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Dakar à la conquête de lendemains innovants

REPORTAGE. De plus en plus d’initiatives innovantes, technologiques et financières accompagnent la capitale sénégalaise dans sa montée en puissance.

Ce n’est pas un hasard si, pour sa première édition africaine, la Journée de la femme digitale, ce rendez-vous de l’innovation numérique au féminin, a choisi Dakar qui « fait partie du top 10 des villes les plus high-tech » d’Afrique subsaharienne, a souligné Delphine Remy-Boutang, CEO et fondatrice de la JFD. De fait, la capitale sénégalaise a, très tôt, mis en place un écosystème destiné à encourager et à accompagner la présence des femmes dans le numérique. Mais pas seulement… « Nous sommes honorés du choix de la capitale sénégalaise pour le lancement de l’internationalisation de la Journée de la femme digitale en Afrique. Notre pays affiche des ambitions fortes dans le développement des TIC et la création d’une économie numérique durable, que nous soutenons à travers de nombreuses initiatives à l’image du projet Dakar Ville numérique », a expliqué Soham El Wardini, maire de Dakar.

 

C’est à l’initiative de l’ex-maire de la ville, Khalifa Sall, récemment libéré de prison, que Dakar est devenue la première ville africaine à offrir à ses citoyens l’accès gratuit à Internet, alors qu’un Sénégalais sur deux est détenteur d’un compte de paiement mobile. Si le Sénégal avance tous azimuts, c’est pour atteindre l’objectif de créer 35 000 emplois directs dans le domaine des nouvelles technologies d’ici à 2025. Et ainsi compléter un écosystème déjà bien varié composé d’acteurs publics, privés, ainsi que d’associations, tous œuvrant pour la promotion du numérique et participant à faire, au fil des années, de Dakar une ville connectée.

Jokkolabs : créer des communautés de compétences

Parmi eux, il y a un espace qui fait office de pionnier. Il s’agit de Jokkolabs, le premier espace de travail collaboratif d’Afrique de l’Ouest et fondé par Karim Sy. Cet entrepreneur libano-malien s’est très tôt intéressé aux logiciels en Open source, d’abord en France avant de rentrer s’installer au Mali puis au Sénégal. Son rêve à cette époque est surtout de proposer un lieu qui dépasse la seule fonction d’espace de travail. Du coup, Jokkolabs s’est rapidement imposé comme un incubateur où l’on peut trouver des ressources pour se former, se connecter aux autres entrepreneurs.

Très impliqué dans la diaspora, Karim Sy est entré en 2017 au Conseil présidentiel pour l’Afrique mis en place par le président français Emmanuel Macron. En 2018 est lancé un immense réseau intitulé Digital Africa à destination des entreprises tech du continent en partenariat avec l’Agence française de développement. Il en prend la tête. « Nous sommes un réseau d’espaces d’innovation présents dans plusieurs pays d’Afrique de l’Ouest notamment, avec 2 hubs en France pour être à côté des diasporas et accompagner les repats », indique Fatoumata Niang Niox, directrice exécutive de Jokkolabs. Conçus comme des espaces de travail collaboratifs, les Jokkolabs ont vocation à créer des dynamiques collaboratives entre les entrepreneurs. « Par un transfert de compétences, par du partage, par l’apprentissage par les Tech. » Ainsi, à Jokkolabs, vous avez des techniciens, des médecins, des juristes… des profils très différents. L’idée étant de mettre en relation des compétences. » Et pour répondre à la demande, un incubateur a été mis en place. « Pour créer des champions sénégalais, il faut mobiliser l’expertise sénégalaise. Ce que l’ont fait avec les différents espaces d’accompagnement et les acteurs publics, qui commencent à le comprendre et mettent en place des mécanismes adaptés aux besoins des entreprises. » Et pour initier ces futurs champions nationaux dès le plus jeune âge, Jokkokids a été créé il y a quatre ans. « Le numérique ne doit pas être une fin en soi, c’est un élément transversal. Nous travaillons avec les enfants à la stimulation de leur créativité. »

