Le week-end dernier, un affrontement inter-ethnique à Ké-Macina opposant Peuhls et Bambaras a fait une dizaine de morts et de nombreux blessés. L’extrême gravité de la situation a contraint le Président de la République, Ibrahim Boubacar Kéïta et son Premier ministre, Modibo Kéïta à dépêcher une délégation gouvernementale composée des ministres de la Solidarité et de l’action humanitaire, Hammadoun Konaté, de la Justice et des droits de l’homme, Mamadou Ismaël Konaté, de la Réconciliation, Mohamed El Moctar, et de l’Administration territoriale, de la décentralisation et de la réforme, Mohamed Ag Erglaf. La délégation gouvernementale était venue présenter les condoléances de la nation et réaffirmer la volonté des plus hautes autorités de faire prévaloir la cohésion nationale. Par la même occasion, elle voulait délivrer un message de fermeté pour la recherche des auteurs de ces actes ignobles afin de les traduire devant les juridictions compétentes.
Des affrontements de ce genre deviennent de plus en plus fréquents dans certaines parties du pays. En 2016, à Kareri et Dioura dans le cercle de Ténenkou, Peuhls et Bambaras se sont affrontés de façon violente avec un bilan officiel de 24 morts et 5 blessés. Aux traditionnels affrontements entre éleveurs et agriculteurs pour le contrôle des couloirs de transhumance sont venues se greffer des considérations terroristes et djihadistes. La communauté peuhle est considérée à tort ou à travers comme adepte du front pour la Libération du Macina du prédicateur Amadou Kouffa. Ce qui donne lieu à des persécutions contre les Peuhls souvent alimentées malheureusement par certains services de l’Etat. Ce sentiment de persécution avait donné naissance à un mouvement politico-militaire dénommé “Alliance nationale pour la sauvegarde de l’identité peuhle et la restauration de la justice”.
L’équilibre communautaire sérieusement ébranlée par les actions néfastes des envahisseurs de 2012 comme les responsables du MNLA et leurs alliés narcotrafiquants, est sur le point de céder sous le poids des divergences entre les communautés locales. Au nord, c’est presque le repli communautaire, voire tribale.
Ces affrontements ou tensions intercommunautaires se nourrissent du sentiment d’abandon de l’Etat, de l’injustice et surtout du traitement discriminatoire au profit d’une catégorique de citoyens. Les affrontements dont la communauté peuhle paie le lourd tribut pourraient constituer, sans doute, des brèches dans lesquelles les adeptes d’Amadou Kouffa s’engouffreront. Ils se serviront de ce qui se passe actuellement pour sonner la mobilisation des Peulhs. Ce qui ne va pas arranger la situation déjà tendue et confuse dans cette partie du territoire où les assassinats ciblés deviennent des pratiques quasi-quotidiennes.
Il faut éviter de faire l’amalgame. Tous les peuhls ne sont pas des partisans du prédicateur Amadou Kouffa. Tous les peuhls ne sont pas des terroristes. Dans cette tentative d’explication et de clarification, les services de l’Etat peuvent jouer un rôle essentiel en faisant prévaloir la justice et l’égalité pour tous.
Par Chiaka Doumbia