Le Mali, après moult hésitations et tâtonnements, a finalement décidé de s’engager sur la voie de la reforme qui sied, la révision de la Constitution.
Certains soutiennent que cela n’est pas nécessaire. Pourtant, la prérogative de la révision est une prérogative régalienne dont le Président a usé et, au niveau l’Assemblée Nationale, le projet de loi qu’il a soumis à l’attention des députés, a été passé au crible pour n’en retenir que ce qui est jugé adéquat. Le texte a été, également, soumis à la sagacité de toutes les couches de la nation.
Le président de la Commission Lois parle de plus de 400 personnes-ressources auditionnées. Donc, une véritable écoute citoyenne, suivie de questionnaire envoyé à toutes les organisations de la société civile et états majors des partis politiques, y compris à ceux de l’opposition. Qui, dans la majorité, ont justifié, par divers arguments, l’opportunité de la révision de la Constitution du 25 février 1992.
Aussi surprenant que cela puisse paraître, des rumeurs de récusation sur certaines dispositions de la loi de révision se sont enflées sur les réseaux sociaux. Puis dans les ‘’grins’’, les salons feutrés… et pour finir, dans les réunions des associations et états-majors des partis politiques. Cela dans l’indifférence totale des autorités, lesquelles, comme d’habitude, ont considéré ces réactions spontanées pour des escarmouches de quelques plaisantins.
Car, ceux qui protestaient se plaignaient surtout, dans un premier temps, du fait que personne ne sait ce qui se trouve dans le corps de la Loi fondamentale. Ils reprochent au président de la République de vouloir d’une part, renforcer et pérenniser son pouvoir et d’autre part, de cautionner la partition du pays. Face à ces supputations, il n y a eu aucun processus d’éclairage. Comme d’habitude, le pouvoir est resté silencieux, alors qu’une simple campagne d’information aurait permis de contenir cette tempête dans un verre d’eau. Surtout qu’il n’y a aucune disposition qui touche au mandat du président de la République.
Ce faisant, la grogne s’est métastasée. Des activistes qui étaient en manque de sujet de vidéo, s’en approprient. Des politiques mécontents qui , déjà, en voulaient à IBK, s’y joignent.
La situation profite bien à l’opposition (malgré la prise en compte de 37 de ses 43 amendements). C’est pourquoi elle a bondit sur l’occasion. D’où une nucléarisation des forces de contestation, soldée par la mise en place d’une plateforme à la va vite, dite ‘’An Tè A Bana’’. Pour savoir si elle est suivie, cette plateforme programme et exécute une marche le 17 juin.
De coup d’essai, elle devint un coup de maître, en raison de sa réussite en termes de mobilisation et de la discipline qu’elle a laissé voir. A cette marche, un seul slogan a prévalu : « non à la révision constitutionnelle ». Cela sans tenir compte des concessions faites par un arrêt de la Cour Constitutionnelle, ayant émis des avis défavorables à la tenue du référendum le 9 juillet. En prêtant bonne oreille à cet arrêt des neufs Sages, le président de la République a décrété le report du référendum à une date ultérieure.
La décision, au lieu d’être saluée et soutenue par les contestataires les incita plutôt à accentuer davantage la pression ; d’où des prismes hostiles à un quelconque report. Chacun, au gré de son objectif, exige l’annulation du référendum.
Ne nous y trompons pas. La situation qui prévaut actuellement mérite d’être traitée sérieusement par le pouvoir. Car elle a les mêmes caractéristiques que deux autres frondes qui ont fragilisé le régime précédent (celui d’ATT) et fini par l’entraîner dans le précipice : la fronde contre le code de famille et la grogne contre l’AMO.
Lors de la première, le gouvernement a négligé l’ampleur du danger, en faisant la sourde oreille aux alertes des medias. Il finira par jouer à sa perte.
Sur la deuxième, qui portait sur le régime d’Assurance Maladie obligatoire (AMO), le régime d’ATT a agi comme ce que le pouvoir actuel est en train de faire : laisser le terrain aux adversaires, manquer de viatique dans la communication sur le bienfondé de la reforme engagée.
Ces deux événements datant d’un passé récent doivent servir de boussole aux autorités actuelles. En effet, elles doivent soit se plier à la grogne ou l’étouffer. Il s’agit de réduire aussi que possible les argumentaires qui nuisent à l’initiative de cette révision en ne perdant pas de vue que le Malien d’aujourd’hui a la manie du rejet. Même si une proposition va dans le sens de son bonheur.
Moustapha Diawara