Aujourd’hui, l’initiative s’est étendue pour former un réseau de douze espaces d’innovation Jokkolabs dans neuf pays : la Côte d’Ivoire, le Cameroun, le Mali, le Maroc, le Burkina Faso, le Bénin, la Gambie, la France et le Sénégal. « On fait ce qu’on sait faire : créer des communautés, harmoniser et mettre en collaboration différents acteurs avec des compétences complémentaires. » Signe de son efficacité, le groupe Société Générale a choisi d’installer son espace innovation à Jokkolabs. « Un vrai modèle de corporate qui crée de la valeur et s’engage en faveur des jeunes en leur permettant d’accéder à de grands groupes jusque-là fermés », juge Fatoumata.

 

Sonatel Academy : « De belles histoires sont nées ici »

Un autre « grand groupe » est venu rejoindre et compléter cet environnement numérique, l’opérateur de télécom Orange. À travers sa filiale, Sonatel, il a créé la Sonatel Academy, la première école de codage gratuite du Sénégal, selon ses initiateurs, qui a vocation à devenir un point d’innovation sur toute la chaîne de valeur, avec une école, le Fab Lab, un espace start-up, lequel va accompagner les lauréats de l’école à travers un programme d’accélération personnalisé. Objectif : accompagner cent personnes dans un premier temps. « La Sonatel Academy, explique Anna Fall, responsable animation, est une école gratuite qui s’inscrit dans le cadre de la politique RSE de la Sonatel. Nous avons accueilli 50 apprenants pour la première promotion et nous visons les 100 bénéficiaires pour la seconde. » À l’issue d’une formation de sept mois, dispensée par des coaches avec un accompagnement personnalisé, les apprenants sont orientés vers une insertion professionnelle ou la création d’une start-up. Déjà, l’établissement estime avoir atteint ses premiers objectifs avec la première promotion : sur un objectif de 70 %, 83 % des jeunes ont trouvé un emploi, 5 start-up ont été créées dont une, conçue par Abdoulaye Faye fondateur d’Innov’digital, aujourd’hui incubée à la Sonatel Academy. « De belles histoires sont nées ici », commente Tacko Dieye, responsable entrepreneuriat numérique et promotion des start-up.

Accueillis avec un niveau bac au minimum, les candidats, de la majorité à 38 ans, des demandeurs d’emploi sont sélectionnés à la suite d’entretiens où leur motivation est jugée. « Pour intégrer le programme, poursuit Anna, il faut avoir un projet. Et pour obtenir le certificat, il faut le soutenir devant un jury composé ente autre d’écoles locales. » C’est toute la particularité, et l’intérêt de ces différentes structures. Intégrées à un écosystème composé d’acteurs publics et privés et d’initiatives de la société civile, reliées entre elles, elles se complètent pour une plus grande efficacité et un plus large impact.

 

Ctic : de la pré-incubation à l’incubation, en passant par l’accélération et la formation

Parmi ces institutions « connectées », autre précurseur dans la ville, le Ctic, un des premiers incubateurs régionaux également. Créé en 2011, à travers un partenariat public-privé, le Ctic est destiné à devenir un hub régional à travers le soutien, la création, le financement et la croissance des start-up nationales et régionales pour contribuer à la transformation digitale des économies. « Depuis sa création, 162 entreprises ont été accompagnées, 27 incubées et 2 287 projets coachés, résume Anta Ndiaye, community manager du Ctic. Soit un chiffre d’affaires de plus de 4 000 milliards de francs CFA cumulés par les entreprises incubées. » Ce, parce que le Ctic délivre une offre d’accompagnement complète : de la pré-incubation à l’incubation, en passant par l’accélération et la formation.

