La mairie du district de Bamako a signé une convention avec la société marocaine Ozone, le 24 septembre 2014 pour assainir la ville de Bamako. Pourquoi le choix d’une société étrangère ?
Adama Sangaré, maire du district de Bamako : Le choix pour moi vient du fait que c’est une société d’un pays ami du Mali. Elle a accepté beaucoup de choses que les autres sociétés n’ont pas acceptées.
Nous avons vu partir quatre ou cinq sociétés du même ordre qui sont venues pour 1 ou 2 millions de dollars que nous n’avons pas avancés. Elles sont retournées sans plus jamais revenir.
Ozone a accepté ce partenariat parce que le Roi du Maroc lors de son passage, avait fait l’honneur de s’engager à nous aider à faire nettoyer la ville. Lorsque Ozone est venue, elle a compris que nous avions des difficultés pour assumer les charges du nettoyage. Elle s’est donc engagée à préfinancer les activités. C’est pour cette raison, qu’ils ont fourni le parc, ils ont refait un peu le bureau de la DSVA (Direction des services de voirie et d’assainissement, ndlr), ils ont recruté du personnel. Tout cela à leur charge.
Je pense que durant toute l’année 2015, sur les 9 milliards que le gouvernement et la mairie doivent payer, nous avons payé jusqu’à cette date, 60% des décomptes qui nous ont été soumis.
Avant Ozone ce sont les groupements d’intérêts économiques (GIE) qui géraient l’assainissement. Ces derniers se plaignent d’être mis à l’écart aujourd’hui.
Adama Sangaré : J’ai parlé avec un certain nombre de responsables de ces GIE avant l’arrivée d’Ozone. Après, j’ai fait une tournée dans les six communes pour parler avec les six maires. Et je pense que le ministre de l’Environnement à l’époque, M. Ag Erlaf, a également parlé avec ces responsables. Il leur avait demandé si l’ensemble des GIE pouvait se constituer en entreprise, il allait faire résilier le contrat d’Ozone pour que ces groupements transformés en entreprise puissent faire le contrat avec la collectivité et l’État. Apparemment je pense qu’aucune entreprise n’a pas pu être mise en place par ces GIE pour remplacer Ozone.
Le PDG d’Ozone a aussi rencontré les GIE. Il leur a dit qu’il a un label et un nom qu’il veut préserver. Il est d’accord que les GIE viennent à lui, qu’ils essayent de voir ensemble ce qu’il y a lieu de faire parce que nous devons avoir un objectif commun qui est l’assainissement de la ville de Bamako.
On a demandé aux GIE qui le sont réellement, si c’est pour recruter le personnel, qu’ils viennent avec le personnel inscrit à l’INPS et qui répond aux nombreux critères administratifs qu’il est prêt à les redéployer. Mais apparemment beaucoup de GIE n’étaient représentés que par leurs responsables. Et je pense qu’il en a recruté beaucoup et il les en a fait des responsables au niveau d’Ozone.
Mais des responsables de GIE qui recrutaient des saisonniers et chaque trois mois, ils faisaient remplacer leur personnel ne pouvaient pas effectivement répondre à ces critères. À ce sujet, ce que j’ai à dire, si les GIE avaient effectivement réussi, je ne pense pas que l’État allait faire venir une société étrangère. Que nous ayons conscience de nos forces, de nos faiblesses et de nos limites.
Bamako devient une métropole, ce n’est pas avec l’attelage animal que Bamako peut évacuer les ordures. Les 3 millions d’habitants de la ville ne peuvent pas produire des ordures qui peuvent être évacuées par des animaux malades, des animaux non entretenus par des charrettes.
Mais si l’objectif est commun, nous devons faire en sorte de penser à Bamako et non à nous-mêmes. Nous devons comprendre effectivement qu’il faut davantage de moyens matériels avec des capacités renforcées dans la gestion de l’assainissement afin que nous puissions assainir la ville. Il faut nécessairement qu’on accepte de comprendre que si nous n’avons pas les ressources matérielles, humaines et que dans le cadre de la mondialisation, s’il y a une entreprise étrangère qui accepte de venir, qu’on la reçoit, qu’on essaie de voir comment ils ont réussi et aller dans ce sens.
