Auteur du roman philosophique «L’Enfant philosophe tome 1 : de la métaphysique, le jeune écrivain, journaliste, Professeur de philosophie, blogueur, Fousséni Togola a récemment mis sur le marché un autre ouvrage intitulé “Féminitude : Musoya” publié chez ” Innov Editions “. Un essai qui dénonce les injustices auxquelles les femmes sont confrontées dans nos sociétés. Dans ce livre, l’auteur évoque également les inégalités sociales vécues au quotidien par les femmes, les sources de la soumission de la femme à l’homme entre autres. Nous l’avons rencontré pour échanger autour de son livre.
Aujourd’hui-Mali : Bonjour, pouvez-vous nous présenter votre livre “Féminitude : Musoya” ?
Fousséni Togola : “Féminitude : Musoya” est un essai philosophique de 60 pages issu d’un travail de réflexion d’une année. C’est un ouvrage qui se veut un livre de combat au service de celles que nous considérons comme des “n’ayant-pas-droits” au sein des différentes communautés. “Féminitude” est un livre que nous pourrons considérer comme un prolégomène à mes réflexions philosophiques sur les tares de la société comme se doit de l’être toute philosophie qui se veut se faire une place dans sa communauté.
Pourquoi ce titre “Féminitude” ?
Féminitude, parce que c’est le concept qui traduit le mieux l’idée développée du début jusqu’à la fin du livre. Ce titre traduit le combat identitaire que doivent mener les femmes au sein de nos sociétés contre les préjugés auxquels elles sont victimes afin de se créer un espace d’expression plus libre pour elle. Le concept Féminitude est aux femmes ce qu’est la négritude pour les Noirs. Il convient par cette occasion de noter qu’il s’agit là d’un concept que j’emprunte à la philosophe française, Simone de Beauvoir.
Quelles sont les raisons qui vous ont motivé à écrire ce livre ?
Subjectives et objectives à la fois ! Le lecteur trouvera dans ce livre d’une manière indirecte certes la référence à ma propre mère. Le livre décrit en grande partie les vécus de cette femme qui m’a donné la vie. Des souffrances dont j’ai été témoin. Outre cela, l’écriture de ce livre relève de mes expériences des souffrances qu’endurent les femmes dans les zones rurales de notre pays. Mes lectures de Simone de Beauvoir m’ont permis de mieux orienter mes réflexions, voire les murir.
D’aucuns pensent que c’est la femme qui doit s’occuper de l’éducation des enfants dans un couple, un point de vue que vous ne partagez pas …
Je trouve d’ailleurs tout un paradoxe à ce niveau. Comment se fait-il que vous qualifiiez un être d’inférieur, de courte d’esprit, de faible, et ensuite confier l’avenir de tout un autre être ? La vie d’un homme dépend de son éducation. Ce qui prouve qu’il faudrait que celle-ci soit mieux assurée par des esprits bien ouverts. Or, la femme ne l’est pas dans les considérations provenant en général du commun des mortels, alors, il conviendrait que les hommes s’occupent également de l’éducation des enfants, ces êtres immatures. D’ailleurs, cette forme de complémentarité constitue une des recommandations de cette lutte pour l’égalité. L’homme et la femme doivent s’occuper ensemble de l’éducation des enfants. Cela va dans l’intérêt non seulement des enfants, mais aussi de la défense des droits des femmes à l’épanouissement.
Les traditions culturelles, un obstacle à l’épanouissement de la femme selon vous, comment ?
Beaucoup de nos sociétés font développer chez les enfants, depuis à bas âge, des idées discriminatoires à travers non seulement la répartition des tâches, les jeux, mais aussi et surtout l’éducation. À la jeune fille, il lui est enseigné la soumission ; au jeune garçon, à régner en maitre absolu. Ces façons d’agir tuent en la jeune toute idée d’épanouissement ou plutôt d’engagement. Ainsi, elle subit toute forme de violence et l’accepte parce que se dit n’ayant aucun recours et que de toute façon, elle est appelée à les accepter comme on lui a toujours appris. Dans ces contextes, on ne pouvait pas imaginer, voire parler d’un épanouissement de la gent féminine.
