Le premier ministre malien, Dr Choguel Kokalla Maïga, a participé hier, jeudi 7 octobre 2021, à la 3ème édition de la journée mondiale du coton tenue à Genève, en Suisse. C’était l’occasion pour lui de rappeler l’importance du coton sur l’économie malien et louer les qualités des paysans maliens.
Dans son intervention, le premier ministre malien a plaidé pour la cause des cotonculteurs maliens ainsi celle de ceux du Burkina Faso, du Benin, du Tchad. « Que demandait, en effet, le paysan de Sikasso au Mali, de Bobo Dioulasso au Burkina Faso, de Banikoara au Benin ou de Sahr au Tchad ? », se pose-t-il la question avant de répondre : « Ils ne demandaient pas l’aumône. Ils ne demandaient pas la pitié ni la commisération des plus grands. Ils demandaient la justice, celle qui est incompatible avec les soutiens internes à la base des distorsions sur le marché international ». Selon Dr Choguel Kokalla Maïga, faute d’avoir écouté la complainte de nos paysans, « nos pays ont vu leur résilience affectée, les zones cotonnières sont devenues des bassins migratoires et d’exode rural, avec leurs cortèges de tragédies dans le Sahara et dans la Mer Méditerranée ».
L’importance du coton sur l’économie du Mali
Selon le premier ministre Choguel Kokalla Maïga joue un rôle capital dans l’économie de l’Afrique. « A l’échelle de l’Afrique, le coton représente près de 12% du PIB et 70% des recettes agricoles. En outre, la filière emploie plus de 80% de la population active dans les zones productrices », a-t-il indiqué avant d’ajouter que «65 % des pays africains produisent et exportent du coton, tout comme d’autres pays en développement et Pays Moins Avancés, en Asie, en Amérique latine et dans les Caraïbes ».
Au Mali, des millions de citoyens, selon le premier ministre Choguel Kokalla Maïga, vient du coton. « Pour ce qui est de mon pays, le Mali, je rappelle que près de 4 millions de personnes vivent directement de la production du coton », a-t-il indiqué. Cet or blanc, précise Dr Choguel Kokalla Maïga, représente 11,3 % de nos recettes d’exportation et 3,7 % du PIB. « C’est donc dire que le coton constitue un produit stratégique pour notre économie. Un produit de base, créateur de croissance, pourvoyeur d’emplois et de recettes pouvant aider nos pays à lutter plus efficacement contre la pauvreté, notamment en milieu rural et au sein des communautés défavorisées », a défendu le chef du gouvernement du Mali. Dr Choguel Kokalla Maïga profité de cette rencontre pour rendre hommage aux cotonculteurs du Mali. « Lorsque nous parlons du coton, nous pensons toujours bien évidemment à nos paysans, à leur dénuement qui ne leur permet pas souvent de vivre dignement jusqu’à la prochaine campagne cotonnière. Nous pensons à la corvée des femmes productrices qui ne connaitront jamais l’autonomisation prônée par les instances internationales, tant que subsisteront les subventions. Nous pensons aussi, avec préoccupation, à l’avenir des plus jeunes pour lesquels l’éducation devient un luxe faute de pouvoirs d’achat pour leurs producteurs de parents », a-t-il déclaré.
A l’en croire, « le quotidien des cotonculteurs africains est à l’image de ces braves femmes, de ces hommes et de ces personnes âgées qui bêchent sans relâche les champs de coton dans de vastes plaines, à la main, je dis bien, à la main ; qui entretiennent à la main, du matin au soir, sous la pluie, le soleil ardent, dans le vent et les tempêtes tropicales, les plants de coton ; et qui récoltent également à la main le coton, capsule après capsule, méticuleusement, inlassablement ». Selon lui, ces cotonculteurs sont victimes d’injustice. «En plus de subir cette injustice évidente aux yeux de tous, liée aux subventions versées à leurs concurrents, ils sont inexorablement exposés à l’instabilité des prix du marché international, aux effets néfastes du changement climatique et aux conséquences inopinées et dévastatrices de la pandémie de la Covid-19 », a indiqué le premier ministre malien.
Dr Choguel Kokalla Maïga a plaidé pour une réponse appropriée et juste au mandat de Hong Kong de décembre 2005 sur le coton, spécifiquement sur le troisième pilier en négociation qui porte sur le “soutien interne”. Pour lui, les solutions et réponses à apporter à l’épineuse question du coton doivent permettre aux pays producteurs et exportateurs issus des PMA, de faire réellement du commerce un levier de lutte contre la pauvreté et de développement durable. Selon le premier ministre malien, le temps de l’audace a sonné. «L’audace de concrétiser les promesses et de conforter les efforts universels pour la réalisation des 17 Objectifs de Développement Durable (ODD) à l’horizon 2030, en donnant corps aux engagements librement souscrits en 2005 en faveur du coton dans nos pays », a affirmé Dr Choguel Kokalla Maïga qui a ajouté : « Vous devriez renouveler et tenir ces engagements car aujourd’hui encore, et malgré tous les efforts du C-4, plus de 70% de la production cotonnière bénéficient des soutiens internes accordés majoritairement par des pays développés et des pays en développement membres de l’OMC. Et cette pratique produit autant d’effets de distorsion sur le prix du coton que la subvention à l’exportation ou toute autre pratique commerciale similaire ».
Dr Choguel Kokalla Maïga a invité « redonner vie et espoir à la filière coton qui se meurt à petit feu dans les PMA ». Selon lui, ce sont les subventions accordées par certains États à leurs producteurs qui mettent ces règles en échec.
Dr Choguel Kokalla Maïga rend hommage à la résilience paysans maliens
Après avoir rappelé que les paysans avaient décidé dans un passé récent, la mort dans l’âme, de sursoir à la culture du coton et de lui substituer d’autres spéculations telles que les céréales, Dr Choguel Kokalla Maïga a rendu hommage à la « résilience de nos paysans, en particulier de nos cotonculteurs ». Ces producteurs font de leurs mieux pour un meilleur résultat. « Les producteurs de coton du Mali à qui j’ai réservé ma première visite à l’intérieur de mon pays au mois d’août de cette année, ont promis une production record, au terme de la campagne agricole en cours. Imaginez un tant soit peu les performances dont ils seraient capables avec un commerce international plus juste et attractif, et leurs incidences macroéconomiques ! », a déclaré Dr Choguel Kokalla Maïga qui a ajouté que leur responsabilité est de bâtir de véritables chaînes de valeurs agricoles autour du coton, qui soient profitables à l’agriculture en générale, toutes spéculations et toutes productions confondues.
Selon Dr Maïga, le Mali est un pays agro-sylvo-pastoral, un pays de ruralité qui entend devenir une puissance agricole en Afrique de l’Ouest en s’appuyant sur son potentiel hydrique, sa disponibilité en terres arables et ses avantages climatiques. « Mais pour y arriver, nous devons atténuer les contraintes liées au changement climatique, remédier à la crise sécuritaire, mais aussi relever les défis liés aux subventions », a-t-il indiqué.
Il a enfin réitéré son appel vibrant pour un sursaut immédiat de tous les Membres de l’OMC en vue de l’adoption de solutions concrètes dans le cadre du processus des négociations en cours, afin de préserver et promouvoir les filières cotonnières dont le caractère stratégique n’est plus à démontrer.
Boureima Guindo
Source: LE PAYS