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Déclaration des Chefs d’Etat et de Gouvernement de la CEDEAO sur la crise sociopolitique au Mali

1. Les Chefs d’Etats et de Gouvernement de la Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest, CEDEAO, se sont réunis par visioconférence en session extraordinaire le 27 juillet 2020.

Avant d’aborder leur ordre du jour ils ont tenu à adresser leurs condoléances à S.E.M. Alassane Ouattara, Président de la République de Côte d’Ivoire pour le décès du Premier Ministre Amadou Gon Coulibaly et de l’ancien Premier Ministre Seydou Elimane Diarra. Ils ont également présenté leurs condoléances à S.E.M. Macky Sall pour le décès de Monsieur Babacar Touré, une grande figure du journalisme sénégalais et un panafricaniste.

2. Conformément à leur ordre du jour, ils ont, en vertu du Protocole de la CEDEAO sur la Démocratie et la bonne Gouvernance, procédé à un examen approfondi de la situation sociopolitique actuelle au Mali, situation caractérisée par des manifestations initiées depuis début juin 2020 par un Mouvement regroupant des acteurs politiques, des associations religieuses et des organisations de la société civile, notamment le Mouvement du 5 juin – Regroupement des Forces Patriotiques (M5-RFP).

3. Cette crise sociopolitique intervient dans un contexte difficile pour le Mali, caractérisé par une menace sécuritaire grave avec des attaques terroristes récurrentes, des tensions intercommunautaires dans le centre du pays, une crise sociale marquée par une longue grève des enseignants, une crise sanitaire causée par la pandémie de la Covid-19 et ses conséquences économiques et financières.

4. La crise actuelle a des similarités profondes avec celle de 2012 quand des manifestations violentes de rue ont conduit à un coup d’état militaire le 22 mars 2012 qui a plongé le Mali dans l’incertitude et favorisé l’expansion des groupes terroristes djihadistes dans le pays.

5. C’est pour éviter la répétition de cette grave situation qu’une Mission Ministérielle, dépêchée par le Président en exercice de la Conférence des Chefs d’Etat de la CEDEAO, s’est rendue à Bamako du 18 au 20 juin 2020, pour aider à la résolution de la crise. La mission ministérielle a établi le diagnostic de la crise et proposé des solutions avec une série de recommandations. Malheureusement, ces recommandations n’ont pas été mises en œuvre et les manifestations se sont poursuivies. Elles ont été particulièrement violentes les 10, 11 et 12 juillet et entraîné la destruction de biens publics et privés et de nombreux décès et blessés.

6. Face à la dégradation de la situation, la CEDEAO a nommé un Envoyé Spécial Médiateur en la Personne de S.E.M. Goodluck Ebele Jonathan, ancien Président de la République Fédérale du Nigéria, pour aider à la résolution de la crise. Le Médiateur a conduit une mission du 15 au 19 juillet 2020 à Bamako accompagné de S.E.M. Kalla Ankourao, Ministre des Affaires étrangères, de la Coopération, de l’Intégration Africaine et des Nigériens à l’Extérieur et Président en Exercice du Conseil des Ministres de la CEDEAO et de S.E.M. Jean Claude Kassi Brou, Président de la Commission de la CEDEAO. La Mission a rencontré l’ensemble des acteurs, et a formulé une Feuille de Route de sortie de crise. Cette Feuille de Route a été acceptée par la quasi-totalité des acteurs à l’exception du Comité stratégique du M5-RFP qui a maintenu ses revendications à savoir :

– la démission du Président de la République ;

– l’instauration d’un régime de transition ;

– la mise en place d’une commission d’enquête sur les morts des 10, 11 et 12 juillet ; et

– la libération de l’Honorable Soumaila CISSE, Chef de file de l’opposition, enlevé lors des élections législatives.

Le M5-RFP a également annoncé la poursuite des manifestations.

7. Conformément au rôle classique de prévention, de gestion et de règlement des conflits de la CEDEAO en vue de la sauvegarde de la paix, de la stabilité et de la sécurité dans l’espace communautaire, une Mission d’information de cinq (5) Chefs d’Etat s’est rendue à Bamako le jeudi 23 juillet 2020. Cette Mission comprenait :

– S.E.M. Mahamadou ISSOUFOU, Président de la République du Niger, Président en exercice de la Conférence des Chefs d’Etat et de Gouvernement de la CEDEAO

– S.E. Nana Akuffo ADDO, Président de la République du Ghana ,

– S.E.M. Alassane OUATTARA, Président de la République de Côte d’Ivoire ,

– S.E.M. Muhammadu BUHARI, Président de la République Fédérale du Nigeria ; et

– S.E.M. Macky SALL, Président de la République du Sénégal.

La Mission a rencontré le Président de la République, SEM Ibrahim Boubacar KEITA ainsi que les principaux acteurs à savoir le Comité Stratégique du M5-RFP, la Majorité présidentielle et des acteurs de la société civile. La Mission a précisé à tous ses interlocuteurs sa vision pour une sortie de crise nécessaire et rapide.

8. Compte tenu de la gravité et de l’urgence de la situation, les Chefs d’Etat ont décidé de la tenue d’un Sommet extraordinaire en vue d’examiner la situation et de prendre les décisions nécessaires pour restaurer la paix et la stabilité au Mali.

9. A l’issue de ce Sommet extraordinaire, les Chefs d’Etat et de Gouvernement présentent leurs condoléances aux familles endeuillées suite aux manifestations et souhaitent un prompt rétablissement aux blessés. Ils expriment leurs profondes préoccupations devant cette situation de nature à accroitre l’instabilité au Mali et dans la sous-région. Ils réitèrent leur appel pressant à l’ensemble des parties prenantes maliennes à éviter les violences et à recourir au dialogue pour la résolution de leurs différends dans un contexte marqué par les difficultés multidimensionnelles que traverse le Mali.

