers le ministère du Commerce et de la Concurrence et celui de l’Élevage et de la Pêche, a initié un Programme de Développement de la viande à l’export (PRODEVIM). D’un coût global de 19, 535 milliards de F CFA, ce programme est soutenu par le PNUD et l’ONUDI et vise la construction d’abattoirs modernes dans les régions de Sikasso, Gao et le District de Bamako.
Le PRODEVIM, a expliqué Mme Tabara KEITA, a pour objectif d’améliorer les conditions actuelles d’investissements dans les domaines de la transformation du bétail en viande et permettre, à moyen d’augmenter les capacités de production et d’exportation de la viande.
De son exposé, il ressort que, selon les dernières statistiques de la DNPIA, l’effectif du cheptel malien est estimé à 10 941 400 bovins, 15 900 500 ovins, 22 141 650 caprins, 549 270 équins, 999 200 asins, 1 028 700 camelins, et 83 200 porcins. Ce qui place le Mali au premier rang des pays d’élevage de la zone UEMOA (Union économique et monétaire ouest-africaine) et le deuxième pays après le Nigéria dans l’espace CEDEAO (Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest) par l’importance des effectifs.
Le sous-secteur de l’élevage contribue à lui seul pour environ 15 % à la formation du PIB national et 26 % du PIB du secteur primaire selon les estimations de la DNPIA (Direction Nationale des Productions et Industries Animales) et de l’INSAT 2014. Aussi, l’élevage contribue ainsi à 80 % des revenus des populations des zones pastorales. Sur le plan des exportations maliennes, la structure des exportations fait apparaitre les exportations d’animaux vivants, estimés à 137 milliards de FCFA en 2017 soit 7 % des exportations totales. (Source BCEAO).
Parmi les difficultés, elle a souligné : la faiblesse de l’encadrement, le manque de pâturage, le manque d’eau, la faible couverture sanitaire. De même, les problèmes ont pour noms : le non-respect des normes, la faiblesse de l’investissement public dans le sous-secteur (moins de 2%des dépenses publiques), la non-délimitation des parcours du bétail. De même, les industries du sous-secteur souffrent du manque traçabilité des animaux.
De son côté, Mme Jamila BEN BABA, PCA de Laham Industrie, a déploré la qualité de notre bétail qui ne permet pas, dit-elle, à nos industries de concurrencer les pays comme l’Argentine, le Brésil, avec tous les pays qui exporte aujourd’hui la viande. Selon elle, tous les pays voisins préfèrent les bétails sur pieds. Ce qui, de son analyse, ne rapporte rien à notre pays, car ayant très peu de valeur ajoutée.
« Sans une volonté réelle de l’État, nous ne pouvons pas exporter de la viande. Il faut des conventions de coopération entre le Mali et certains pays », a-t-elle asséné. Au Mali (Kayes), a-t-elle fait savoir, Laham Industrie ambitionne de faire 4 abattoirs modernes dont l’un est ouvert depuis 3 ans. Seul bémol, cette unité industrielle est presque à l’arrêt du fait du manque de bétails de qualité. Pour une bonne viande, il faut, selon elle, avoir une vache qui pèse plus de 300 KG. « J’ai une commande de 3 000 tonnes avec la Chine, mais je ne sais pas aujourd’hui comment honorer cet engagement », s’est lamentée Mme Jamila. Aussi, depuis 9 mois, Laham Industrie ne peut pas exporter vers le Sénégal en raison du fait que les autorités de ce pays voisin ont imposé des mesurés insupportable pour la jeune industrie.
Comme solution, elle préconise de réorganiser le secteur, d’améliorer la qualité de notre bétail. De même, elle a invité autorités à signer des accords bilatéraux avec les pays voisins et les pays du Golf.
Le constat est que, malgré un investissement de plus de 6 milliards F CFA, cette dame n’arrive pas à tirer son épingle du jeu. C’est pourquoi elle a déconseillé la coordinatrice du PRODEVIM qui projette de construire 4 usines supplémentaires à s’y investir.
Pour sa part, le Dr Hamadoun BOCOUM, représentant du Cabinet ITC, a insisté sur le fait que la bonne viande dépend de la qualité de la nourriture du bétail.
« Nous produisons pour aller chercher sur le marché des acheteurs. Il nous est presque impossible pour nous d’exporter vers le marché mondial. Sauf qu’en Afrique, c’est une économie souveraine ». Pour changer la donne, il a préconisé un forum sur le secteur et la constitution d’un consortium ‘’Halal’’.
De même, il faut une production d’échelle de l’alimentation fourragère. Pour lui, le tourteau que nous produisons est trop gras pour donner de la bonne viande. Par ailleurs, l’exportation de la viande, a-t-il fait savoir, obéit aux normes ISO 22 000 de certification que nos unités ne sont pas encore en mesure de respecter.
Par Abdoulaye OUATTARA
INFO-MATIN