Certains trouvent indécente l’attitude des grévistes dont l’intention manifeste est de prendre en otage le paiement des salaires. Les syndicalistes, eux, se défendent de procéder ainsi pour se faire entendre
Le Syndicat national des banques, assurances, micro finances, établissements financiers et commerces du Mali (Synabef) a déclenché hier une nouvelle grève de 72 heures, reconductible. Les grévistes demandent la revalorisation de la grille du salaire de base de 15% déjà provisionné, la régularisation de la situation des prestataires/intérimaires, conformément à l’article L313 du Code du travail et l’application du décret de 1971 sur le fonds social.
Pour cette première journée d’arrêt de travail, le mot d’ordre a été suivi presque par toutes les banques, assurances, micro finances, et établissements financiers affiliés au Synabef. Pas même de service minimum. Cependant, la Banque de développement du Mali (BDM SA) et la Banque sahélo-saharienne pour l’investissement et le commerce (BSIC) se sont désolidarisées de cette grève comme c’était le cas lors des deux précédents mouvements d’arrêt de travail.
Le secrétaire général du Comité syndical de la Banque nationale de développement agricole (BNDA) et ses camarades disent veiller au respect strict du mot d’ordre de grève dans leur banque. Interrogé au sujet de la non observation du service minimum, Alassane Sanogo se veut formel.
«Aucune loi ne nous oblige à observer un service minimum. C’est prévu dans les entreprises, mais il n’y pas un décret d’application», croit savoir le syndicaliste. Rencontrés au siège de la Banque malienne de solidarité (BMS S.A), le secrétaire administratif du Synabef et ses camarades assuraient le piquet de grève. «Nous sommes dans la grève illimitée qui ne dit pas son nom.
Les syndicalistes assurent le pic de grève en vue de s’assurer que leur mouvement est respecté
Même les samedis et dimanches, nous ne travaillerons pas», dit Cheick Oumar Diakité, d’un ton discourtois. Comme pour dire aux clients qu’ils n’auront pas leur argent jusqu’à la satisfaction des doléances des grévistes. Il est totalement indifférent aux difficultés des clients des banques.
«La pression de la population ne va pas nous démotiver, parce que nous sommes prêts à continuer cette grève». Notre interlocuteur donne un aperçu des raisons de la radicalisation de son syndicat. « Pendant toute la durée de la trêve, l’Association professionnelle des banques et établissements financiers (APBEF-Mali) ne nous a pas approchés. C’est le lundi vers 18 heures que les patrons sont venus dire qu’ils veulent négocier, mais ils sont restés sur leurs décisions de ne pas bouger», explique-t-il.
Pour certains clients, la grève est certes un droit mais les syndicalistes ne doivent en aucun cas prendre en otage les salaires. «Ils ont le droit d’aller en grève. Mais nous ne sommes pas responsables du désaccord entre les syndicats et leur patronat, donc ils ne doivent pas nous priver de nos avoirs», peste Alhassane Touré. Ce dernier invite les autorités à s’investir afin de résoudre cette crise pour le bonheur des populations.
Un autre client estime que la période choisie est inappropriée, car elle impacte les activités de retrait bancaire des salariés. «Les banquiers ne doivent pas oublier aussi la part des salariés dans les fonds qu’ils brassent, sur lesquels ils sont payés en partie. Je trouve indécent que les syndicalistes veuillent chaque fois ramener leur grève vers la fin du mois en vue de pénaliser les salariés et les operateurs économiques pour obtenir satisfaction», interpelle-t-il.
D’autres demandent aux patrons de banques de s’assumer. Plusieurs d’entre eux menacent de retirer leur argent de toutes les banques qui observent cette «grève sauvage». Ainsi, soutiennent-ils, les grévistes comprendront qu’ils ne valent rien sans les clients qu’ils semblent mépriser au regard des propos tenus par les leaders syndicaux.
Babba B. COULIBALY
Source: L’Essor