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Être missionnaire : Témoigner « que l’on est aimé de Dieu»

Avant tout, la mission d’annoncer d’Évangile, c’est le travail de l’Esprit. C’est l’Esprit Saint qui travaille en nous qui nous pousse et nous porte à vivre d’une certaine manière, à nous engager dans la vie religieuse. Et c’est l’ensemble de cette vie donnée avec joie qui est mission et aussi annonce tout particulièrement dans la vie religieuse. Ce n’est pas faire des choses, ce n’est pas mettre en œuvre des œuvres, c’est avant tout une vie à la suite du Christ et à l’écoute de l’Esprit au quotidien qui annonce quelque chose de l’Évangile.

La pandémie pour moi a fait bouger les lignes. On s’est rendu compte que l’on pouvait changer dans nos vies: au niveau du travail on a pu se réorganiser autrement; nous-mêmes, en fraternité, on a pu vivre les choses autrement. On a donc une capacité de bouger, de changer, de s’adapter, de répondre autrement aux besoins des gens. Pour moi c’est un grand enseignement de la pandémie, et qui continue.

 Pouvez-vous nous partager une expérience marquante que vous avez vécue concernant la mission, cet aspect missionnaire?

Un des aspects de notre vie de petite sœur de l’Évangile, dans la manière de vivre la mission, c’est une attention particulière à la vie spirituelle des petits et des pauvres. C’est là pour moi un des dangers d’une Église qui a moins de moyens – comment peut-on rester toujours attentives à la vie spirituelle des petits et des pauvres? Je pense particulièrement aux migrants: on pense souvent à leur donner à manger, à les nourrir, à leur donner un toit, mais a-t-on le souci de la vie spirituelle des personnes que l’on accueille? C’est l’expérience que j’ai faite à Calais de manière forte, en étant attentive notamment à la vie spirituelle de la communauté érythréenne, en les aidant à célébrer leurs grandes fêtes de Pâques et de Noël. J’ai beaucoup reçu de cette expérience de la foi partagée.

 Justement, partager sa foi en France, aujourd’hui, est un vrai défi. On observe un recul de la pratique religieuse, l’Église catholique est vraiment minoritaire… Quel regard portez-vous sur cette situation?

Pour moi, c’est une réalité à accueillir, c’est un accueil du réel. En même temps, je regarde cela avec espérance: c’est différent d’avant, mais qu’est-ce qui ressort de bon, comment cela avance? Il y a des choses que je trouve belles, comme le fait que, de plus en plus, la foi chrétienne est un choix personnel, avec un engagement, une réelle expérience de Dieu. Un des points qui, en tant que petite sœur de l’Évangile, me pose plus question, c’est le fait que nous avons un appel particulier à l’évangélisation des petits et des pauvres, et quand l’Église devient moins nombreuse, avec moins de moyens, elle a naturellement tendance – et c’est normal – à regrouper ses forces, et à ne plus avoir cette possibilité d’être plus attentive à ceux qui sont à la marge. C’est vraiment un point auquel il faut faire attention.

Là où vous vivez, qu’est-ce que vous expérimentez de la rencontre avec des personnes d’autres religions?

Pour moi, ce n’est pas simplement une théorie, c’est avant tout éviter de s’enfermer dans son “petit monde” catholique. Avoir des amis d’autres religions, cela change notre regard. Avoir des liens avec des gens d’autres obédiences est quelque chose de fort. À Calais c’est une expérience forte avec différentes personnes, mais sur tous les lieux de travail actuellement, on a des collègues qui sont d’autres religions ou sans religion, cela fait partie du quotidien.

C’est un peu le charisme réactualisé de saint Charles de Foucauld. Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur ce charisme vécu aujourd’hui?

Il y a deux aspects chez Charles de Foucauld: d’abord le partage de la vie des gens, et l’expérience forte que j’ai faite à Calais – un partage de vie pendant deux ans dans une maison d’hospitalité avec les migrants – était une manière très concrète de vivre ce charisme aujourd’hui. Il ne s’agissait pas simplement de distribuer des repas ou de faire des choses, ce qui est important pour eux, mais d’un partage au quotidien, qui crée une autre relation, une autre manière de voir les choses. J’ai aussi prié avec eux pendant longtemps.

Un autre aspect est d’être “frère de tous”. C’est vraiment une transformation, liée l’expérience intense de Dieu qui nous rend frères. En partageant la vie des migrants, en priant avec eux, il y a une expérience qui nous rend frères au-delà de nos différences. C’est cela qui est fort dans notre charisme.

Si l’on revient au thème du message de la Journée Missionnaire Mondiale, «me voici, envoie-moi»: comment cela s’est-il manifesté dans votre vie?

