Quoi de plus normal qu’une déclaration des défenseurs des droits de l’homme pour dénoncer et condamner des violations, puisse fâcher les présumés auteurs des exactions citées ? Le contraire aurait surpris. La récente sortie de la coalition Gatia-MSA contre le directeur de la Division des droits de l’homme de la Minusma et représentant du Haut commissariat aux droits de l’homme des Nations-Unies en est une cinglante illustration. L’adoption prochaine du projet de loi pour la protection des défenseurs des droits de l’homme au Mali est d’une extrême urgence au Mali. Si les représentants onusiens ne sont pas exempts de menaces, qu’en est-il des acteurs nationaux de défense des droits de l’homme ?
Selon notre confrère Le Combat, relayé le 16 avril par le site d’actualité Maliweb, la Coalition Gatia-MSA serait montée au créneau pour dénoncer des allégations « scandaleuses et fausses ». Ainsi, poursuit le journal, « Enfonçant le clou, le tandem qui contrôle la Région frontalière entre le Mali et le Niger, a dit ne plus être disposé à recevoir le Responsable onusien après ses propos traités de honteux. Le tort du responsable onusien, Guillaume Ngefa qui est sur le terrain du bourbier malien depuis 2012, a été de déclarer le jeudi 12 avril, lors d’un point de presse, que «Les allégations de violations du droit international humanitaire dans la région de Ménaka sont d’une particulière gravité. Elles font état d’exécutions sommaires d’au moins 95 personnes qui seraient accusées de terrorisme ou de banditisme. Nous surveillons de près la situation des opérations antiterroristes par la coalition MSA-Gatia.» Le défenseur des droits de l’homme confiait s’être entretenu avec des «victimes du terrorisme et des opérations antiterroristes dans huit localités», rappelant que «depuis le 8 février, dans la Région de Ménaka, il y a des opérations antiterroristes qui sont conduites par la coalition MSA-GATIA». Guillaume Ngefa a également exprimé les préoccupations de la Minusma par rapport au nombre de plus en plus élevé d’incidents violents et d’attaques armées survenus ces derniers jours, principalement dans les régions du centre du Mali, Ségou et Mopti. A ses dires, ces attaques ont conduit à des violations et abus graves des droits de l’homme à l’encontre de civils dont des cas d’exécutions sommaires. Et la réaction de ces groupes armés ne s’est pas fait attendre à travers un communiqué, rapporte Le Combat : «La coalition MSA-GATIA, très présente sur le terrain, n’a jamais eu connaissance d’une mission de Guillaume Ngefa dans ces localités. Alors, où a-t-il pu réaliser le décompte des 95 personnes dont il rapporte l’exécution sommaire ? ». Niant et rejetant les allégations du représentant de l’ONU, la coalition menace de ne plus être disposée à recevoir la mission onusienne des droits de l’homme et de la protection. Qu’est ce qui fait tant courroucer les membres de la coalition MSA-GATIA qui patrouillent dans la région de Ménaka et qui réputés proches de Bamako ? Selon les membres de la communauté peule, très présente dans la région, Moussa et Gamou se servent de leur proximité avec Barkhane pour régler de vieux comptes. Des contentieux opposent depuis des décennies les Peuls et les Daoussak, qui vivent de l’élevage, autour de la question du partage des pâturages et des points d’eau, écrit liberation.fr le 17 avril 2018. «Au nom de la lutte antiterroriste, le MSA et le Gatia traquent les Peuls, même les civils, les violentent, les pillent, les attachent, les tuent. Ils tirent sur des réservoirs d’eau. Tous les matins, je reçois des alertes, affirme Mohamed Attaïb Sidibe. On pousse les Peuls à rejoindre les terroristes !», écrit le site liberation.fr En début de ce mois d’avril, une association de défense des droits de l’homme au Sahel, avait tiré la sonnette d’alarme en rapportant des «exactions dont seraient coupables le MSA et le GATIA» et qui viseraient des hommes des différentes communautés peuhles rivales de ce duo aux dents longues, indique Le Combat. L’adoption prochaine du projet de loi pour la protection des défenseurs des droits de l’homme au Mali est d’une extrême urgence. Si les représentants onusiens ne sont pas exempts de menaces, qu’en est-il des défenseurs nationaux des droits de l’homme ?
- Daou
Source: Le Républicain