Même si l’opportunité, la démarche utilisée et le contenu du projet de constitution suscitent encore à ce stade des polémiques dans un pays où l’on pinaille sur tout et rien, les artisans du ‘’Malikura’’ ne devraient nullement laisser revenir les vieux démons, en encourageant la mobilisation d’électeurs à coups de millions.
Le 10 juin, au cours d’une conférence de presse au CicB, au nom d’une Coalition dénommée ‘’Collectif des acteurs institutionnels pour le oui’’, le ministre d’Etat, ministre de l’Administration territoriale et de la Décentralisation, Colonel Abdoulaye Maïga, a annoncé une série de manifestations à travers le pays. Dont un meeting de clôture au Stade du 26 mars, le 16 juin. Au même moment, Mme Fatoumata Batouly Niane, au nom du ‘’mouvement An biko’’ qu’elle parraine, annonçait à son tour un meeting pour le 15 juin en faveur du ‘’Oui’’. Après concertation, semble-t-il, les deux regroupements ont opté de mutualiser leurs efforts pour un giga meeting de clôture de la campagne référendaire. Les organisateurs, dans une sorte de session de rattrapage, ont atteint, le vendredi 16 juin, leur objectif de faire le plein du 26 mars à plus de 100%. Mais ce baroud d’honneur a-t-il fait oublier le fiasco du premier meeting ?
En effet, le 8 juin – date restée symbolique dans le Mali démocratique jusqu’à l’absurde coup d’Etat de Sanogo- ‘’la Coalition pour le Oui au Référendum’’ a essuyé un cinglant revers par la faiblesse de la mobilisation. Laquelle était si dérisoire que le Stade de 50.000 places était à peine rempli de moitié ! La pilule était si amère que les organisateurs n’ont pu s’empêcher de se brocarder sur les réseaux sociaux. Quand les alliés se disputent, les secrets pleurent. Ainsi, des sommes importantes auront-elles été investies pour mobiliser en faveur du ‘’Oui’’ ? Des cars, sotrama loués pour transporter des gens ? Des jeunes recrutés et motivés à pour aller remplir le Stade ? Des jeunes habillés en tee-shirt de campagne en violation de la loi électorale ? Des services publics impliqués dans la mobilisation et la campagne au mépris des textes en vigueur ?
Avec de tels comportements, il est difficile de se bercer d’illusions : ce n’est pas demain la veille du ‘’Mali Kura’’ prônée dans les discours et le projet de Constitution. Car ce qui se passe de la sorte est loin de l’idéal de changement réclamé à cor et à cri depuis une éternité dans notre pays.
D’où viennent ces sous-là ? Des caisses du Trésor public ? Qui finance donc cette mobilisation ? Des financements occultes ? L’Etranger ? Pourquoi investir autant d’argent dans la mobilisation quand des sondages créditent les autorités de transition d’une large popularité? Pourquoi dépenser un kopeck quand on est censé avoir suffisamment d’arguments pour convaincre les populations à sortir de leur gré ? Pourquoi tant de gymnastique quand on est assuré de tirer sa légitimité du peuple?
Certes, ces viles pratiques n’ont rien de nouveau sous nos cieux. Mais leur perpétuation par les chantres de la Refondation est aussi décevante que condamnable, de surcroît à une période où les vaches sont plus squelettiques que jamais. Le Trésor public peinant à faire face à la dette intérieure, plusieurs acteurs importants de l’économie sont dans le désarroi. Des entreprises privées ont mis la clé sous le paillasson et renvoyé leurs employés au chômage.
Par Chiaka Doumbia