L’homme aux déclarations fracassantes a remporté haut la main la présidentielle dans son pays, signe du ras-le-bol de la population à l’encontre de l’establishment.
L’ascension inattendue de Rodrigo Duterte aux Philippines reflète, à l’instar de celle de Donald Trump aux États-Unis, le ressentiment profond des électeurs envers les élites politiques. Le maire de la grande ville de Davao a remporté la présidentielle de lundi après avoir recueilli une avance insurmontable de 6,1 millions de voix. Les résultats officiels ne sont pas encore annoncés, mais ses deux principaux rivaux ont reconnu leur défaite, et aux Philippines, le candidat arrivé en tête est élu même sans majorité absolue.
Rodrigo Duterte, 71 ans, du parti de centre gauche Laban, a promis de lutter contre la pauvreté et l’inégalité, mais aussi de mener une guerre sans merci contre la criminalité. «Oubliez les lois sur les droits de l’Homme!», a lancé le week-end dernier encore celui qui est accusé d’avoir organisé dans sa ville Davao des escadrons de la mort. «Si je suis élu président, je ferai exactement ce que j’ai fait comme maire. Vous, les dealers, les braqueurs et les vauriens, vous feriez mieux de partir. Parce que je vais vous tuer.» Lui assure avoir ramené l’ordre à Davao qui était auparavant une zone de non droit. Mardi, il a également mis en garde les policiers «ripoux». «Si vous êtes un policier et que vous voulez continuer votre racket, il faudra choisir: soit vous me tuez, soit je vous tue».
Discours obscènes
Connu dans l’archipel sous le sobriquet de «Dirty Harry», du nom du personnage de dur joué par Clint Eastwood dans «Inspecteur Harry», l’avocat populiste s’est distingué tout au long de la campagne par ses déclarations fracassantes, souvent ordurières. En avril dernier, évoquant le viol et le meurtre d’une missionnaire lors d’une émeute en 1989 dans une prison de Davao, il avait choqué en lançant: «Ils ont violé toutes les femmes (…) Il y avait cette missionnaire australienne (…) J’ai vu son visage et je me suis dit, ‘putain, quel dommage. Ils l’ont violée, ils ont tous attendu leur tour’. J’étais en colère qu’ils l’aient violée mais elle était si belle. Je me suis dit, ‘le maire aurait dû passer en premier’». Autre sortie qui a marqué l’archipel – catholique à 80% – son évocation de la visite du pape François, qu’il a qualifié de «fils de pute».
Pour le président sortant Benigno Aquino, Duterte serait un dictateur en devenir, susceptible de soumettre l’archipel au règne de la terreur. Sa victoire ne devrait pas être proclamée officiellement avant au moins une semaine, avant l’investiture, le 30 juin prochain. Mais «Dirty Duterte» a déjà «accepté» sa victoire «avec une humilité extrême». «J’éprouve de la reconnaissance envers le peuple philippin».
Source: le Figaro