Quand j’ai vu cette phrase, je me suis dit que ça n’avait pas été comme cela pour moi. Je préfère l’invitation de Jérémie, qui dit devant le Seigneur qui l’a appelé: «moi, je ne sais pas parler, je ne suis qu’un enfant, ça n’ira pas, je ne peux pas y aller», plutôt que de dire «me voici, envoie-moi». C’est plutôt mon expérience. Et la réponse du Seigneur est: «tu iras vers tous ceux à qui je t’enverrai, ne crains pas, car je suis avec toi». Ma réponse et mon histoire ont davantage été en commençant par dire «non», plutôt que de dire «me voici, envoie-moi», mais le Seigneur nous envoie et demeure toujours avec nous, c’est aussi mon expérience.

Cet appel est une expérience intime dans un lien très fort dans la prière avec le Seigneur. Et tout au long de la vie, c’est le cœur de la mission, cette relation avec le Seigneur. Pour ma part, concrètement, je cherchais une communauté sobre, pauvre, une communauté religieuse avec une vraie vie communautaire, une vie de prière très forte, et aussi un partage de ma foi avec les petits et les pauvres, et un lieu où je puisse être une femme heureuse et une femme libre.

 Évidemment la mission nous concerne tous, mais que faut-il aujourd’hui pour être missionnaire, comment être missionnaire près de chez soi?

Je pense que l’on est missionnaire quand on fait l’expérience d’un Dieu qui nous aime, et c’est de cela que l’on témoigne, d’être aimé de Dieu. Après, chacun à sa manière, avec le don qu’il a, vivra la mission. Mais sans vie de prière, c’est difficile, même si chacun a une vocation propre concernant la prière. Mais on est missionnaire, on annonce l’Évangile avant tout parce qu’on se laisse profondément transformer par cet amour de Dieu et par l’écoute de l’Esprit Saint. Il n’y a pas d’autre chemin, et je trouve que dans son message, le Pape le souligne de manière particulièrement forte.

À la veille de la Journée Missionnaire Mondiale, célébrée dimanche 18 octobre autour du thème “Me voici: envoie-moi !” (Is 6, 8), une petite sœur de l’Évangile de Charles de Foucauld témoigne de son expérience de la mission, notamment auprès des migrants, dans un esprit de prière et de fraternité.

Vingt ans dans une banlieue HLM de Mulhouse, deux ans dans une maison d’accueil pour migrants à Calais (la Maison Maria Skobtsova), et depuis un an, le 17ème arrondissement de Paris, avec des allers-retours réguliers à Calais où elle poursuit son engagement: pour sœur Joëlle Staquet, de la communauté des Petites sœurs de l’Évangile de Charles de Foucauld, l’horizon de la mission est celui de villes françaises marquée par la diversité des origines, des milieux sociaux et des religions.

La vie de prière et de communauté intense de la religieuse est ponctuée par un travail salarié à mi-temps dans le domaine sociale, ainsi que cette mission d’accueil des personnes migrantes. Chaque sœur de cette congrégation fondée en 1963 par le père René Voillaume, et dont la spiritualité s’inspire de saint Charles de Foucauld, mêle ainsi contemplation et service des plus démunis.

Comme l’explique le Pape François dans son message à l’occasion de la Journée Missionnaire Mondiale de ce 18 octobre, l’appel à la mission se présente comme une «opportunité de partage, de service, d’intercession. La mission, que Dieu confie à chacun, fait passer du “moi” peureux et fermé au “moi” retrouvé et renouvelé par le don de soi»«Dans la mission d’annoncer l’Évangile, écrit-il encore, vous vous mettez en mouvement parce que l’Esprit Saint vous pousse et vous porte». Une vision qui rejoint particulièrement l’expérience de sœur Joëlle.

Avant tout, la mission d’annoncer d’Évangile, c’est le travail de l’Esprit. C’est l’Esprit Saint qui travaille en nous qui nous pousse et nous porte à vivre d’une certaine manière, à nous engager dans la vie religieuse. Et c’est l’ensemble de cette vie donnée avec joie qui est mission et aussi annonce, tout particulièrement dans la vie religieuse. Ce n’est pas faire des choses, ce n’est pas mettre en œuvre des œuvres, c’est avant tout une vie à la suite du Christ et à l’écoute de l’Esprit au quotidien qui annonce quelque chose de l’Évangile.

La pandémie pour moi a fait bouger les lignes. On s’est rendu compte que l’on pouvait changer dans nos vies: au niveau du travail on a pu se réorganiser autrement; nous-mêmes, en fraternité, on a pu vivre les choses autrement. On a donc une capacité de bouger, de changer, de s’adapter, de répondre autrement aux besoins des gens. Pour moi c’est un grand enseignement de la pandémie, et qui continue.

 Pouvez-vous nous partager une expérience marquante que vous avez vécue concernant la mission, cet aspect missionnaire?

Un des aspects de notre vie de petite sœur de l’Évangile, dans la manière de vivre la mission, c’est une attention particulière à la vie spirituelle des petits et des pauvres. C’est là pour moi un des dangers d’une Église qui a moins de moyens – comment peut-on rester toujours attentives à la vie spirituelle des petits et des pauvres? Je pense particulièrement aux migrants: on pense souvent à leur donner à manger, à les nourrir, à leur donner un toit, mais a-t-on le souci de la vie spirituelle des personnes que l’on accueille? C’est l’expérience que j’ai faite à Calais de manière forte, en étant attentive notamment à la vie spirituelle de la communauté érythréenne, en les aidant à célébrer leurs grandes fêtes de Pâques et de Noël. J’ai beaucoup reçu de cette expérience de la foi partagée.

