Une fois encore, le pays est au cœur de l’actualité diplomatique brûlante avec en toile de fond la décision des autorités de la transition d’expulser du territoire national le représentant de la Cedeao, accusé « d’agissements incompatibles avec son statut ». Regret de la Cedeao et du Burkina Faso, le pays d’origine du diplomate mis en cause, de voir Bamako agir si brutalement dans une affaire où le dénouement diplomatique était si proche.
L’énigme d’un quiproquo diplomatique…
Au moment où ces lignes sont entre vos mains, le représentant de la Cedeao à Bamako, le Burkinabé Boly, est certainement bien loin de la capitale malienne. Jugé personae non grata, et expulsé du pays, quelques jours plus tôt, le diplomate de la Cedeao, en poste à Bamako, il y a seulement un an, n’est pas en bons termes avec les autorités de la transition qui ont ainsi décidé qu’il quitte le pays dans les 72 jours qui suivent son interpellation.
Si, à Bamako, on se réjouit de cette décision, estimant que le diplomate mis en cause avait été auparavant mis en garde ; lui et sa hiérarchie, sur les « agissements, jugés incompatibles avec son statut », auxquels il s’adonnait à Bamako, depuis un certain moment. Il est vrai que ce n’est pas la même expression diplomatique qu’on entend de cette décision qu’il s’agisse de la Cedeao, la hiérarchie diplomatique, comme l’indiquent clairement les autorités maliennes, ou au niveau du Burkina Faso, où l’on pense très clairement que Bamako est allé plus vite, dans la brutalité, pour gérer une affaire, dont le processus de dénouement amiable était enclenché, voire même en cours.
En fait, dans un communiqué, paru dans la foulée de la décision de Bamako, la Cedeao, après avoir exprimé son regret face à l’expulsion de son représentant, fait savoir clairement que ce dossier, en accord avec les Maliens, était en voie de règlement diplomatique et que le processus du remplaçant même du diplomate burkinabé à Bamako était bien lancé.
Même son de cloche à Ouagadougou, où les autorités n’ont pas manqué d’exprimer elles-aussi leurs vives préoccupations face à un problème diplomatique qui n’en était plus un puisque étant littéralement tranché.
Le ministre des affaires étrangères du Faso, notre confrère Alpha Barry, sur les ondes de la télévision burkinabé a dit clairement à qui veut l’entendre que le dossier relatif au représentant de la Cedeao était parfaitement à l’étude entre lui et son homologue malien, Abdoulaye Diop, avec lequel ils ont régulièrement discuté sur la procédure du remplacement du diplomate en cause ainsi que les dispositions pratiques y afférentes.
C’est tout naturellement que le ministre Barry exprime son étonnement face à la tournure prise par cette affaire à Bamako qui n’aurait pas dû prendre cette proportion violente. Cet état d’esprit des choses, côté burkinabé, a tout son sens d’autant qu’en diplomatique, les choses sont strictes et ont leur effet induit sur les relations entre les pays concernés.
Et pour cause ? Le poste du représentant de la Cedeao au Mali, en ce moment, et ce, pour un certain temps, relève du mandat du Burkina Faso. Aller dans une telle extrémité, pour expulser un tel diplomate, ressortissant d’un pays qui partage tout avec le Mali, en raison de sa proximité immédiate, peut s’avérer problématique, pour nous, dans un autre contexte, surtout qu’en l’espèce, il est évident que la concertation ; le remède pour les pays de régler les malentendus diplomatiques, n’a pas été la chose la mieux partagée par les autorités de la transition, notamment dans le dernier virage du règlement de cette affaire.
Et alors pourquoi, depuis quelques temps, la diplomatie est du coup malmenée dans notre pays ? A-t-on soudainement au Mali un intérêt quelconque à ramer en contrecourant diplomatique avec les pays amis et autres partenaires ? Qui a intérêt à un tel quiproquo diplomatique qui ne tardera pas à nous rattraper ?
Au-delà des tendances à la flagornerie tous azimuts, qui rejaillissent au sein de l’opinion, face à cette situation, pour le moins inhabituelle dans nos relations avec les autres pays, l’énigme de ce nouveau malentendu avec la Cedeao, et de tous les autres errements diplomatiques, est décidément bien ailleurs.
Oumar Konaté