La majorité de nos concitoyens s’accorde sur la nécessité d’accompagner les acteurs et opérateurs culturels dans leurs initiatives de création ou de production artistique. Certains avancent dans leur réflexion l’idée de mise en place d’un fonds national dédié à cela
Le manque de soutien à la création et à la production est un vrai casse-tête pour le secteur culturel. Les ressources injectées dans le domaine par l’état sont bien peu pour couvrir les besoins et les gens ne perçoivent pas forcément les vrais enjeux de la culture au point d’y investir leur argent. Or, ce secteur est porteur, notamment avec des artistes au talent reconnu à l’échelle planétaire.
Aujourd’hui, il est établi que les acteurs et opérateurs culturels sont réellement confrontés à une problématique de financement de la création contemporaine. Les mécènes et autres bonnes volontés qui acceptent de mettre la main à la poche pour accompagner la création et la production artistiques se comptent sur les doigts d’une main. Autrement dit, ils sont très rares à courir ce risque. Cette situation impose aux artistes de se tourner vers des partenaires sous d’autres cieux.
Au niveau national, certaines structures privées essaient d’accompagner les créateurs d’œuvres artistiques. C’est le cas de Maaya, un fonds mis en œuvre par le Réseau Kya, une organisation à caractère social, basée sur les valeurs de partage et de solidarité, mais aussi du Fonds africain pour la culture. Le ministère de la Culture, de l’Artisanat et du Tourisme aussi multiplie les initiatives et les actions pour soutenir du mieux qu’il peut la création et la production.
Adama Traoré, président d’Acte Sept, explique la nécessité de renforcer le plaidoyer au niveau des institutions qui financent les projets artistiques et culturels ainsi qu’au niveau du département des Affaires étrangères et de la Coopération internationale. L’arrêt des différents programmes de la communauté européenne sur le financement de la culture, à savoir : le Programme d’appui et de valorisation des initiatives artistiques et culturelles (Pavia) qui avait été mis en œuvre entre 2005 et 2008 grâce à l’appui du 9è Fonds européen de développement (Fed) pour un financement de 4,9 millions d’euros, soit environ un peu plus de 3,2 milliards de Fcfa.
Le Projet de soutien aux initiatives culturelles (PSIC) aussi a apporté à titre de contribution, un financement de1,830 million d’euros, soit environ un peu plus de 1,1 milliard de Fcfa. Ces projetsont impacté l’économie de la culture dans notre pays. Ils ont connu un franc succès et conduit à l’époque, à l’élaboration d’un nouveau programme de soutien au secteur de la culture sur financement du 10è Fed, appelé Programme d’appui au développement économique et social de la culture au Mali (Padesc), avec un budget de 4,6 millions d’euros, soit environ un peu plus de 3 milliards de Fcfa sur une période de deux ans (2009-2010).
Ces projets sont aujourd’hui à l’arrêt et les créateurs artistiques et autres opérateurs culturels s’accommodent mal de cette situation. Ils appellent de leurs vœux la reprise du collier par ces programmes qui apportaient une réelle bouffée d’oxygène aux artistes. Une autre difficulté majeure de notre pays a été de rester longtemps à l’écart du financement de la Francophonie au profit des sports. Seules les disciplines sportives sont accompagnées au niveau des Jeux de la Francophonie.
Le président de l’Association Acte Sept et de la Fédération des artistes du Mali (Fedama),tente de mieux expliquer les difficultés de financement des créations artistiques et culturelles. Selon lui, ces difficultés sont d’ordre politique et institutionnel. Il estime que le budget alloué au département en charge de la Culture représente moins de 1%. En termes clairs, il s’agit d’environ 0,42 % du budget national.
Cette dotation ne permet pas à ce département de soutenir laproduction artistique comme il le faut parce que plus de 90% de ces ressources sont utilisés dans le fonctionnement.Il faut également relever qu’au niveau des Affaires étrangères et de la Coopération internationale, des programmes soutenus par l’Union européenne ou d’autres partenaires comme Africanisa de la Belgique ont disparu.
La bonne question est de savoir si réellement notre pays dispose de suffisamment de compétences pour défendre la vision culturelle du Mali, en apportant de solides arguments pour convaincre les partenaires à continuer à perfuser le secteur culturel. Le président de la Fedama cite volontiers l’exemple de la France où, le ministère des Affaires étrangères exploite l’expertise des personnes capables de faire une meilleure lecture de la culture et de susciter de l’intérêt autour du secteur, c’est-à-dire de la culture qui est le socle du développement de toute nation.
Il est aussi utile de rappeler que notre pays a amorcé une décentralisation dans laquelle les compétences et les ressources devraient être transférées aux collectivités territoriales. Malheureusement, on se demande toujours pourquoi, on n’arrive pas à transférer les ressources. Ce qui représente une vraie épine dans le pied des collectivités qui ne peuvent très clairement pas soutenir dans ses conditions les projets culturels, notamment de création et de production.