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Gouvernement Moctar Ouane II : Le M5 reste sur le quai

Le mouvement approché par le président de la transition pour intégrer l’équipe gouvernementale a décliné l’offre au motif que ses ambitions sont supérieures aux offres.

Non, merci. Alors que beaucoup de politiques nourrissent l’ambition d’entrer au gouvernement Moctar Ouane II, parfois en attendant leur tour sans jamais le voir venir, d’autres refusent l’offre quand celle-ci se présente. C’est le cas du M5 qui s’est justifié en liant  sa participation à la satisfaction de l’ensemble des conditions édictées.

Certains à l’Union pour la république et la démocratie (URD, membre du M5) en proie à une guerre de positionnement après le décès de son chef de file Soumaïla Cissé rêvaient d’être ministres, même si le parti n’avait fait aucune déclaration officielle.

Lors du remaniement ministériel de mai, l’exécutif a du mal à recruter. Beaucoup de politiques pur jus disponibles ont semblé peu désireux de se mettre au service du président de la transition Bah N’Daw et de son Premier ministre Moctar Ouane. Composer un gouvernement s’est avéré de plus en plus un casse-tête. Nombreux ont peur de poser plus de problèmes que de solutions.

Un casse-tête

 Le M5 a des ambitions supérieures aux offres. Les conditions pour sa participation ne sont pas réunies. S’il veut élargir le gouvernement, Bah N’Daw devait  redoubler d’efforts pour courtiser le M5 en acceptant les conditions posées, notamment la dissolution du gouvernement et du Conseil national de la transition (CNT) et réclamé des garanties.

Le Mouvement du 5 juin qui a mené la contestation contre le président Ibrahim Boubacar Keïta a rejeté la clé de répartition des membres devant y siéger. Des chapelles politiques, PSP, PRVM Fasoko, ADP  Maliba, Yelema, les partis non alignés ont formulé moult observations assorties de fortes inquiétudes.

D’abord, ils ont relevé que « les dispositions du décret n°2020-0143 du 09 novembre 2020 fixant la clé de répartition du Conseil national de transition (CNT), attribuant à Monsieur le vice-président de la transition les prérogatives de recevoir les candidatures et après examen d’en arrêter la liste des membres  du Conseil national de la transition. »

Ensuite, « le décret 2020-0142/PT-RM du 09 novembre 2020 fixant les modalités de désignation des membres du Conseil national de la transition (CNT) ne donne aucun critère et principe motivant la fixation des quotas. »

Enfin, ces lacunes passées à la loupe, le pouvoir à leurs yeux semblent s’engager dans une voie extrêmement périlleuse en manigançant de sordides querelles. Les militaires s’arrogent le droit exceptionnel de mettre dans leur escarcelle 22 sièges. « Les partis et regroupements politiques estiment que la fixation des quotas a été effectuée sans consultation aucune de la classe politique de notre pays et que la faiblesse du quota réservé aux partis et regroupements politiques qui n’ont disposé que de onze (11) sièges sur les 121 membres du Conseil national de la transition. »

Les deux principales centrales syndicales, l’Union nationale des travailleurs du Mali (UNTM) et la Confédération syndicale des travailleurs du Mali (CSTM) ne sont pas prêtes à avaler la clé de répartition et rechignent à y siéger. Le Mouvement du 5 juin affublé de 8 sièges a craché aussi dans la soupe.

Amer anniversaire

L’acuité des divergences est telle que le président de la transition Ba N’Daw s’est permis d’épiloguer sur le sujet à l’étranger. Loin d’apaiser le climat, il a au contraire aggravé la tension et rejeté la responsabilité des erreurs commises sur d’autres en recourant aux propos du style : je suis désigné président de la transition avec un mandat de 18 mois. J’ai signé un décret. Je m’en tiens à l’esprit de ce décret »

Les observateurs politiques en déduit que le président de la transition ne cherche pas une solution, mais embrouille la question en claironnant qu’il n’est guère un homme politique, autrement dit pas au fait des subtilités y afférentes. Il est désormais évident qu’à ses yeux la crispation actuelle n’a qu’une importance secondaire.  Cependant, Ba N’Daw, débarrassé d’un accès de colère, pourrait mettre fin à l’excès de fièvre en suggérant aux parties d’accepter de transférer les points de contestation dans une discussion constructive.

Derrière le passage en force du pouvoir en place s’est caché le désir longtemps caressé de caser un des leurs, en l’occurrence le colonel Malick Diaw à la tête du CNT lorgnée par le Mouvement du 5 juin qui revendiquait ¼ des sièges à pourvoir, soit 30 membres.

A son corps défendant, le Mouvement, fer de lance de la chute du régime, a estimé que la volonté d’opérer un changement quantitatif et qualitatif passe par l’occupation par un des siens de la présidence de cet organe important. Enlever ce énième pain de la bouche du Mouvement – après les promesses non tenues de lui confier les rênes de la primature et l’attribuer ¾ des portefeuilles ministériels – s’est apparenté à l’obstruction les canaux d’évacuation des frustrations accumulées. Une humiliation de plus qui n’offrait à la coalition hétéroclite d’autre alternative que la rue.

A la veille de l’anniversaire des premières contestations contre le défunt régime, le Mouvement du 5 juin bat le rappel des troupes. Le programme prévoit un rassemblement à la Place de l’indépendance où la prière du vendredi sera dirigée par l’imam Diarra le 4 juin, suivi d’un meeting d’informations.

Les syndics de la faillite

 Accusé de fricoter avec les syndics de la faillite d’hier du pays, le président de la transition ne pourrait pas redresser la barre qu’en s’appuyant sur les forces du changement. Il y a quelque chose de désespérant à assister au scénario répétitif et cauchemardesque des massacres des populations civiles, des disparitions forcées, des viols, des pertes importantes de soldats, de l’avancée des groupes terroristes. On ne compte plus les braquages mal tournés, bien qu’ils soient unanimement condamnés, ces actes ignobles se perpétuent.

Les mots courent. Mais la réalité va toujours un peu plus vite, à laquelle l’exécutif a du mal à dominer. Il a péché en traînant des pieds dans la résolution des conflits sociaux, parce que jouant la montre ou tablant sur un essoufflement du  mouvement de grève. Un mauvais calcul ayant conduit la principale centrale syndicale à s’enfermer dans une intransigeance.

Au sortir de l’entrevue avec Bah N’Daw, le président du Comité stratégique du M5, Choguel Kokala Maïga, a indiqué avoir demandé au Chef de l’Etat de prendre ses responsabilités. Dans les coulisses, on susurre qu’il serait l’otage de la junte qui a renversé IBK, d’où les obstructions aux réformes majeures.

Selon Adama Diarra alias Ben Le Cerveau  qui s’inspire de figures révolutionnaires de la trempe de Che Guevara, Modibo Keïta et Steve Biko, le Premier ministre aurait largement pioché dans le document du M5 pour bâtir son Programme d’action gouvernementale  et n’a jamais voulu jouer cartes sur table. « Ce ne serait que justice que la présidence du CNT et la Primature reviennent au M5. Qui mieux que le M5 pourrait conduire à hauteur de souhait le changement tant attendu ?Nous disposons de cadres compétents pour ce faire. »

Georges François Traoré

Source: L’Informateur
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