Le bilan d’Ibrahim Boubacar Keïta, à la tête du G5 Sahel, est fort élogieux. Installation du poste de commandement de la Force conjointe, nomination des équipes dirigeantes, disponibilité de fonds… sont autant d’acquis enregistrées sous le leadership du président Keïta. S’y ajoutent les nombreuses promesses qui attendent d’être concrétisées à la faveur d’une table ronde des bailleurs de fonds prévue ce mois de février à Bruxelles (Belgique). C’est donc la tête haute que le président malien a passé, le mardi dernier, le témoin de la présidence du G5 à son frère et homologue nigérien, Issoufou Mahamadou. Il revient à celui-ci de maintenir le cap, en fédérant davantage les énergies pour la pleine opérationnalisation de la force sous régionale contre le terrorisme et le sous-développement dans le sahel.
Aucun pays ne peut gagner seul la bataille contre ces fléaux. Fort de cette conviction, le président Ibrahim Boubacar Keïta a mis toute son énergie, avec tact, au servir du G5 Sahel qui regroupe le Burkina Faso, le Mali, la Mauritanie, le Niger et le Tchad. C’est le 6 février 2017 à Bamako, à l’issue de la deuxième conférence ordinaire des chefs d’Etat du G5 Sahel, que le président Ibrahim Boubacar Kéita a été désigné par ses pairs pour être président de l’organisation, en remplacement du président tchadien, Idriss Déby Itno. Et c’était partie pour une année de périple : Vibrants plaidoyers en faveur du G5 sur des tribunes internationales, notamment au Qatar, Abidjan, New York, Addis Abéba ; communication tout azimut sur l’urgence de mettre en place la force conjointe … IBK a accéléré la cadence.
Aujourd’hui, force est de reconnaître qu’il a bâti de fortes fondations pour la jeune organisation, désormais crédible aux yeux de la communauté internationale. Ainsi, le G5 a pu mobiliser des ressources financières pour la mise en place de la Force Conjointe (FC-G5S), son bras armé, et le Programme d’Investissements Prioritaires (PIP), son pilier économique. Certes, le financement n’est pas totalement bouclé mais la dynamique engagée laisse croire que l’espoir est permis. «À ce jour, la FC-G5S a enregistré 294 millions d’euros d’annonces de contribution sur le budget prévisionnel de 423 millions d’euros (soit 69,5%)», a révélé le secrétaire permanent du G5 Sahel, Najim Elhadj Mohamed après la rencontre de Paris du mois de décembre dernier.
Il s’est dit convaincu que « ce niveau de financement permettra, une fois les mécanismes de sa mobilisation et de sa bonne gestion définis, d’assurer la pleine opérationnalisation de la Force conjointe». Du côté du PIP aussi, les choses bougent. Dans un premier temps, le PIP devra coordonner les nombreux projets de développement dans une sorte de synergie avec ceux en cours dans les pays membres. Et dans un second temps, il s’agira d’impliquer fortement des partenaires comme l’AFD, la Banque Mondiale, le PNUD, etc.
A pas de charge…
Ce tableau, assez reluisant, est le résultat de moult efforts des chefs d’Etat du G5 Sahel, singulièrement du président Keïta dont l’investissement personnel est apprécié et salué par tous. Pour étayer cette affirmation, un bref rappel des actions fortes engagées sous la « mandature » du président malien s’impose. En effet, le 21 juin 2017, le Conseil de sécurité des Nations unies a adopté une résolution en faveur du redéploiement de la Force conjointe du G5 Sahel sur l’ensemble du territoire des pays qui y participent, avec des effectifs en personnel militaire et personnel de police pouvant aller jusqu’à 5 000 personnes.
Cela, en vue de rétablir la paix et la sécurité dans la région du Sahel. Le Conseil avait accueilli avec satisfaction le concept stratégique des opérations de la Force conjointe du G5 Sahel, y compris ses dispositions ayant trait à la coordination de l’assistance humanitaire, à la protection des civils, à la problématique hommes-femmes et aux questions de conduite et discipline.
Mois d’un mois après la prise de cette résolution, I B K a réuni, le 2 juillet à Bamako, les présidents Roch Marc Christian Kaboré du Burkina Faso, Mohamed Ould Abdel Aziz de la Mauritanie, Issoufou Mahamadou du Niger, Idriss Deby Itno du Tchad et Emmanuel Macron de la France. C’était à la faveur d’un Sommet extraordinaire, au cours duquel une stratégie d’ensemble sur les réponses aux défis sécuritaires dans l’espace sahélo-saharien, et les menaces communes auxquelles les pays du G5 Sahel, la France et l’Europe sont confrontés, a été développée. Surtout, les questions de financement de la Force conjointe ont dominé les débats.
