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Entrave au processus de paix: vers des sanctions ciblées?

Le conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine (UA) est désormais dans la logique de l’ONU qui, dans une résolution datant du 29 juin 2015, se dit prête à entrevoir des sanctions ciblées à l’encontre de ceux qui entravent ou menacent la mise en œuvre de l’accord de paix, devenu inclusif avec la signature de toutes les parties maliennes. Si l’UA soutient les sanctions ciblées, déjà préconisées par l’ONU, c’est qu’en principe tous les obstacles sont levés pour empêcher aux ennemis de la paix de nuire à la paix, dans notre pays. Pourvu que ça se matérialise…

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Sanctions ciblées ? Le conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine vient de faire une déclaration dans ce sens, tout en réaffirmant son attachement à l’unité, l’intégrité territoriale et à la souveraineté ainsi qu’au caractère laïc et à la forme républicaine de l’État Malien. Il est donc conforme à la résolution de l’ONU du 29 juin dernier qui se dit «prêt à envisager des sanctions ciblées contre ceux qui entreprennent des actions pour entraver ou menacer la mise en œuvre de l’Accord, ceux qui reprennent les hostilités et violent le cessez-le-feu, ainsi que ceux qui attaquent ou menacent, par leurs actions, la Minusma». Le Conseil de paix et de sécurité en est parvenu à cette exigence, en tenant compte des attaques terroristes au Mali, tout en réitérant sa grave préoccupation face à la situation sécuritaire qui prévaut sur le terrain, notamment la recrudescence des attaques terroristes contre les populations civiles, l’armée et les forces internationales présentes sur place, en particulier la Minusma.

D’ailleurs, l’exigence de sanction de l’UA, telle qu’elle a été formulée par le conseil de paix et de sécurité, devient une forte interpellation, à partir du moment où moins d’une semaine de la prorogation du mandat de la Minusma, celle-ci faisait l’objet d’une attaque terroriste, causant la mort de six Casques bleus et autant de blessés.

Cette tragédie, condamnée par tous les acteurs du processus de paix au Mali, y compris l’UA, perpétrée sur une patrouille de la Minusma, sur l’axe Goudan-Tombouctou, en début de ce mois, est intervenue dans un contexte de réajustement du mandat de la mission onusienne, en ce sens qu’elle a été amputée de la mission de traquer les terroristes. Ces derniers ont profité de cette modification de son mandat pour porter à la Minusma ce coup dur, mettant brutalement sur le tapis l’épineuse question de l’adéquation du mandat de la Minusma face à la réalité récurrente du terrain qui s’est progressivement dégradée, au Mali, avec la multiplication des attaques terroristes dans de nombreuses localités du pays.

Jusqu’à un passé encore récent, les attaques terroristes, aussi nombreuses qu’elles le sont, étaient toujours localisées dans les régions nord du pays, où les populations civiles, les positions de l’armée et même les forces internationales en présence, notamment la Minusma, en étaient les cibles régulières. Mais, voilà que la donne a changé : ces derniers temps, les terroristes frappent un peu partout dans le pays, voire le centre ou le sud ; délocalisant du coup leur champ d’attaques qui n’est plus entièrement limité qu’aux seules localités des régions nord du pays. De Misseni, à Fakola, à la frontière ivoirienne, en passant par Nara, à la frontière mauritanienne, les attaques terroristes ont bien recouvré tout le pays. Il est donc clair que ce réajustement du mandat de la Minusma est intervenu sans compter sur une telle élasticité dangereuse du champ d’attaques des terroristes qui constituent aujourd’hui les menaces les plus actuelles et les plus réelles contre le processus de paix au Mali.

Le mandat de la Minusma a changé, mais son rôle de bons offices, dans sa nouvelle configuration, qui est de surveiller le cessez-le-feu entre les parties, et dénoncer les éventuelles violations du principe du conseil de sécurité de l’ONU qui, pour la première fois, se montre intraitable vis-à-vis des ennemis de la paix. Rôle de gendarme de la Minusma entièrement couvert par cette nouvelle résolution du conseil de sécurité de l’ONU, à partir de la laquelle elle peut désormais envisager des sanctions ciblées contre ceux qui s’emploient à empêcher ou compromettre la mise œuvre de l’Accord, ceux qui reprennent les hostilités et violent le cessez-le-feu, ainsi que contre ceux qui lancent des attaques contre la MINUSMA ou menacent de le faire. Avec son nouveau mandat, la Minusma est impliquée à tous les niveaux dans l’application de l’accord de paix au Mali.

On le voit, la position de l’UA, qui vient renforcer l’option des sanctions ciblées, sonne donc bien dans l’esprit des Maliens qui estiment, dans leur grande majorité, que c’est justement sur cette question, pourtant coutumière dans la pratique de l’ONU, que le bât blesse au Mali. En fait, depuis de longues périodes, de troubles en troubles, sur le terrain, les uns aussi violents et meurtriers que les autres, le processus de paix a failli connaître des remises en cause dangereuses. Tout cela, sans que l’instance onusienne ne lève le petit doigt, ne serait-ce que pour crédibiliser son intervention, à travers la Minusma, dont l’image de respectabilité a failli prendre un coup sérieux, vis-à-vis d’une opinion publique qui avait du mal à se convaincre de son impartialité.

Au-delà de l’équation des terroristes, il y a des menaces à l’interne : durant tout le long du processus de paix, au Mali, avant la signature de l’accord de paix, et même après, des groupuscules s’agitent, à l’intérieur de la coordination des groupes armés, pour exprimer leur opposition véhémente à la signature de ce document de paix. Une fois qu’il est signé par toutes les parties, et pour rendre irréversible son caractère inclusif, le conseil de sécurité de l’ONU, à travers la Minusma, doit impérativement être vigilante, de ce côté, pour empêcher les saboteurs de la paix à le torpiller. En fait, la plus grande menace contre le processus de paix nous vient de la branche, dite Mnla d’Europe, membre de la coordination des groupes armée, dirigée par Moussa Ag Assarid, qui se positionne déjà à empêcher, par tous les moyens, l’application de cet accord de paix dans la zone qu’elle estime être sa sphère de compétence.

Basés dans les capitales occidentales (ces hommes ont la double nationalité), les membres de la branche Mnla d’Europe ne cachent pas leur volonté de faire capoter le processus et multiplient les manœuvres à l’encontre de l’Algérie, chef de file de la médiation, accusée d’avoir imposé le processus de paix, dont le rôle est pourtant salué par tous les acteurs, comme ayant été crucial pour la cause de la paix. Les nombreuses et vicieuses manœuvres qu’ils entreprennent, en Europe, par des déclarations et autres sorties médiatiques, pompeuses et incendiaires et des intimidations de toutes sortes à l’encontre des populations civiles et même à l’endroit des responsables de la coordination des groupes armés, qui ont exprimé leur pleine adhésion au processus de paix, ne sont que des actions, visant à entraver la mise en œuvre de l’accord de paix, tombant sous le coup de cette nouvelle résolution de l’ONU, prévoyant des sanctions ciblées.

La menace de sanction de l’ONU, à l’encontre des saboteurs de la cause de la paix au Mali, entérinée, dans des termes plus fermes, par le conseil de paix et de sécurité de l’UA, a le mérite d’être claire et nette. Il reste maintenant à ce qu’elle ne soit pas lettre morte.

Par Sékouba Samaké

Source: Info-Matin

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