Hier, 14 mai 2017, le président français, François Hollande, a passé la main à son successeur, Emmanuel Macron, élu le 7 mai 2017, au second tour de la présidentielle française avec un score de près de 66%, devant la candidate du Front national, Marine Le Pen, la fille de l’autre. Que peut-on retenir du bilan du successeur de Nicolas Sarkozy, Hollande l’Africain, qui n’aura passé que cinq ans à l’Elysée, renonçant au passage à briguer un deuxième mandat ? Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’autant François Hollande aura déçu, en cinq ans de pouvoir, bien de ses compatriotes au point d’être au plus bas dans les sondages dans l’Hexagone, autant il peut tirer une plus grande satisfaction de sa politique vis-à-vis du continent africain qu’il aura positivement marqué par certains de ses actes, notamment par son engagement dans la lutte contre le terrorisme. Et ce ne sont pas les Maliens qui diront le contraire ; eux qui doivent la survie de leur pays à l’intervention énergique, en janvier 2013, du natif de Rouen contre les colonnes des envahisseurs djihadistes qui progressaient vers Bamako.
La France de Hollande aura été de tous les combats contre l’hydre terroriste sur le continent
En effet, que serait devenu le Mali, voire la sous-région ouest-africaine, sans cette intervention de Paris ? En tout cas, au lendemain des frappes françaises qui avaient stoppé net les djihadistes dans leur progression vers la capitale malienne, c’est un François Hollande avec certainement le sentiment du devoir accompli, qui affirmait avec une pointe de fierté légitime, que c’était le jour le plus important de sa vie politique. Il ne croyait pas si bien dire. Car, depuis lors, la France a dû maintenir, à son corps défendant, ses troupes dans la région, renforçant au passage sa présence et ses relations de coopération sécuritaire avec la plupart des pays de la sous-région. Ainsi, de Serval à Barkhane en passant par Sangaris, la France de François Hollande aura été de tous les combats contre l’hydre terroriste sur le continent, dans le bassin du lac Tchad et dans le sahélistan ouest-africain. Pas plus tard qu’en fin avril dernier, les troupes françaises ont encore fait le ménage dans la forêt de Foulsaré à travers l’opération Bayard menée à la frontière entre le Burkina Faso et le Mali contre les hommes de Ibrahim Malam Dicko, qui a permis de mettre hors d’état de nuire une vingtaine de djihadistes. Ne serait-ce que pour cela, l’Afrique peut lui être reconnaissante et lui dire : Hollande, anitchié ! Même si quelque part, cette lutte a un goût d’inachevé, car Hollande tire sa révérence à un moment où le phénomène du terrorisme est loin d’être éradiqué sur le continent. Au contraire, il est même en train de se métastaser et de se métamorphoser, pour s’adapter à la riposte implacable des forces internationales. Mais de cela, l’on ne saurait lui en tenir rigueur, puisque le phénomène est devenu planétaire si fait que même les plus grandes puissances y compris la France, peinent à y faire face. Sur un terrain moins reluisant, l’Afrique retiendra aussi de François Hollande, son discours après sa prise de fonction, qui laissait entrevoir une rupture dans les relations entre la France et l’Afrique, avec la fin annoncée de la Françafrique. Et son refus de serrer la main à un Joseph Kabila, n’aura pas échappé aux démocrates du continent qui voyaient en ce geste, l’attachement du président français à des valeurs fondamentales comme le respect strict des règles du jeu démocratique, en somme, un message fort à l’endroit de tous ces satrapes du continent qui en biaisent les règles.
L’Afrique restera pour Hollande, l’un de ses meilleurs souvenirs
Mais, force est de constater que pendant son quinquennat, François Hollande aura été rattrapé par la réalité du terrain d’un continent où les dictateurs font malheureusement la pluie et le beau temps. Il n’aura donc pas eu la fermeté nécessaire contre le mal de l’alternance qui ronge l’Afrique, avec des dictateurs qui s’amusent à ruser avec les textes pour fausser le jeu démocratique et se maintenir au pouvoir. Il en est ainsi du président tchadien, Idriss Déby Itno, qui cumule plus d’un quart de siècle de règne et qui n’a eu aucune peine à rempiler l’année dernière pour un cinquième mandat, parce qu’il est pratiquement devenu la cheville ouvrière du dispositif sécuritaire français dans la lutte contre le terrorisme au Sahel. Il en va de même pour le président Denis Sassou Nguesso que le locataire de l’Elysée aura pratiquement encouragé à se pérenniser au pouvoir, au moment où toutes les conditions étaient réunies pour permettre aux Congolais de se débarrasser de leur satrape. Quant à Joseph Kabila, après avoir refusé de lui serrer la main, François Holande lui déroulera par la suite le tapis rouge à l’Elysée. Allez-y comprendre ! Et il y a lieu de croire que même sa lettre à l’ex-président burkinabè, Blaise Compaoré, dont le public n’a eu connaissance du contenu qu’après la chute de ce dernier, lui déconseillant en substance le tripatouillage de la Constitution de son pays, aurait été gardée sous le boisseau, si l’exilé d’Abidjan avait réussi sa forfaiture. C’est dire donc que sur le plan de la démocratie et du jeu de l’alternance, Hollande n’aura pas véritablement aidé l’Afrique à se débarrasser des vieux dinosaures en manque d’inspiration, qui ont confisqué le pouvoir depuis des décennies, mais qui se refusent toujours à passer la main. Il est venu les trouver aux affaires et s’en va en laissant la plupart d’entre eux encore bien scotchés à leur fauteuil. L’on attend donc de voir si son successeur s’inscrira dans la même logique ou si Macron aura une position plus tranchée. Cela dit, du quinquennat de François Hollande, l’on peut dire qu’il aura été un quinquennat à deux visages : celui d’une France amère qui ne lui aura pas caché son désappointement, l’obligeant à renoncer à briguer un second mandat, et celui d’une Afrique plus reconnaissante que revancharde, en raison de son engagement sur le continent contre le fléau du terrorisme qui donne des insomnies bien au-delà des palais présidentiels, au sein de la grande masse des populations.
En tout état de cause, durant son quinquennat, l’homme au scooter aura essayé de son mieux, d’être un « président normal ». Et en transmettant, les charges à son successeur pour se payer un repos bien mérité, loin peut-être des tourments de la politique, il y a fort à parier que l’Afrique restera pour Hollande, l’un de ses meilleurs souvenirs. François, anibaara !
« Le Pays »