La religion, l’autre source de soumission de la femme à l’homme ?
Dans le livre, vous vous rendrez compte que je dégage deux sources de soumission : les traditions et la religion surtout les religions dites monothéistes notamment le christianisme et l’islam. Toutes ces deux développent des images négatives de la femme. Un être satanique puisqu’étant à l’origine du péché originel ; un être dont l’accession au paradis dépend de son rapport à son mari ; un être dont il est permis de violenter. Ces considérations ne favorisent pas l’épanouissement des femmes. Elles visent toutes à inviter ces êtres à la soumission à un ordre phallocratique où le chef de famille est le roi et la femme est à la place de l’esclave.
Votre livre est jugé féministe par certains lecteurs alors que leur répondez-vous ?
Féministe dans ce sens qu’il s’agit d’une revendication des droits de la femme au sein de la société. Comme je l’ai sus-expliqué, ” Féminitude ” est un ouvrage qui revendique plus d’espaces appropriés à l’expression, l’épanouissement de la femme au sein de la société en la débarrassant de certaines contraintes culturelles, sociales, religieuses. Le tapuscrit condamne de ce fait, les inégalités et les injustices faites aux femmes. Alors, ceux qui voient en lui un ouvrage féministe ne se seraient pas trompés.
En un mot, prônez-vous l’égalité entre l’homme et la femme…?
Vous l’aurez compris mon cher Youssouf, l’égalité que je prône est l’égalité dans la complémentarité. L’homme et la femme doivent se compléter dans le foyer, dans la société pour l’harmonie de la vie en communauté. Vous l’auriez constaté, je parle de “différence-de-non-différence” dans le livre pour montrer que tous les points dont nous essayons de nous fonder pour montrer que la suprématie d’un tel être sur un tel autre ne constitue que des mentalités phallocratiques sur lesquels, nul besoin de se fonder puisqu’ils constituent des éléments de complémentarité et non de différentiation, voire de suprématie d’un être à un autre.
Avez-vous d’autres projets d’écriture ?
Un écrivain ne manque pas de projets d’écriture. Mon prochain ouvrage qui se trouve en phase de relecture constitue un roman philosophique sur l’éducation des enfants, l’enseignement de la philosophie. Il prône au départ une philosophie pour les enfants pour ensuite s’acheminer aux questions politiques, morales et finir par la famille. Je mets en scène une jeune fille épanouie s’adonnant à des réflexions philosophiques : métaphysiques, politiques, morales…Outre cela, je réfléchis également sur un essai sur la crise malienne, voire mondiale.
Peut-on connaître votre genre littéraire préféré ?
J’écris plus des essais philosophiques, même s’il m’arrive souvent de faire des romans philosophiques, voire des nouvelles. Ce qui laisse entendre que je n’ai pas de genre au sein duquel je puisse être enfermé. Cela relève d’une conviction : celle d’écrire pour l’humanité, quel que soit le genre. L’écrivain est au service de l’humanité, en tant que tel, il doit se permettre de naviguer entre les genres s’il veut s’adapter au niveau intellectuel de ses lecteurs, mais aussi du domaine abordé. Néanmoins, je me sens mieux dans l’essai.
Quel sera votre dernier mot ?
Je vous remercie pour cet entretien non moins important dont j’ai bénéficié en tant qu’écrivain, parce que mené avec un homme des lettres. Je profite de cet espace pour inviter tous les amoureux du savoir à découvrir cet ouvrage “Féminitude : Musoya” disponible auprès de la maison d’édition Innove Editions. C’est disponible également à la Librairie Bah du Grand Hôtel de Bamako ainsi que près des bouquinistes devant l’ENSup de Bamako. Je remercie Innov éditions des efforts colossaux qu’elle déploie pour venir en aide à nous, les jeunes écrivains. Mes remerciements vont également à l’endroit de toute la rédaction de Aujourd’hui Mali. Je tiens, avant de finir, à préciser, une fois de plus, que les avis des lecteurs ainsi que les critiques littéraires me permettront d’affiner davantage ma plume.
Réalisée par Youssouf Koné et Hamady Barry
Source: Aujourd’hui-Mali