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GESTION DE LA TRANSITION Comment M5-RFP a finalement tout perdu

Visiblement, la mise en place du Conseil national de la Transition (CNT) samedi dernier (5 décembre 2020) a porté le coup de grâce à ce qui restait du Mouvement du 5 juin-Rassemblement des forces patriotiques pour qui la démission d’IBK était une panacée devant mettre fin à tous les problèmes, notamment de gouvernance du Mali. Le président de la Transition est passé outre ses réserves en mettant en place cet organe désormais dirigé par le Colonel Diaw du CNSP. Une présidence qui, selon ses dirigeants, devait revenir de droit  au mouvement.  A qui la faute ? Le M5-RFP doit surtout regarder la mégalomanie de ses propres animateurs au lieu d’indexer le CNSP comme la source de tous ses problèmes aujourd’hui.

 

Laissé à quai dans la constitution des organes de la Transition, le Mouvement du 5 Juin-Rassemblement des forces patriotiques (M5-RFP) crie à la trahison sur tous les toits. Trahi par qui ? Naturellement, répondent ses leaders, par les «Colonels» qui sont supposés avoir parachevé la lutte du peuple. Selon certains dirigeants du mouvement, les militaires leur ont même volé la victoire puisque, sérieusement ébranlé et acculé dans ses derniers retranchements, le régime était aux abois et la démission du président Ibrahim Boubacar Kéita n’était qu’une question de jours ou, à la rigueur, de semaines. Entre temps, le Comité national pour le salut du peuple (CNSP) a surgi de l’ombre, au gré d’une mutinerie savamment orchestrée à Kati, pour ravir le pouvoir à la rue le 18 août 2020.

Le CNSP et ses soutiens focalisent donc toutes les accusations et toutes les critiques de l’ex-contestation. Mais accuser le CNSP d’être la cause de tous ses maux est, de la part du M5-RFP, un refus de l’autocritique, de l’autoévaluation indispensable aux phases critiques de chaque lutte révolutionnaire. Au lieu de s’en prendre aux jeunes Colonels, ce mouvement doit chercher à savoir comment il s’est «laissé dribbler» si facilement.

A notre avis il ne faut pas chercher loin car le M5-RFP a été victime de l’appétit du pouvoir qui a créé des dissensions puis de profondes divisions en son sein. Des mésententes à l’interne qui ont finalement éclaté au grand jour sous formes de «clashes», de menaces, d’injures… Et finalement, la tentation des règlements de compte a eu raison de la sagesse devant maintenir l’indispensable unité, l’incontournable union sacrée pour maintenir la pression sur le CNSP.

 

La division des contestataires a profité à leurs adversaires militaires et civils

Un adage de chez nous dit : «c’est quand les murs sont fissurés que le margouillat y entre». Mais, cette tournure du combat des «patriotes» autoproclamés n’a pas surpris les vrais observateurs (désintéressés) de la scène politique. Au «Le Matin», nous avons toujours parié sur l’éclatement de ce rassemblement une fois la démission du président Ibrahim Boubacar Kéita acquise. Et cela parce que cette démission était le seul point commun, le seul objectif commun aux leaders de la contestation.

Le M5-RFP était un rassemblement hétéroclite opportuniste au sein duquel chacun avait ses raisons propres de vouloir l’échec et le départ du président IBK. C’est pourquoi en aucun moment de la lutte, son fameux Comité stratégique n’est parvenu à afficher une seule vision politique claire, un seul projet convaincant pour rassurer les Maliens sur leurs vraies ambitions à travers le changement défendu dans la rue.

D’ailleurs, la création même de ce comité stratégique indiquait déjà un manque de cohésion au sein du rassemblement où aucun leader ne faisait l’unanimité pour que les autres aient confiance en lui et se soumettent à son autorité. Et même l’autorité morale, incarnée par l’Imam Mahmoud Dicko, ne pouvait se vanter d’une telle confiance. Elle était tolérée (sévèrement critiquée dans des cercles fermés du mouvement) parce que les adversaires politiques d’IBK craignaient que la contestation ne soit pas totalement anéantie par le départ de la Coordination des mouvements, associations et sympathisants (CMAS) de l’imam Mahmoud Dicko (CMAS). Un leader religieux dont le désir de changement était surtout motivé par des griefs personnels contre Ladji Bourama et non d’une quelconque volonté d’être l’artisan du bonheur des Maliens. En fait le vrai combat (de feu ATT à IBK) a été d’être toujours dans les bonnes grâces du pouvoir pour en tirer le meilleur profit.

 

L’unité détruite par l’opportunisme de la CMAS

D’ailleurs depuis la démission du président Kéita, la CMAS et son coordinateur Issa Kaou Djim se sont comportés en «Cheval de Troie» au sein de ce rassemblement aux intérêts politiques divergents. La démission forcée d’IBK a réveillé l’appétit vorace des uns et des autres. Les intérêts personnels ont pris le dessus sur l’unité du mouvement parce que rares étaient les responsables qui étaient là par conviction. Finalement, la CMAS qui était l’atout majeur du M5-RFP avant la chute du régime, est rapidement devenue son talon d’Achille à cause de l’opportunisme de son coordinateur.

Comme le dit l’adage, «qui trop embrasse mal étreint» ! La voracité, la cupidité et la mégalomanie de certaines composantes du mouvement de contestation l’ont affaibli et désarmé face aux «Colonels» du CNSP. Et là, malheureusement encore pour le Mouvement, la déception de ceux qui espéraient mieux les pousse aujourd’hui à des confessions gênantes.

Et naturellement beaucoup commencent aussi à comprendre ce sur quoi nous avons toujours attiré leur attention : ils sont manipulés par des gens qui, politiquement, n’aiment pas ce pays mieux qu’IBK ! Des gens qui ont seulement su taire leurs intérêts pour faire partir IBK et pouvoir les satisfaire aux dépens du peuple qu’ils disent pourtant défendre dans la rue.

Et comme nous avons défendu le changement, le vrai, est un vrai challenge dans un pays poussé au bord du précipice parce que chacun de nous à tendance à privilégier ses intérêts aux dépens de la nation. Certaines présences au CNT en disent long sur le chemin à parcourir pour que l’engagement politique au Mali soit le fruit d’une ferme conviction à toute épreuve et non pour mieux manger ou se faire les poches !

Moussa Bolly

Source : Le Matin

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