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Exploitation minière dans la région de Kayes : L’or appauvrit davantage les communautés

L’apport du secteur minier à l’économie malienne est significatif. Rien que dans la première région du pays, la région de Kayes, la SOMILO, l’une des plus importantes entreprises aurifères actives, a contribué, depuis sa création jusqu’en 2014, à hauteur de plus de 1000 milliards de FCFA à l’économie nationale. Et pourtant, selon le dernier rapport d’International Alert, les communautés à la base bénéficient peu de l’exploitation minière dans la région de Kayes. L’exploitation minière a des «conséquences néfastes » sur le développement socio-économique local dans cette région. En matière d’emplois, «les attentes des populations n’ont pas été comblées. 7972 emplois formels crées sur une population totale de la région avoisinant les 2 millions d’habitants, dont une majorité de jeunes désœuvrés », note le rapport.

Mines or orpaillage Sadiola

«La montagne a accouché d’une souris », est le titre du dernier rapport produit en octobre 2015 par International Alert sur l’impact socioéconomique de l’activité minière dans la région de Kayes, avec l’aide financière de la coopération allemande. Surpopulation, augmentation des prix, l’abandon  des terres agricoles, dépravation des mœurs, dégradation de l’environnement, exacerbation de conflits préexistants, litiges fonciers, désœuvrement des jeunes, incapacité de l’Etat…, tels sont les conséquences néfastes relevées par le rapport dans l’exploitation minière en première région.

Les entreprises opérant sur les sept sites miniers de la région emploient 7692 personnes (dont 7375 nationaux, soit 95%) en 2015. En 2014, elles ont payé plus de 2 milliards de FCFA de taxes aux collectivités locales, et ont acheté pour plus de 300 milliards de FCFA aux fournisseurs et sous traitants « locaux ». Néanmoins, note le rapport, les emplois et les projets communautaires ne bénéficient pas à tous les villages affectés par l’exploitation minière, ce qui crée des tensions. «De plus, la plupart des fournisseurs qualifiés de « locaux »peuvent être catégorisés plutôt comme nationaux, car très peu d’entre eux sont originaires de la région, et encore moins des communes et villages avoisinants. L’intégration des mines dans le tissu économique local peut donc être considérée comme faible ».

Faible impact des projets communautaires

S’agissant de l’impact des projets communautaires, le rapport constate des efforts de la part des compagnies aurifères. Des efforts qui se traduisent par des montants annuels alloués au développement communautaire oscillant, pour chacune, entre 40 millions de FCFA et 468 millions de FCFA. Et si la plupart des mines contribuent à une certaine amélioration du cadre de vie des communautés environnantes, poursuit le rapport, les sentiments sont mitigés, de part et d’autre, eu égard à la quantité et à la qualité des investissements communautaires. « Même si les populations et les autorités locales et coutumières sont régulièrement impliquées, il s’agit plus d’une consultation que d’une participation effective des populations à toutes les prises de décision concernant les projets financés ( choix, montant, secteur, maître d’ouvrage)…Les emplois et les projets communautaires ne sont pas accessibles de façon égale pour les membres de la communauté, ne bénéficient pas à tous les villages affectés par l’exploitation minière, et les bénéfices socioéconomiques de la création et de projets ne sont pas toujours durables. », lit-on dans le rapport.

Bouleversements sociaux

Dans le rapport, les principaux témoignages font état d’un « désenchantement des villageois » par rapport à la question minière. Selon le rapport, aux yeux des villageois, la présence de la mine a entrainé la cessation des activités agricoles, le désœuvrement de la jeunesse qui n’a pas trouvé d’emplois et les abandons scolaires.«L’attrait de la mine a causé une surpopulation qui elle-même a engendré une hausse des prix généralisée, des problèmes de santé et une désintégration du tissu social. », explique le rapport.

Concernant la surpopulation, à titre d’exemple : Kéniéba comptait en 2005 environ 60 000 habitants ; elle en aurait désormais 200 000. Cette surpopulation, mentionne le rapport, a eu comme conséquence la prolifération des bars et débits de boisson avec comme corollaire une forte consommation d’alcool, de drogue, une augmentation des accidents de la route, une hausse des divorces, une multiplication des grossesses non désirées et une hausse de la criminalité et de l’insécurité qui touche principalement les femmes.

En outre, dit le rapport, l’activité minière a également provoqué une dépossession de vastes étendues de terres cultivables et une pénurie de pâturages. L’impact de l’exploitation des ressources minières se caractérise aussi, selon le rapport, par la destruction de la flore, la dégradation des routes et des sols, l’affectation de la nappe souterraine, la stagnation du bassin à boue contenant des eaux usées, la prolifération des produits toxiques et la pollution de l’air. «  Ces impacts environnementaux entraînent des réductions dans la productivité agricole et peuvent avoir des impacts sur la santé ».

Incapacité de l’Etat

L’incapacité de l’Etat, poursuit le rapport, a été confirmée par la plupart des services techniques visités. Elle se manifeste par un manque de compétences et de moyens aussi bien financiers que logistiques. Cette incapacité est symbolisée par les propos d’un agent technique dans le rapport : «  les experts de la mine sont mieux équipés et mieux formés que les agents de l’Etat. On peut venir dire qu’il y a pollution, mais on ne peut pas dire à quel seuil ou quel est le seuil critique. On ne peut pas dire que l’établissement a dépassé le seuil toléré et que l’air est pollué. Eux-mêmes, ils nous forment. L’Etat doit normalement se donner les moyens de faire des contre-vérifications, on n’a pas les moyens techniques de faire la contre-expertise. On n’a pas bénéficié de formation. Depuis que j’ai intégré la fonction publique, je n’ai pas bénéficié d’une mise à niveau, je n’ai participé à aucune formation. «A titre d’exemple, le service technique ACPN ne dispose que d’un seul agent de l’assainissement pour 271 localités (dont 13 communes) qui couvrent 20250 km2 et 15265 concessions». Les services ne disposent pas d’outils techniques de contrôle et sont donc limités à des tâches d’observation.

Madiassa Kaba Diakité

 

Source: Lerepublicainmali

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