Justement, partager sa foi en France, aujourd’hui, est un vrai défi. On observe un recul de la pratique religieuse, l’Église catholique est vraiment minoritaire… Quel regard portez-vous sur cette situation?

Pour moi, c’est une réalité à accueillir, c’est un accueil du réel. En même temps, je regarde cela avec espérance: c’est différent d’avant, mais qu’est-ce qui ressort de bon, comment cela avance? Il y a des choses que je trouve belles, comme le fait que, de plus en plus, la foi chrétienne est un choix personnel, avec un engagement, une réelle expérience de Dieu. Un des points qui, en tant que petite sœur de l’Évangile, me pose plus question, c’est le fait que nous avons un appel particulier à l’évangélisation des petits et des pauvres, et quand l’Église devient moins nombreuse, avec moins de moyens, elle a naturellement tendance – et c’est normal – à regrouper ses forces, et à ne plus avoir cette possibilité d’être plus attentive à ceux qui sont à la marge. C’est vraiment un point auquel il faut faire attention.

 Là où vous vivez, qu’est-ce que vous expérimentez de la rencontre avec des personnes d’autres religions?

Pour moi, ce n’est pas simplement une théorie, c’est avant tout éviter de s’enfermer dans son “petit monde” catholique. Avoir des amis d’autres religions, cela change notre regard. Avoir des liens avec des gens d’autres obédiences est quelque chose de fort. À Calais c’est une expérience forte avec différentes personnes, mais sur tous les lieux de travail actuellement, on a des collègues qui sont d’autres religions ou sans religion, cela fait partie du quotidien.

 C’est un peu le charisme réactualisé de saint Charles de Foucauld. Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur ce charisme vécu aujourd’hui?

Il y a deux aspects chez Charles de Foucauld: d’abord le partage de la vie des gens, et l’expérience forte que j’ai faite à Calais – un partage de vie pendant deux ans dans une maison d’hospitalité avec les migrants – était une manière très concrète de vivre ce charisme aujourd’hui. Il ne s’agissait pas simplement de distribuer des repas ou de faire des choses, ce qui est important pour eux, mais d’un partage au quotidien, qui crée une autre relation, une autre manière de voir les choses. J’ai aussi prié avec eux pendant longtemps.

Un autre aspect est d’être “frère de tous”. C’est vraiment une transformation, liée l’expérience intense de Dieu qui nous rend frères. En partageant la vie des migrants, en priant avec eux, il y a une expérience qui nous rend frères au-delà de nos différences. C’est cela qui est fort dans notre charisme.

Si l’on revient au thème du message de la Journée Missionnaire Mondiale, «me voici, envoie-moi»: comment cela s’est-il manifesté dans votre vie?

Quand j’ai vu cette phrase, je me suis dit que ça n’avait pas été comme cela pour moi. Je préfère l’invitation de Jérémie, qui dit devant le Seigneur qui l’a appelé: «moi, je ne sais pas parler, je ne suis qu’un enfant, ça n’ira pas, je ne peux pas y aller», plutôt que de dire «me voici, envoie-moi». C’est plutôt mon expérience. Et la réponse du Seigneur est: «tu iras vers tous ceux à qui je t’enverrai, ne crains pas, car je suis avec toi». Ma réponse et mon histoire ont davantage été en commençant par dire «non», plutôt que de dire «me voici, envoie-moi», mais le Seigneur nous envoie et demeure toujours avec nous, c’est aussi mon expérience.

Cet appel est une expérience intime dans un lien très fort dans la prière avec le Seigneur. Et tout au long de la vie, c’est le cœur de la mission, cette relation avec le Seigneur. Pour ma part, concrètement, je cherchais une communauté sobre, pauvre, une communauté religieuse avec une vraie vie communautaire, une vie de prière très forte, et aussi un partage de ma foi avec les petits et les pauvres, et un lieu où je puisse être une femme heureuse et une femme libre.

 Évidemment la mission nous concerne tous, mais que faut-il aujourd’hui pour être missionnaire, comment être missionnaire près de chez soi?

Je pense que l’on est missionnaire quand on fait l’expérience d’un Dieu qui nous aime, et c’est de cela que l’on témoigne, d’être aimé de Dieu. Après, chacun à sa manière, avec le don qu’il a, vivra la mission. Mais sans vie de prière, c’est difficile, même si chacun a une vocation propre concernant la prière. Mais on est missionnaire, on annonce l’Évangile avant tout parce qu’on se laisse profondément transformer par cet amour de Dieu et par l’écoute de l’Esprit Saint. Il n’y a pas d’autre chemin, et je trouve que dans son message, le Pape le souligne de manière particulièrement forte.

Source : Missions

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