L’arrivée de la société française AMR dans l’exploitation de la bauxite alimente les débats. Le hic, c’est la présence comme actionnaire d’Anne Lauvergeon soupçonnée en janvier 2012 d’être impliquée dans l’escroquerie du rachat, en 2007, de la start-up minière canadienne UraMin qu’Areva rachète à prix d’or.
La société française AMR se tourne vers le Mali alors que sa mine de bauxite en Guinée a commencé sa production. Et bonjour les spéculations et commentaires sur le choix peu éclairé d’une société dont un des actionnaires n’est autre qu’un ancien PDG d’Areva SA. Pour beaucoup d’observateurs, une telle présence dans l’exploitation du sol malien est loin d’être fortuite. En plus, cette présence relance les débats et crée des forts soupçons sur la préférence de cette société française au Mali alors qu’elle a déjà conquis le marché guinéen.
C’est la société française, Alliance Minière Responsable, elle-même qui a indiqué qu’elle cherchera de nouveaux gisements au Mali alors que son projet de 200 millions de dollars dans le Nord de la Guinée a démarré la production mardi.
La mine de bauxite d’AMR dans la région de Boké en Guinée devrait augmenter sa production annuelle jusqu’à 10 millions de tonnes dans les deux prochaines années, a déclaré Romain Girbal, président et co-fondateur de la société basée à Paris dans une interview à Conakry. La mine devrait produire 150 millions de tonnes d’aluminium-ingrédient au cours des 15 prochaines années.
L’entreprise utilisera “l’expérience que nous avons en Guinée pour en développer une autre au Mali”, a déclaré à Bloomberg, M. Girbal. “AMR voudra probablement de la bauxite, mais nous allons aussi regarder l’or”.
Les fabricants d’aluminium investissent en Guinée pour accéder à plus d’un quart des réserves connues de bauxite afin de combler le vide laissé par les interdictions d’exporter en Indonésie et en Malaisie. La nation est en concurrence avec l’Australie en tant que principale source de minerai de Chine en 2017 et est sur le point de devenir l’un des trois premiers producteurs mondiaux au cours des deux prochaines années.
Parmi les actionnaires d’AMR, citons l’ex-PDG d’Areva SA, Anne Lauvergeon, et Edouard Louis-Dreyfus, président de la compagnie maritime qui porte son nom. Les plus grands producteurs de bauxite en Guinée comprennent la Société minière de Boké et la Compagnie Bauxite de Guinée, qui exportent chacune environ 15 millions de tonnes de minerai par an.
Depuis l’annonce de la présence des actionnaires de l’ex-PDG d’Areva dans la société appelée à exploiter la bauxite, des voix commencent à se lever pour désavouer l’octroi de ce permis. Les raisons sont simples, l’ex-PDG d’Areva SA, Anne Lauvergeon, n’a pas bonne presse notamment dans l’affaire UraMin, murmure un responsable de la société civile dans l’anonymat.
Des raisons qui irritent
Anne Lauvergeon est soupçonnée en janvier 2012 d’être impliquée dans l’escroquerie du rachat, en 2007, de la start-up minière canadienne UraMin, qu’Areva rachète à prix d’or (1,8 milliard d’euros d’argent public), sans que cette société n’ait jamais encore extrait le moindre gramme de minerai. Lauvergeon a décidé l’achat malgré les avis contraires de ses collaborateurs. Rapidement, un audit interne disculpe l’ancienne présidente mais elle est déboutée de son action en référé qui demandait qu’Areva publie l’intégralité de son rapport interne la blanchissant dans cette affaire. La part des pots-de-vin et des rétro-commissions auprès des hommes politiques des pays d’Afrique où se situent les mines, notamment l’Afrique du Sud, a été évoquée, mais les preuves manquent encore. De plus son mari Olivier Fric est suspecté de recel et blanchiment de délit d’initié pour avoir acheté à très bon compte un gros paquet d’actions de la start-up minière en 2007, juste avant qu’Areva ne l’achète. Une enquête judiciaire contre Areva, commencée en décembre 2015, est actuellement en cours sur cette affaire. La Cour des comptes revient en 2014 sur les années Lauvergeon, et critique la personnalité et les actions d’Anne Lauvergeon, l’évolution de sa rémunération, notamment une augmentation de salaires “fondée pour une large part sur des taux de réussite faussement précis”, l’échec de l’EPR et l’achat d’UraMin, ces deux dossiers coûtant plusieurs milliards d’euros à l’État, à cause de mauvaises études de la part d’Areva. Pour sa défense, Anne Lauvergeon précise que Jean-Cyril Spinetta, patron du conseil de surveillance, n’avait pas contesté les conditions d’acquisition d’UraMin et que les comptes d’Areva ont été validés par plusieurs cabinets d’audit. Le parquet se penchant sur la période 2007-2010 a ouvert une enquête préliminaire pour “présentation ou publication de comptes inexacts ou infidèles”, “diffusion d’informations fausses ou trompeuses”, “faux et usages de faux”. Le 17 février 2016 l’émission Pièces à conviction porte sur Anne Lauvergeon, l’ancienne patronne controversée d’Areva et lui impute la responsabilité des pertes du groupe industriel, estimées entre 10 et 15 milliards d’euros. En mai 2016, elle est mise en examen pour présentation et publication de comptes inexacts et diffusion de fausses informations. Ancienne “sherpa” du président François Mitterrand, elle est nommée en 1999 à la tête de la Cogema, qu’elle transforme après la fusion avec Framatome en groupe nucléaire public, sous le nom d’Areva, dont elle préside le directoire de 2001 à 2011.
A. M. C. avec Wikipédia
Source: L indicateur du renouveau