7 juin 2018, tout Bamako retenait son souffle à la veille d’une marche prévue le lendemain. Chefs coutumiers, griots et leaders religieux étaient montés au créneau, cherchant à savoir si le gouvernement allait réprimer la marche comme ce fut le cas une semaine plus tôt. Il aura fallu l’intervention de la mission onusienne au Mali, appuyée par l’Union Africaine, pour que le pouvoir s’ouvre à des discussions au sujet des inquiétudes formulées par les opposants à propos des élections à venir.
Dans la matinée, une rencontre tripartite entre la majorité, l’opposition et les représentants de la communauté internationale eut lieu. A la fin de l’entrevue, Soumaila Cisé, le chef de file de l’opposition, rejoint ses camarades au siège du Parena, le parti de Tiébilé Dramé, où une réunion préparatoire de la marche se tenait.
A la surprise, il annonça aux militants l’engagement pri par Soumeylou Boubèye Maïga, le Premier ministre, devant les représentants de la communauté internationale : la marche n’est pas interdite par le gouvernement malien. Celui-ci avait reçu une salve de critiques (à l’international comme à l’intérieur du pays) pour avoir réprimé la précédente marche pacifique.
Mieux, Soumeylou a pris l’engagement de parler désormais avec l’opposition pour aplanir d’éventuelles difficultés liées aux élections. Cela fut une surprise pour les opposants qui se plaignaient de n’avoir reçu aucune réponse à leur requête réitérée aux hautes autorités. Pire, Soumaila Cissé n’avait reçu aucune réponse ni du Premier ministre du chef de l’Etat, Ibrahim Boubacar Keïta.
L’attitude du président et de son Premier ministre est assimilée à un refus du dialogue politique, à quelques mois de l’élection présidentielle de juillet prochain. Hors, il y a d’énormes difficultés liées à ce scrutin capital. Des difficultés qui pourraient remettre en cause la transparence et la crédibilité des résultats.
La crise de confiance née de l’attitude du pouvoir face aux opposants a fini par étaler les faiblesses de la démocratie malienne à la face du monde. Après la répression de la marche du 8 juin, les condamnations du gouvernement malien n’ont d’égales que celles formulées contre la junte de 2012.
Et cette situation pouvait être évitée si le président de la République et son Premier ministre avaient répondu aux sollicitations des opposants bien avant l’annonce des marches.
Il reste à savoir si l’engagement pris par le Premier ministre d’entamer un dialogue politique avec les opposants sera suivi d’effets. C’est un dialogue aux forceps, obtenu grâce à la détermination des partis et associations qui ont bravé les gaz lacrymogènes. C’est aussi le résultat de critiques sans complaisance formulées par des partenaires du Mali.
Profitant du climat de dialogue créé par l’opposition à coup de marche et de protestation, les candidats de la Convention des Bâtisseurs, ont rencontré le Premier ministre le 13 juin. Me Mountaga Tall, Clément Mahamadou Dembélé, Hamadoun Touré, Modibo Sidibé, si situant au centre entre la majorité et l’opposition, ont demandé à être impliqués à toutes les étapes du processus électoral. Ils ont en outre sollicité la présence de leurs représentants dans les bureaux de vote, au même titre que les deux autres entités dont les assesseurs seront pris en charge par l’Etat.
Toutefois, à seulement un mois et demi du premier tour de la présidentielle, il y a beaucoup de sujets qui fâchent. Comment va –t-on voter dans les localités où il n’y a ni préfet ni enseignants encore moins d’école pour abriter les bureaux de vote? Le dépouillement sera-t-il public?
Soumaila T. Diarra
Source: Le Républicain