Le pouvoir au Mali admet que certains soldats sont impliqués dans des violations graves des droits de l’homme. Beaucoup s’interrogent sur la formation des FAMa au droit international humanitaire qui régit la guerre.
C’est un fait plutôt rare : le gouvernement du Mali admet officiellement que certains soldats sont impliqués dans des violations graves des droits de l’homme ayant entraîné la mort dans la région de Mopti dans le centre du pays. Les corps de 25 personnes ont en effet été retrouvés ces derniers jours, une semaine après une série d’arrestations par l’armée malienne. Situation inconfortable pour cette armée qui reçoit le soutien des partenaires occidentaux sur le plan de sa formation.
La nouvelle a poussé les plus hautes autorités du Mali à réagir. Même le président de la République Ibrahim Boubacar Keita, candidat à sa propre succession lors de la présidentielle du 29 juillet prochain, a pris ses distances devant des défenseurs des droits de l’homme.” Nous ne sommes pas en train de rebâtir nos forces armées pour en faire une armée qui serait ignorante du droit humanitaire des conflits “, a notamment déclaré IBK.
La question du droit de la guerre
Depuis plus de cinq ans, l’EUTM, la mission militaire de l’Union européenne, forme l’armée malienne. Une mission qui a déjà englouti plusieurs dizaines de millions d’euros.
Que des soldats de cette armée soient donc impliqués dans des exécutions sommaires de membres de la communauté peule dont les cadavres ont ensuite été enfouis dans des fosses communes, cela ne laisse pas indifférent Aurélien Tobie, expert du SIPRI et auteur de recherches sur les troubles dans le centre du Mali. L’EUTM, explique-t-il, ” dispense une formation sur les droits de l’homme. Et cette formation est reçue par chaque bataillon qui passe par la formation de l’EUTM. Maintenant, la formation ne peut pas tout.”
En effet, de la formation dispensée au déploiement sur le terrain, il y a l’étape de la restitution dans la chaîne interne de l’appareil sécuritaire. D’où cette réserve de l’expert Aurélien Tobie du SIPRI : ” rejeter la responsabilité de ces actes-là sur une formation qui serait incomplète ou pas suffisante de la part de l’Union européenne, je pense que c’est un pas un peu trop en avant.”
Pas la première fois
Il y a quelques mois, des armes sophistiquées auraient été retrouvées avec des membres de la communauté dogon, des armes utilisées dans des affrontements contre des membres de la communauté peule. Aussi, une quinzaine de Peuls ont-ils trouvé la mort en avril dans des circonstances obscures.
Accusée, l’armée malienne parlait alors de prisonniers tentant de s’évader.
L’actuelle découverte de fosses communes relance l’importance de la sensibilisation au droit de la guerre. Selon le Lieutenant-Colonel Modibo Traoré, officier des affaires publiques des forces armées maliennes, l’enseignement de notions du droit international humanitaire est bien ancré dans les pratiques : “effectivement, ça c’est une occasion encore pour essayer de renforcer dans les esprits la notion du respect du droit international humanitaire. Et en plus de l’EUTM, il y a l’école de maintien de la paix. Ca fait partie même des programmes d’enseignement militaire au niveau de la formation commune de base “, explique l’officier malien.
A quelques semaines de l’élection présidentielle, l’armée malienne se veut pourtant rassurante. Sur son compte Twitter, elle informe sur les dispositions qu’elle est en train de prendre en matière de police de proximité, en lien avec ce scrutin crucial.
Deutsche Welle