Ce samedi 05 décembre, à l’issue de sa session inaugurale au Centre international de conférence de Bamako (CICB), le Colonel Malick Diaw accède à la présidence du Conseil National de la Transition (CNT). Les Colonels Bah n’Daw et Assimi Goïta sont déjà respectivement président et vice-président de la Transition. Le Gouvernement est carrément dominé par des militaires et proches. Ce choix de Colonel Malick Diaw, jusque-là numéro deux de la junte, pour occuper ce poste si hautement stratégique de la Transition malienne, n’est cependant pas une surprise d’autant qu’il était longtemps pressenti pour occuper ce poste si hautement stratégique de la Transition malienne.
L’administration préfectorale, avec la nomination récente d’une quantité de Colonels proches du CNSP comme Gouverneurs (13 sur 20 que compte le pays), Préfets et sous-Préfets, s’est fortement militarisée. Ces faits sans précédent dans notre pays, depuis l’avènement de la démocratie au Mali, confirment la militarisation de la Transition. Cette obsession des colonels putschistes du 18 août du « tout militaire », pour diriger la Transition malienne, était pourtant redoutée par de nombreux observateurs politiques maliens. Mais ce « Tout militaire » est-il vraiment la panacée pour la réussite de la Transition en cours ?
Le M5-RFP, dont le crédo est la refondation du Mali et le bannissement de la mauvaise Gouvernance, est contre une Gouvernance dominée par les militaires. Mais il est favorable à une gestion concertée des organes de la Transition avec les hommes en treillis. Il n’a de cesse fustigé « la désignation d’individus ayant, pourtant dans un passé récent, ouvertement et farouchement combattu le processus de changement en cours, et reste résolument déterminé à empêcher toutes velléités de restauration de l’ancien régime ».
Déterminé jusqu’au bout pour que justice soit rendue aux martyrs, le M5-RFP se dit engagé pour la réussite de la transition afin de préserver la vision et les impératifs de changement de système qui est l’objectif principal du mouvement national patriotique enclenché le 5 juin 2020. Apparemment leur position est différente de celle des jeunes colonels du CNSP. Lesquels ont un agenda propre à eux.
La Coordination des mouvements de l’Azawad (CMA) n’approuve pas aussi la démarche exclusive des militaires. Les « ex- rebelles de la CMA », sont au désespoir de constater que leurs « louables efforts pour construire la confiance et la paix se heurtent déjà aux jeux habituels de manœuvres dilatoires et de volte-face de la part des autorités en charge de la transition ». Fort de constat, la CMA a décidé de « surseoir purement et simplement à sa participation au processus de mise en place du CNT et ce jusqu’au rétablissement de la confiance et du compromis ». Il y a bien d’autres formations politiques et syndicales qui sont dans cette dynamique de boycott du CNT.
Lorsqu’un régime constitutionnel chute à l’issue d’un coup d’Etat ou d’une insurrection populaire, ce sont en général, les acteurs principaux qui ont concouru pour ce renversement qui s’organisent pour diriger le pays de façon consensuelle la Transition politique. Dans le cas du Mali, c’est le M5-RFP qui devrait être l’allié objectif des militaires du CNSP. Ces deux forces auraient dû être les principaux acteurs pour l’organisation des organes de la Transition afin de pouvoir impulser le changement politique voulu par les masses populaires. Ce sont normalement ces forces qui devraient, pour la réussite de la Transition, en occuper les principaux postes politiques. Ce qui n’est malheureusement pas le cas, le CNSP ayant fait cavalier seul pour s’accaparer de tout.
Ce comportement politique est dangereux voire suicidaire, tant cette « Transition militaire » aura incontestablement à faire face, non seulement au front social qui est déjà en ébullition avec des grèves illimitées décrétées par les Centrales syndicales. Mais aussi et surtout, à la détermination des forces politiques abandonnées au quai. Notamment la tendance politique du M5-RFP. Comment la « Transition militaire » en cours pourra surmonter tous ces nombreux remparts qu’elle aura elle-même contribué à dresser sur son chemin ?
Gaoussou Madani Traoré
Source: Le Pélican