10. Les Chefs d’Etat et de Gouvernement lancent un appel pressant au maintien de la trêve des manifestations pour favoriser un climat de sérénité et de confiance propice au dialogue en vue d’une sortie de crise pacifique au Mali.

11. Ils félicitent le Médiateur et la Commission de la CEDEAO pour le travail accompli et marquent leur soutien aux propositions faites par la Médiation contenues dans la Feuille de Route.

12. Les Chefs d’Etat et de Gouvernement ont rappelé que toute menace à la paix, à la sécurité et à la stabilité de chacun des Etats membres est une menace à l’ensemble de la Communauté. Ils ont en outre rappelé l’importance et la nécessité du respect des Institutions de la République, notamment les voies constitutionnelles pour l’accession au pouvoir et ce conformément au Protocole additionnel de la CEDEAO sur la Démocratie et la bonne Gouvernance.

13. Les Chefs d’Etat et de Gouvernement ont noté que les principales Institutions du Mali, à savoir la Cour Constitutionnelle, l’Assemblée Nationale et le Gouvernement sont inopérantes. Il est donc prioritaire de remettre en place le plus rapidement possible ces Institutions régaliennes, nécessaires au bon fonctionnement de l’Etat et au traitement de toutes les revendications évoquées par les manifestants.

14. Les Chefs d’Etat et de Gouvernement ont, à cet effet pris les décisions suivantes :

a. S’agissant de l’Assemblée Nationale, les Chefs d’Etat et de Gouvernement engagent les partis politiques à tout mettre en œuvre afin d’obtenir la démission immédiate des 31 députés dont l’élection est contestée et pour ouvrir la voie à des élections partielles. En attendant ces élections partielles, l’Assemblée Nationale pourra fonctionner avec les 116 députés restants.

b. S’agissant de la Cour Constitutionnelle, les Chefs d’Etat et de Gouvernement demandent à toutes les Institutions concernées de faciliter sa recomposition sans délai conformément aux dispositions légales en vigueur au Mali. S’agissant de l’Assemblée Nationale, elle nommera ses représentants après la démission des 31 membres dont l’élection est contestée et après la mise en place du bureau.

En cas de difficulté dans la démission des députés ou la nomination des membres de la Cour Constitutionnelle par les différentes Instances, le Président de la République aura recours à l’article 50 de la Constitution.

c. S’agissant de l’Exécutif, un Gouvernement d’union nationale sous la responsabilité du Premier Ministre Boubou CISSE sera mis en place rapidement, conformément aux recommandations du Médiateur avec 50% provenant de la Coalition au pouvoir, 30% de l’opposition et 20% de la Société civile.

Compte tenu des nombreux défis auxquels fait face le pays, certains membres du Gouvernement doivent être nommés avant la formation complète du Gouvernement d’union nationale. Il s’agit de ceux en charge de la Défense, la Justice, les Affaires Etrangères, la Sécurité intérieure et les Finances.

Les Chefs d’Etat et de Gouvernement encouragent l’opposition, particulièrement le M5-RFP, à participer à ce Gouvernement d’union nationale.

Le Gouvernement mis en place accordera une priorité à la gestion des conséquences des manifestations, à l’amélioration de la Gouvernance, aux réformes prévues par le Dialogue National Inclusif et à l’accélération de la mise en œuvre des accords de Paix d’Alger.

d. S’agissant des Enquêtes relatives aux évènements des 10, 11 et 12 juillet 2020, les Chefs d’Etat et de Gouvernement engagent les autorités compétentes à les diligenter pour déterminer et situer les causes et les responsabilités dans les violences qui ont entrainé des décès et des blessés ainsi que les destructions des biens publics et privés. Le rapport d’enquête donnera lieu à des poursuites judiciaires.

Les Chefs d’Etat et de Gouvernement encouragent le Président de la République S.E.M. Ibrahim Boubacar KEITA à mettre en place un Fonds pour soutenir les personnes blessées et les familles des victimes des manifestations.

e. Enfin, les Chefs d’Etat et de Gouvernement :

– Réitèrent leur solidarité avec l’Honorable Soumaila CISSE, Chef de file de l’opposition enlevé depuis le 25 mars 2020. Ils demandent aux Autorités Maliennes de continuer leurs efforts en vue de sa libération.

– Demandent à la Commission de la CEDEAO de mettre en place un Comité de Suivi de la mise en œuvre des mesures ci-dessus. II comprendra des représentants du Gouvernement, du Parlement, de la Société civile, de la Magistrature, du M5-RFP, des partis de la Majorité, des femmes et des jeunes, sous la présidence de la CEDEAO et avec l’accompagnement des Représentations Locales de l’Union Africaine et des Nations Unies.

– Engagent toutes les parties à la mise en oeuvre des mesures et décisions et ci-dessus dans un délai de dix (10) jours.

– Demandent à la Commission d’envisager des sanctions individuelles ciblées contre tous ceux et celles qui feront manifestement obstacle au processus de normalisation de cette crise.

– Décident de rester activement saisis de la situation au Mali.

15. Les Chefs d’Etat et de Gouvernement lancent un appel au Conseil de Paix et de Sécurité de l’Union Africaine et au Conseil de Sécurité des Nations Unies afin d’endosser les décisions ci-dessus adoptées par le Sommet extraordinaire pour une sortie de crise au Mali.

Fait par visioconférence, le 27 juillet 2020

Pour la Conférence

S.E.M. Mahamadou ISSOUFOU

Le Président

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