Si on a un contrat de huit ans avec eux, qu’on essaie de voir comment exploiter ces huit années et remplacer Ozone par nos sociétés maliennes. Si dans deux ou trois ans, on a une société plus performante qu’Ozone, on résilie le contrat. On assume et on donne à la société malienne. C’est ouvert.
Ozone doit-elle s’en tenir seulement au balayage des rues comme nous le constatons ?
Adama Sangaré : Ils doivent balayer les rues, curer les caniveaux, évacuer les dépôts de transit vers la décharge finale. Tout cela fait partie de leur prestation.
Pourtant après plus d’un an de prestation, la ville de Bamako est toujours sale…
Adama Sangaré : Non je ne suis pas d’accord avec vous. Quand on prend déjà le nivellement des voies principales, les voies n’étaient pas reconnues, on pensait que même la voie principale n’était bitumée. Mais lorsqu’ Ozone est venue, elle enlevé des tonnes de poussière sur ces routes.
Déjà pour l’état de la route, tout le monde s’accorde à dire qu’ils ont fait un travail professionnel. Ensuite, ils ont pu évaluer l’ensemble des concessions de Bamako qui produit des déchets. Ce qui est très important. Et maintenant, la 2e phase consistait à l’enlèvement de ces déchets pour les amener directement à une décharge finale.
Ce qu’il y a lieu de faire à court et moyen terme est de faire disparaître les dépôts de transit. Ils ont amené des petits porteurs qui devaient normalement aller chercher les ordures des familles pour les amener directement à la décharge finale afin que les dépôts de transit ne soient plus là à être débordés pour causer des soucis et des nuisances à la population.
Donc l’objectif n’est pas encore atteint, mais on n’est pas à la fin, on est à la première année. Et à la première année, il y avait beaucoup de résistance. Il y avait les Groupements d’intérêts économiques (GIE) qui n’étaient pas en partie d’accord, il y avait les populations qui ne comprenaient pas, le personnel d’Ozone qui ne s’entendait pas avec le personnel de la DSVA qui a été mis à leur disposition. Il y a le personnel responsable d’Ozone qui ne s’entendait pas avec les nouvelles recrues qui étaient au niveau du service Ozone. Toute chose qui n’a pas rendu la tâche facile.
Faites-vous un suivi sur le terrain ?
Adama Sangaré : Il y a une commission créée et présidée par la direction des services de voirie et d’assainissement qui contrôle régulièrement le travail d’Ozone.
Quel bilan faites-vous, un an après le démarrage des activités?
Adama Sangaré : On a fait l’évaluation en février dernier, qui n’était pas satisfaisante.
Nous étions à un début de processus surtout qu’Ozone a commencé, il faut reconnaître qu’il n’y a pas de décharge finale. Ils ont commencé à niveler les routes, ils ont commencé à balayer les rues, les canalisations ont été curées très en retard. Ils n’ont même pas atteint les 50% des curages des canalisations l’année dernière.
Le problème qui se posait c’était celui de décharge finale. La ville de Bamako n’a jamais eu de décharge finale. Donc on avait pensé comme ça nous avait été indiqué par l’administration générale qu’au début, on pouvait commencer à mettre les ordures vers l’hôtel Olympe.
Il y a un ravin-là qui constitue un dépôt de transit au niveau de la commune 5. On devait effectivement évacuer vers ces dépôts avant que la décharge finale de Noumoubougou ne soit opérationnelle. Cette décharge est opérationnelle il y a deux mois, non pas sans problème. Mais on a commencé.
Donc le problème qui se posait au début, c’était où déposer les déchets afin d’évacuer tous les dépôts de transit qui débordaient. C’était ça la question, et la réponse c’était l’Etat qui devait nous la donner parce que la mise à disposition de la décharge fait partie des obligations de l’État.
Source: info-matin