Le coût évalué de la Force s’élève à 275 milliards de FCFA. Où trouver cet argent ? Chacun de 5 Etats (Mali, Niger, Burkina Faso, Mauritanie, Tchad) va faire l’effort de 6,5 milliards de FCFA, a répondu Ibrahim Boubacar Keïta. Le total des contributions fait 33 milliards de FCFA. A cela, il faut ajouter les 33 autres milliards de FCFA promis par l’Union Européenne. Le président Macron avait annoncé un appui logistique de 70 véhicules militaires, des protections pour les soldats et le matériel de communication. Cet appui qui se chiffre à plus de 5 milliards de FCFA, a été rendu disponible à la fin de l’année 2017.
Entre temps, soit le 9 septembre 2017, Ibrahim Boubacar Kéita avait officiellement lancé les activités du QG de la FC-G5S à Sévaré (Mopti). Et dix jours après (18 septembre 2017), en marge de la 72e session de l’Assemblée générale, les chefs d’Etat du G5 Sahel et le président de la République française, Emmanuel Macron, se sont retrouvés à New York.
Cette rencontre de haut niveau a été suivie, toujours à New York, d’un Réunion ministérielle du conseil de sécurité sur la force du G5. En effet, du 30 octobre au 1er novembre 2017, une Délégation, conduite par Abdoulaye Diop, alors président du Conseil des ministres du G5 Sahel, a effectué une visite officielle au siège des Nations unies à New York et à Washington. Les Etats-Unis d’Amérique ont annoncé une contribution de 60 millions de $Us à l’opérationnalisation de la FC-G5.
À la suite de ce déplacement des ministres au siège des Nations unies, le Conseil de sécurité a entrepris, du 19 au 22 octobre 2017, une visite dans trois des cinq pays membres du G5 Sahel, à savoir le Mali, la Mauritanie et le Burkina Faso pour collecter des informations nécessaires à la rédaction de son rapport.
Autre décision forte
Présent à Abidjan pour le sommet UA-UE (29 novembre 2017), le président Kéita a eu plusieurs rencontres bi et multilatérales, dont celle qu’il a eue avec les dirigeants du G5 Sahel élargie au président français, Emmanuel Macron. Il a été question de voir comment accélérer la cadence après le lancement des premières patrouilles des troupes de cette organisation.
Et le 13 décembre, s’est déroulée à Paris, à l’initiative du président Emmanuel Macron, une réunion des chefs d’Etat du G5 Sahel. Elle a répondu à toutes les attentes avec deux nouveaux contributeurs financiers à la force conjointe, à savoir l’Arabie Saoudite (100 millions d’euros) et les Emirats Arabes Unis (30 millions). Un apport assez important qui est venu s’ajouter à celles annoncées par l’Union européenne (120 millions d’euros) et les Etats-Unis d’Amérique (60 millions de dollars).
Le 19 décembre 2017, le G5 a soufflé sur ces trois bougies. A l’occasion de cet anniversaire de la création de l’organisation sahélienne, le président Ibrahim Boubacar Kéita a réaffirmé sa ferme volonté à faire face à l’insécurité et au sous-développement. Et, enfin, le 8 janvier à Bamako, s’est tenue la première réunion ministérielle sur l’opérationnalisation de la Force conjointe du G5 Sahel (FC-G5S). Cette rencontre décisive dans l’action commune en faveur de la paix et de la sécurité aura permis aux participants d’approuver des documents relatifs notamment à la création d’un mécanisme de mobilisation, de coordination et de gestion des contributions à la FC-G5S, et à la mise en place d’un Comité de soutien et de contrôle de la Force conjointe.
Autre décision forte prise sa présidence a été la suppression des visas pour tous les types de passeports, entre les pays membres de l’organisation. Cette décision est, depuis le 12 septembre 2017, est en application entre le Mali et le Tchad.
Sans doute, IBK aura fait de son mieux. «Aujourd’hui, je pense qu’il y a des éléments très positifs. Quand on commençait cette affaire de G5 Sahel, là aussi il y avait beaucoup de moqueries, de doute et de scepticisme comme toujours. Mais nous y avons cru. Nous y croyons parce que nous avons compris que chacun des pays, pris individuellement, n’avait pas de grande chance de présence réelle, effective et à hauteur de souhait dans sa défense territoriale et dans la défense de notre espace commun : le Sahel.
Et qu’il fallait avoir cette intelligence de mutualiser nos forces, nos moyens d’information, d’intelligence comme on le dit. Et mettre en commun également nos moyens financiers pour que nos forces soient une force convaincante, une force ad hoc qui puisse faire face à la menace.
Et je pense que cela est aujourd’hui acquis et le monde entier sait désormais que le G5 Sahel est une composante essentielle dans la lutte contre le terrorisme dans le Sahel en particulier et dans le monde en général parce que la lutte dans le Sahel participe de la lutte générale contre le terrorisme. Le Sahel est un espace de passage vers d’autres horizons, notamment vers nos amis européens qui ont bien compris qu’il y avait là un enjeu qui dépassait de loin le seul cadre du Sahel», a-t-il commenté son bilan à la tête du G5 Sahel.
I B D
L’Aube