Alors que la situation reste tendue en Centrafrique, de délicates négociations se poursuivent à Bruxelles pour mettre sur pied la force européenne qui doit débarquer à Bangui en mars en dépit du refus de plusieurs pays d’envoyer des soldats.
“Nous travaillons dans l’urgence”, a assuré jeudi le général français Philippe Pontiès trois jours après sa nomination formelle à la tête de l’opération Eufor-RCA.
Son objectif est de déployer “au plus vite” les premiers soldats à Bangui, en appui aux forces africaine Misma et française Sangaris engagées depuis décembre pour rétablir la sécurité.
“Au stade où nous en sommes, de nombreuses inconnues demeurent”, a toutefois reconnu le général Pontiès. Car le lancement d’une mission de l’UE doit suivre un processus complexe et parfois tortueux dans les salles de réunion de Bruxelles.
“Il faut se mettre d’accord entre 28 pays, ce qui est évidemment compliqué”, souligne un diplomate, en notant toutefois que “les procédures se sont simplifiées et accélérées ces dernières années”.
Si tout se déroule sans anicroche, Eufor-RCA pourrait être opérationnelle début mars à Bangui et monter progressivement en puissance jusqu’à atteindre plus de 500 hommes.
D’où viendront-ils? De France en bonne partie puisque ce pays, à l’initiative de la mission, est sa “nation-cadre” et son principal contributeur. Avant d’annoncer des chiffres, Paris attend les engagements des autres capitales qui, jusqu’à présent, sont restées bien discrètes.
– Des Géorgiens à Bangui –
Seuls des pays, plus petits, n’ayant aucun intérêt stratégique en Afrique se sont portés candidats, comme l’Estonie, prête à déployer une cinquantaine de soldats, ou la Géorgie. Ce pays ne fait pas partie de l’UE mais cherche par tous les moyens à s’arrimer aux Occidentaux afin d’échapper à l’emprise russe.
La Finlande et le Luxembourg pourraient être également présents, alors qu’aucun soldat allemand ou britannique n’est attendu à Bangui, Londres et Berlin se contentant d’un soutien logistique et financier.
D’autres pays tergiversent, à l’exemple de la Belgique qui a soulevé l’épineuse question du financement des opérations militaires de l’UE. Ces dernières peuvent coûter cher aux pays participants, qui prennent en charge l’ensemble des coûts de transport et de déploiement de leurs soldats.
Seuls sont partagés à 28 les “coûts communs” liés aux structures de commandement. Ils sont évalués à 25,9 millions d’euros pour Eufor-RCA, dont le mandat a été fixé à neuf mois maximum.
Ce débat sur le financement des missions de l’UE resurgit à chaque nouvelle crise mais “il est inévitablement bloqué par le Royaume Uni”, parfois rejoint par quelques pays qui défendent la prééminence de l’Otan dans le domaine de la sécurité, souligne un diplomate.
La mobilisation des Européens sur le dossier Centrafrique a été longue à se dessiner en raison de l’attitude de la France, qui est partie seule en lançant l’opération Sangaris le 5 décembre. “Elle a ensuite demandé le soutien des Européens lorsque les difficultés sont apparues”, souligne un haut responsable de l’UE.
“C’était plutôt maladroit car de nombreux pays se sont sentis mis par la France devant le fait accompli” alors que l’urgence d’intervenir était moindre en Centrafrique qu’au Mali début 2013.
Depuis, les critiques se sont calmées, de nombreux pays ayant pris conscience de la gravité de la crise humanitaire et des risques de contagion en Afrique centrale. Catherine Ashton, la chef de la diplomatie de l’UE, a ainsi de nouveau salué lundi “les efforts remarquables engagés par la France et les partenaires africains”.
La mission Eufor-RCA se concentrera sur la sécurisation de l’une des zones les plus volatiles de Bangui.
Les alentours de l’aéroport Mpoko abritent un immense camp où de “70. 000 à 100. 000 personnes vivent dans des conditions extrêmement précaires”, selon le général Pontiès. “Nous aurons une présence extrêmement visible et permanente afin d’obtenir très vite des résultats tangibles”, a-t-il précisé.
source : jeuneafrique