Le foot. Voilà ce qui anime tous les esprits sur le plan local. D’ailleurs cela fut toujours le cas. Au Mali, la particularité dans le domaine du ballon rond en est que tout le monde est connaisseur. Du plus jeune au plus vieux, chacun a ses propres commentaires, ses analyses techniques et ses appréhensions pour refaire un match de foot de 90 minutes. Cette 32ème CAN egyptienne tombe à pic. Elle est le principal centre d’intérêt. Cela pour deux raisons fondamentales et la troisième relève d’un concours de circonstance.
Primo, la coupe d’Afrique qu’elle se joue chez nous ou ailleurs est un évènement majeur, bien souvent surdimensionné en raison de l’émotion qu’elle suscite. A l’heure des matchs, les rues se vident, de nouveaux téléspectateurs prennent commandent dans les foyers respectifs.
Secundo, cette compétition devient une préoccupation nationale, dès lors que notre pays y participe. Ce n’est pas pour rien que le terme « Yaoundé 72 » est pris pour repère afin de situer le vrai contexte de certains évènements dans le temps. Dans les discussions chaudes, dès lors qu’un interlocuteur affirme avoir vécu ‘’Yaoundé 72’’ son prochain se tait et l’auditoire est séduit et convaincu de tout ce qu’il sortira de sa bouche. Cela se comprend aisément, car ‘’Yaoundé72’’ est la coupe d’Afrique ayant consacré la première participation de notre pays à la CAN, mais aussi celle qui nous a permis d’écrire la page la plus glorieuse de notre histoire footbalistique (disputer la finale). Même si, force est de le reconnaître, elle n’a pas été la plus festive, à l’instar de ‘’Tunis 94’’ (marquant le retour du Mali dans le ghota continental 22 ans après) ou de ‘’Bamako 2002’’ (une première pour notre pays d’avoir réussi l’organisation d’une CAN).
La troisième raison, qui fait monter l’adrénaline chez les Maliens footeux, se manifeste lorsque notre formation nationale dès sa première sortie montre un visage rassurant, produit un jeu séduisant et arrache une victoire. Comme par enchantement, dans l’esprit de tous, taraude un seul raisonnement : « nous pouvons remporter cette coupe ». Sic ! Dès que cette idée commence à nourrir dans la conscience populaire rien d’autre ne peut passer et rien d’autre ne doit se produire si ce n’est la victoire. C’est à partir de là que la pression monte. Tout le monde dévient à la fois des supporteurs, spécialistes de foot et techniciens-tacticiens combinés. D’aucuns indexent le choix de l’entraineur, d’autres décortiquent le niveau technique de chaque joueur, surtout ceux qui auront la malchance d’être en méforme. De croustillantes révélations se propagent et de méchantes polémiques enveniment le parcours de l’équipe. L’effet CAN produit une atmosphère fiévreuse. Le sélectionneur et chacun de ses poulains deviennent des fusibles. Si par ironie du sort, l’équipe se voit éliminer tôt, comme une rengaine, une seule phrase sort des bouches : « je savais que cette équipe ne pouvait pas aller loin »…
Espérons que cette tradition soit bannie cette fois-ci, au moment où tous les ingrédients sont réunis pour servir une bonne sauce à notre peuple ‘’footeux’’. Un entraineur local (en quête de renommée), des jeunes joueurs virevoltants, un chef de département mordu du foot et une équipe nationale sans star (à l’exception près de Marega). Cette belle chaîne lancée à l’assaut des Pyramides, après avoir bien franchi la première étape (victoire contre la Mauritanie) a failli craqueler à cause des commentaires acerbes sur les réseaux sociaux. Tout cela à cause de deux choses : le nul face à la Tunisie et l’expulsion du groupe du jeune Adama Niane. Ce qui est regrettable est le fait que les auteurs de ces critiques désobligeants n’aient pas pris en compte la qualité de l’équipe tunisienne et l’importance de la discipline dans une équipe qui veut aller loin. D’ailleurs, l’équipe malienne garde la tête de la poule et le joueur expulsé, sa tête sur les épaules, pour avoir présenté des excuses publiques.
Le seul maillon qui pourra consolider ou rompre la chaîne est le public. Maintenant tout le monde sait dans quel camp la balle se trouve.
La Rédaction
Source: Le Sursaut