Prévue dans l’Accord pour la paix et la réconciliation, la marche vers les « Forces armées et de Sécurité reconstituées du Mali », est enclenchée et s’apprête à franchir des étapes décisives et complexes.
20 janvier 1961 – 20 janvier 2019 ! Il y a 58 ans, le Président Modibo Kéïta informait le corps diplomatique de sa décision de demander à la France, la puissance colonisatrice, d’évacuer ses bases militaires du territoire de la jeune République du Mali. C’est cette date qui a été retenue par les autorités maliennes pour la fête de l’Armée. Le 20 janvier 1961 n’est pas la date de création de l’Armée malienne, laquelle remonte en réalité au 1er octobre 1960, soit quelques jours seulement après la proclamation de l’Indépendance de l’ex-Soudan français suite à l’éclatement de la Fédération du Mali. Le discours historique du capitaine Sékou Traoré, 1er Chef d’Etat-Major Général de l’Armée malienne en date du 1er octobre, en administre la preuve.
Aujourd’hui, l’armée malienne monte en puissance après l’humiliation de 2012 qui est la conséquence logique de plusieurs décennies de destruction de l’outil de défense au plus haut niveau de l’Etat avec la complicité des chefs militaires. Des efforts ont été faits dans le cadre du renforcement des capacités opérationnelles des Fama et de l’amélioration des conditions de vie des militaires en droite ligne de la mise en œuvre de la Loi d’orientation et de programmation militaire. Ce qui est à l’actif du Président Ibrahim Boubacar Kéïta et de ses équipes respectives. Restent que ces efforts apparaissent comme des gouttes d’eau dans l’Océan des besoins.
La montée en puissance des Forces de défense et de sécurité dans un environnement hostile annoncée en grande pompe par les plus hautes autorités du Mali pourrait se heurter aux obstacles politiques liés à la mise en œuvre de certaines dispositions de l’Accord pour la paix et la réconciliation. L’épineuse question de l’intégration ou la réintégration des combattants des groupes armés signataires de l’Accord issu du processus d’Alger est sur la table. La marche vers les « Forces armées et de Sécurité reconstituées du Mali », prévue dans l’Accord est enclenchée et s’apprête à franchir des étapes décisives et complexes.
C’est le moment d’être vigilant plus que jamais ! Et de tirer les leçons du passé afin de ne pas commettre les mêmes erreurs ! On ne le dit pas assez, l’une des causes de la débâcle de l’armée après le déclenchement de la rébellion des apatrides du MNLA et leurs alliés est la désertion de certains militaires, lesquels se sont retournés contre leurs frères en rejoignant les rebelles avec armes et munitions en pleine bataille. Pendant l’occupation des 2/3 du territoire par des forces du mal, le général Yamoussa Camara, alors ministre de la Défense et des Anciens combattants, mettait régulièrement l’accent sur cet aspect. Autant des éléments intégrés ont trahi le drapeau national pour rejoindre l’autre camp, autant d’autres se sont illustrés par leur bravoure et leur patriotisme dans la défense de la patrie.
Les décideurs politiques doivent éviter le piège tendu par les responsables de la Coordination des Mouvements de l’Azawad (CMA) qui veulent obtenir le maintien au nord de leurs éléments intégrés sous le prétexte fallacieux qu’ils maîtrisent mieux le terrain. Vous avez beau avoir des avions de combat, des équipements militaires nécessaires, si ceux qui sont chargés de les utiliser trahissent la patrie et se retournent contre leurs compagnons d’armes comme ce fut le cas en 2012, il n’y a rien à faire, car vous allez perdre cette guerre. Inspirons-nous de nos propres erreurs !
Trouvons les moyens pour affranchir le Mali de cette tutelle militaire et diplomatique qui maintient un embargo inutile nous privant de certains équipements de défense. Travaillons à faire en sorte que les troupes françaises qui ont triomphalement repris leurs quartiers généraux à Gao, Kidal, Tombouctou et Tessalit en 2013 à la faveur de l’opération Serval transformée en Barkhane, arrêtent de faire de notre pays un champ d’opération. C’est comme ça que le 20 janvier retrouvera tout son sens !
Chiaka Doumbia
Source: lechallenger