Bouyé, haute figure morale et Guide de la grande communauté hamaliste, est au bout de la patience dont il a toujours usé pour supporter IBK. Il l’a fait savoir de façon on ne peut plus claire le Vendredi saint, 22 mai 2020.
Le fils de Chérif Hamaoula, grand résistant religieux contre l’ordre colonial français, en est arrivé à cette décision après avoir acquis la certitude que l’homme Ibrahim Boubacar Keïta, actuel président du Mali, n’est ni une personne d’honneur, ni un dirigeant apte et consciencieux. Bien au contraire, ce dernier lui est apparu au fil du temps comme un traître, un inconséquent dépourvu d’humilité et de sens patriotique, ce qui fait plutôt de lui un citoyen nuisible doublé d’un fauteur de désordres.
Le Chérif de Nioro fait un état des lieux de ses relations tumultueuses avec IBK : « Aujourd’hui, je m’en vais vous parler d’un sujet qui peut ne pas plaire à beaucoup, mais les plus honnêtes d’entre vous ne m’en voudraient jamais pour ces propos. » C’est ainsi qu’il débute ce qu’il faut considérer comme son réquisitoire contre IBK : « …Ce que tu ne sais pas et que tu ne sauras jamais, c’est que moi je suis un homme de Dieu.
Ce que tu obtins de moi comme bien, tu ne l’auras avec nul autre ; tu le sais bien…Dieu seul détient tous les pouvoirs, mais Il en a confié certains aux hommes ici-bas.
À ton retour de Nioro, après la visite que tu m’aies rendue bien avant ton élection, sais-tu bien ce qui a failli arriver à ton vol. Ce jour, quand tu pris la route de l’aéroport, avant même que tu n’y arrivas, je te fis retourner pour te remettre ce que tu sais. Ton garde du corps et mon interprète en ont été témoins. À votre départ, tous les membres de ta délégation furent témoins de ce qui se passa avec votre avion. Et c’est toi-même qui les rassuras au motif que Bouyé t’a remis quelque chose qui vous sauvera tous. »
…Quand tu voulus succéder à Alpha, je suis celui qui ai été franc avec toi en te disant que tu ne serais pas son successeur. Vrai ou faux, tu le sais…Après que tu sois viré de l’ADEMA, tu m’envoyas ton garde du corps demander mon avis pour ton exil au Niger où j’ai contribué à ton installation. Je t’ai soutenu jusqu’à ton retour au pays et, pour ce retour, tu requis également mon avis.
…Une fois au Mali, Amadou Toumani Touré voulut t’anéantir politiquement. Là, encore, j’ai été d’un appoint auprès du Président ATT aux fins qu’il t’accorde des faveurs. Vrai ou faux, tu le sais. ATT en a été également témoin… » Le Guide religieux continue de dérouler les pages de l’histoire qui laissent voir un IBK ingrat : « …En 2013, quand tu vins chez moi pour ta campagne présidentielle, tu m’avouas ouvertement que tu n’avais pas d’argent et que tu comptais aller voir un de tes amis à l’extérieur pour un prêt. Après ton retour de chez ce dernier, tu m’appelas pour m’affirmer que tu n’as pas été satisfait à hauteur de souhait. Ainsi, je te donnai de l’argent pour ta campagne. » Une ingratitude qui prit vite les allures d’un parricide : « …Une fois élu, j’ai été la première victime de ton régime à travers un de mes fils qui subit des coups et blessures volontaires des forces de l’ordre. Ton fils Karim, que j’ai soutenu, également, planifia une attaque contre une partie de ma famille à Guiré, dans la zone de Nara, en complicité avec Mohamed Bagayoko, le fils de Tiecoro…Tous ceux-là qui t’aidèrent à travers ma modeste personne ont tous fini par être victimes de ton régime. »
Le vieux Chérif continue : « …En plus de Karim, tu as un autre catalyseur qui veut enflammer ce pays, je parle de Manassa, qui voulut te tricher en 2013 et à qui j’ai envoyé, dès le premier tour, des émissaires pour la mettre en garde contre tout tripatouillage des résultats. Es-tu au courant de cela, IBK ? …Après le deuxième tour de l’élection présidentielle, Manassa, elle-même, vint me voir à Nioro pour se confier et demander mon soutien en vue de son maintien à la tête de la Cour Constitutionnelle.
Je ne fais jamais de bénédictions à quelqu’un pour son argent. Cependant, après qu’elle ait été réélue au poste de Président de l’Institution, elle revint me verser un intéressement que j’ai accepté à titre de «HEDAYE » (quote-part légale due aux descendants du noble Prophète, les Chérifs).
Et le Bouyé est dépité : « …Je comprends que tous ceux qui sont avec toi me manquent du respect, à commencer par ton fils, ensuite ton parti et tes collaborateurs. Par ta faute, ton parti affirma que je ne fis rien pour ton élection et que c’est par leurs seuls efforts que tu fus élu. » En conséquence : « Désormais, retiens qu’il n’y a plus de confidence entre nous. Fini le temps des discrétions et place (à la divulgation des) aux pots aux roses. Et je défendrai mon honneur et ma dignité. Que toi et compagnies en soient d’accord ou pas, c’est grâce à moi que tu occupes cette place aujourd’hui. Et d’ailleurs, toi-même, tu en es conscient. Je te combats et te combattrai jusqu’à nouvel ordre, et cela, au risque et au péril de tout ce qui peut m’arriver. Tu n’as eu d’autres récompenses que de permettre aux tiens d’user de l’arrogance à mon égard. C’est avec les agissements de cette petite dame, cette destructrice de Manassa que tu me récompenses? »
On voit que les amarres sont complètement coupées entre le religieux et l’hommage politique haut perché. C’est désormais l’heure du Talion, de la revanche, un duel à mort : « Tu me trouveras dressé devant toi, sur ton chemin. Je suis prêt à t’affronter, à défendre mon honneur et ma dignité. Sache que tu me trouveras dressé contre toi. Je n’ai que faire de tes biens pour en avoir assez, moi. Je suis prêt à t’affronter en bien ou en mal ; tu me trouveras sur ton chemin et cela au risque de ce qui peut m’arriver et (aussi de ta vie) de la tienne »
Un document historique qui éclairera sans doute les générations futures.
Ahmad Ould Bilé
LE COMBAT