Le front social au Mali est actuellement en ébullition à quelques mois des élections présidentielles de 2018. Pas plus tard qu’avant-hier, lundi 18 décembre 2017, un sit-in de l’Association Cercle de Yélimané Dagakané se tenait devant l’Assemblée nationale du Mali pour que justice soit faite suite à l’affrontement entre force de l’ordre et population de Yélimané le vendredi 15 décembre 2017. Le même vendredi 15 décembre, les femmes des bérets verts ont battu le pavé jusqu’à la primature pour exiger la libération ou le jugement de leurs époux. Outre les manifestations, les mouvements de grève sont signalés ça et là. Depuis le lundi 18 décembre 2017, le Collectif des Syndicats de l’Education signataires du 15 octobre 2016 est en grève de 9 jours sur toute l’étendue du territoire. Le Syndicat national des chauffeurs et conducteurs routiers du Mali (Synacor-Mali), lui aussi, a entamé hier, mardi 19 décembre 2017 une grève illimitée. La Section syndicale des surveillants de prison (SSP) devait commencer sa grève de 72 heures à partir de ce mercredi 20 décembre. Mais aux dernières nouvelles, un point d’accord fut trouvé entre la section syndicale et le gouvernement. Ces débrayages sont faits non seulement pour l’amélioration des conditions de vie des travailleurs mais aussi, en guise de protestation contre la politique intérieure de l’Etat Malien.
Présentement le gouvernement malien est dans des sals draps. Car, non seulement, les manifestations deviennent de plus en plus intenses, mais aussi, le front social renoue avec les grèves après une courte période de répit. Le vendredi 15 décembre 2017, un affrontement violent a opposé les forces de l’ordre (gendarmerie et Garde nationales) et la population de la commune de Konsiga (cercle de Yélimané, région de Kayes). L’affrontement a fait un mort et plus d’une dizaine de blessés. Indigné par les faits, l’Association Cercle de Yélimané Dagakane (ACYD) a tenu un sit-in, le lundi 18 décembre 2017, devant l’Assemblée nationale du Mali pour exiger l’ouverture d’une enquête afin de situer les responsabilités et sanctionner les coupables, le départ du préfet du cercle de Yelimane, le départ du sous-préfet de la commune de Tambacara et le départ du gouverneur de la région de Kayes. Selon les manifestants, cet affrontement résulte des différents contentieux électoraux depuis 2009 qui n’ont jamais été vidés. Le même vendredi 15 décembre 2015, Bamako a aussi connu son lot de manifestation. Cette dernière a été organisée par les femmes des bérets verts qui ont marché jusqu’à la primature pour exiger la libération ou le jugement de leurs maris emprisonnés il y a de cela plus de trois ans.
Les syndicalistes aussi bandent leurs muscles
En plus de ces manifestations, les syndicalistes ont aussi des dents contre le gouvernement. C’est le cas du Collectif des Syndicats de l’Education signataires du 15 octobre 2016 qui regroupe six syndicats à savoir le syndicat libre et démocratique de l’enseignement fondamental (Sydef), le syndicat national de l’éducation de base (Syneb), le syndicat national des enseignants de secondaire de l’Etat et des collectivités (Synesec), le syndicat national des enseignants fonctionnaires des collectivités (Synefct), la fédération nationale de l’éducation de la recherche et de la culture (Fenarec) et le syndicat des professeurs de l’enseignement secondaire et des collectivités (Sypesco). Ce Collectif de syndicat d’enseignant est en grève de 9 jours (216 heures) sur toute l’étendue du territoire depuis le lundi 18 décembre 2017. Dans le préavis de grève en date du 11 décembre 2017 adressé au ministre du travail de la fonction publique, chargé des relations avec les institutions, le Collectif exige l’adoption immédiate du projet de loi portant statut du personnel enseignant de l’Enseignement Secondaire, de l’Enseignement Fondamental et de l’Education Préscolaire et Spéciale et la promulgation et l’application de ladite loi. Constatant la fin de la session d’octobre 2017 sans l’adoption de leur statut autonome, le Collectif du syndicat d’enseignant dénonce la « mauvaise foi du gouvernement ». Outre ce collectif de syndicat d’enseignant, le Syndicat national des chauffeurs et conducteurs routiers du Mali (Synacor-Mali) veut se faire entendre. Ce syndicat des gros porteurs a entamé hier mardi 19 décembre 2017 une grève illimitée pour l’amélioration des conditions de vie et de travail des transporteurs. Le Synacor Mali qui avait obtenu un accord du gouvernement suite à la grève du 21 mai 2017 dénonce la mauvaise volonté des autorités à honorer leurs engagements. Ce syndicat dirigé par Moctar Dabo, exige entre autre : la relecture de l’arrêté interministériel fixant le nombre et l’implantation de postes de contrôle routier dans le but d’éradiquer les tracasseries routières, la mise en œuvre d’une convention collective, le plan de carrière des chauffeurs et bien d’autres. « Vu la loi n°92-020 du 23 septembre 1992 portant code du travail, les conventions n°87 et 98 de l’OIT ratifiées par notre pays, relatives à la liberté syndicale et au droit d’organisation et de négociation collective, le procès-verbal de conciliation du 23 décembre 2015, le comité exécutif du Synacor a décidé d’observer cette grève illimitée. Et cela jusqu’à l’application immédiate et sans condition des conventions… La question de la mise en œuvre d’une convention collective divise toujours. Aujourd’hui, nous sommes engagés plus que jamais à ramener nos camarades dans leurs droits puisque le manque de plan de carrière a causé de préjudice à plusieurs camarades. Ils ont été licenciés dans les sociétés Star Oïl (13 personnes), Gigyme (6 personnes), Africa Global (3 personnes) et Niangado Transport (7 personnes) », a-t-il déploré. La Section syndicale des surveillants de prison (SSP) devait commencer sa grève de 72 heures à partir de ce mercredi 20 décembre. Mais aux dernières nouvelles, un point d’accord fut trouvé entre la section syndicale et le gouvernement. On se rappelle que dans leur préavis de grève déposé le 4 décembre sur la table du gouvernement, le syndicat exigeait la mise en œuvre effective de la loi portant statut des fonctionnaires du cadre de la surveillance des services pénitentiaires et de l’éducation surveillée, notamment l’allocation des primes et indemnités et l’avancement par voies de concours et ou de formation des surveillants de prison. « Cette loi a été adoptée le 20 juin 2016 par l’Assemblée nationale et promulguée par le président de la République le 07 juillet de la même année. Et depuis, le processus semble stagné parce que certains projets de décrets et d’arrêtés devant être initiés par notre département de tutelle se font toujours attendre par une corporation entièrement exposée à de très nombreux risques quotidiens dans l’exercice de sa délicate mission de surveillance et d’éducation des détenus. Chaque jour qui passe en ajoute à la longueur d’hommes et de femmes engagés dans une même communauté de destin, celui de surveiller la vie des citoyens en situation de détention. Les surveillants de prison ont fait preuve d’une certaine longanimité puisqu’ils attendent depuis des mois ce que l’Etat leur a promis. Il n’est pas inutile de rappeler que certaines situations deviennent délétère suite à la négligence des décideurs », a souligné le secrétaire général de la section syndicale, Abdoulaye Fofana.
Aguibou Sogodogo
Source: Le Républicain