Kinaya Ventures : connecter les start-up avec les investisseurs

Et parce qu’il ne suffit pas de stimuler ou d’accompagner la créativité de ces entrepreneurs en herbe, reste à les financer. Alors que le gap de financement des PME en Afrique est estimé à plus de 80 milliards d’euros, les institutions financières traditionnelles hésitant à faire confiance à ces jeunes entrepreneurs, la plateforme Kinaya Ventures se présente comme une alternative. Co-fondée par Eva Sow Ebion, Kinaya, une contraction de deux prénoms, Kine pour le Sénégal et Aya pour Abidjan, la structure, présente dans les deux pays, accompagne et connecte les entrepreneurs, y compris avec les investisseurs. Ce, grâce à un partenariat avec Partech Africa, un des plus importants fonds qui investit dans les start-up africaines [125 millions d’euros, NDLR]. « On ne se définit pas comme un incubateur, mais comme un accélérateur d’investissement, précise Eva. Parce qu’on va du training à l’investissement. »

 

Fodem : les jeunes et les femmes d’abord !

Autre source de financement, le Fodem ou Fonds de développement et de solidarité municipal de Dakar. Ex-Crédit municipal de Dakar, il a été créé dans le but de promouvoir et de soutenir particulièrement les jeunes et les femmes dans le développement de projets générateurs de revenus en finançant des micro-crédits. Et depuis peu, la municipalité a ajouté à ce dispositif une couveuse d’entreprise en vue de faciliter et d’accompagner l’insertion des jeunes entrepreneurs dans le tissu économique local. « Le problème de l’emploi est récurrent au Sénégal aussi bien chez les femmes que chez les jeunes, rappelle la mairesse de Dakar. C’est dans ce cadre que nous avons mis en place une banque, le Fodem, dédiée au financement des femmes dans plusieurs domaines. Ainsi que la CPEM une couveuse d’entreprises où des femmes sont sélectionnées, encadrées, formées à l’entrepreneuriat. Nous avons aussi d’autres projets en vue pour promouvoir la jeunesse et les femmes dans tous les domaines et nous allons y arriver petit à petit. »

Le Festic : le numérique service de la promotion des femmes

La société civile est également partie prenante de cet écosystème numérique dakarois. À travers la mobilisation de nombres d’associations et ONG locales. Dont l’Association des femmes sénégalaises des tics (Festic), un réseau de femmes, bénévoles, qui mènent une série d’actions pour mettre le numérique au service de la promotion des femmes. « Nous délivrons des formations dans le digital, du coaching, des Festic Awards pour célébrer les femmes dans le digital, énumère Bitilokho Ndiaye, présidente du Festic. La maison de la femme digitale, où nous nous trouvons, est un espace de coworking, projet de monitoring, en faveur de l’éducation et le maintien des filles à l’école. Les femmes du Festic mènent des activités volontaires dans les écoles. »

Avec un objectif : former 5 000 femmes dans le e-commerce à travers tout le pays. Par des formations de renforcement de capacité, une familiarisation aux outils numériques et à entrepreneuriat. Ouvert à toutes les femmes, le Festic, né en 2016, qui compte 145 membres, fonctionne lui aussi selon un esprit collaboratif : il s’agit de créer des synergies entre des femmes qui ont des compétences et d’autres pour développer leur activité.

Des initiatives qui participent au foisonnement de la scène technologique de Dakar. L’un des enjeux désormais est de pouvoir répondre avec efficience aux problématiques les plus urgentes, notamment dans le domaine de la santé. Pour Nafissatou Diouf : « Au Sénégal, nous sommes confrontés à énormément de problèmes de santé publique. Un des problèmes, la prise en charge des urgences. Combien de diabétiques meurent parce qu’on leur a perfusé une solution de glucose ? J’ai perdu une personne qui m’était très chère, ma tante, et je ne suis pas la seule dans ce cas. Pour éviter à d’autres de vivre ce que j’ai vécu, j’ai créé Senvital. » Fondée il y a deux ans, la start-up, qui emploie déjà dix personnes, fonctionne grâce à un simple système de code-barre intégré à un objet aussi insolite qu’un bracelet ou un pendentif. Il permet aux professionnels de la santé de scanner le dossier médical d’un patient. En somme de sauver des vies.

Source: lepoint

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