Au sud-ouest du Niger, les tensions entre les communautés créent un climat de méfiance. Une situation qui pourrait être exploitée par les groupes djihadistes, selon un nouveau rapport de l’International Crisis group, publié jeudi 29 avril 2021.
La crise entre éleveurs et agriculteurs est quasiment commune aux régions du sahel. Au sud-ouest du Niger, cette « dimension communautaire menace grandement la cohésion sociale ». Dans cette région, cette crise se nourrit de l’influence de gangs opérant depuis le Nigéria. Ce banditisme, selon l’International crisis group, s’étend le « long d’une bande frontalière allant des villes nigériennes de Maradi à Dogondoutchi (ou Doutchi), des groupes de bandits armés volent des troupeaux entiers et kidnappent des centaines de villageois ».
Crise intercommunautaire
La méfiance entre les communautés se trouve du coup renforcée. Ce qui crée « un contexte favorable à l’émergence d’insurrections armées ». Les sédentaires sont tentés de former des groupes d’autodéfense. Ces tensions entre les communautés constituent un terrain fertile pour l’émergence de groupes jihadistes. « Leur enracinement pourrait ouvrir un nouveau front de violence pour le Niger et menacer d’encerclement Niamey, la capitale du pays », craint le Crisis group, organisation indépendante ayant pour mission la prévention des guerres et l’élaboration des politiques qui bâtiront un monde plus pacifique.
« Les populations sédentaires associent progressivement les bandits à la communauté peul, qui constitue la majorité des populations nomades de la zone, de plus en plus stigmatisée. Pour se protéger du banditisme, des groupes d’autodéfense essentiellement haoussa sont en cours de formation dans la région de Maradi. Exclus de ces groupes et suspectés par ces derniers d’être à l’origine des violences armées, les pasteurs — en particulier peul — sont poussés à se rapprocher des groupes de bandits pour y trouver une forme de protection », indique l’International Crisis group dans son rapport « Sud-ouest du Niger : prévenir un nouveau front insurrectionnel », publié ce 29 avril 2021.
Ce phénomène de banditisme transfrontalier ne semble pas être un fait nouveau dans cette région de la bande reliant Maradi à Doutchi. Selon les précisions de l’International crisis group, depuis plusieurs décennies, ce phénomène a donné naissance « à des filières criminelles organisées qui se sont transformées au début des années 2010, sous l’effet de dynamiques extérieures ».
« Envisager des processus de démobilisation des bandits »
Ce banditisme tire surtout sa source de la crise libyenne de 2011 où « l’économie de guerre s’articule autour des trafics [ndlr]. Dans le sens inverse, un flux d’armes de guerre issues des stocks de l’ère Kadhafi approvisionne, depuis la Libye, les groupes criminels nigériens et nigérians ». Du nord du Nigéria, depuis les années 2010, ces bandits ont fini par se spécialiser en vol de troupeaux, enlèvements et assassinats ciblés. « Cette violence s’est exportée sur le versant nigérien de la frontière, à Maradi à partir de 2016, puis à Tahoua en 2019 », précise-t-on dans le rapport du Crisis group.
Afin d’éviter cette crise insurrectionnelle, le Crisis group exhorte les autorités nigériennes à compléter leurs efforts sécuritaires par « des mesures préventives visant principalement à remédier aux injustices subies par les communautés vivant de l’élevage, à initier des dialogues intercommunautaires et à mieux encadrer les groupes d’autodéfense embryonnaires ». Une manière d’éviter aux éleveurs de prendre les armes. Elles doivent également « envisager des processus de démobilisation des bandits ».
Fousseni Togola
Source : saheltribune.com