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Crise énergétique : Pourquoi la ministre doit démissionner ?

Une nette baisse d’ardeur a finalement succédé aux récentes annonces pompeuses de la nouvelle ministre en charge de l’énergie. Ses menaces de faire rendre gorge aux collaborateurs – pour des présomptions de pratiques frauduleuses – n’ont brassé que du vent. Et pour cause : elles ne reposent que sur une histoire cousue de fil, sur fond de répercussions fâcheuses sur le devenir du secteur.

Selon nos sources, la situation est d’autant plus périlleuse que les autorités viennent de mordre la poussière à l’échelle sous-régionale. Leurs attentes de mobilisation d’un prêt très consistant se sont récemment heurtées à la réticence de la BOAD (Banque Ouest-Africaine de Développement). Aux dernières nouvelles, l’institution financière n’a accédé que très partiellement aux promesses de financement annoncées pour le secteur énergétique malien. En cause, les récentes déclarations fracassantes sur la gouvernance de la société Edm. Il nous revient de source concordante, en effet, que les dénonciations de dame Bintou Camara ont coûté cher au pays puisqu’elles sont justement les arguments sur lesquels reposent les réserves des décideurs de la BOAD. Pour ces derniers, en clair, un secteur miné par le grabuge d’une ampleur, le vol et tant de pratiques crapuleuses n’offre aucune assurance d’investissement, surtout lorsque ces pratiques sont confirmées par une voie aussi autorisée que l’autorité politique. De quoi désarçonner la nouvelle ministre, qui devrait sans doute se mordre le doigt d’avoir jeté autant de discrédit sur l’EDM.

Face à la cruelle absence de preuves

Et dire que lesdites allégations, à en croire nos confidences, tiennent d’un grossier montage apparemment concocté pour masquer l’impuissance de la tutelle face aux défis énergétiques à relever. La successeur de Lamine Seydou Traoré, apprend-on, a ainsi jugé bon d’user d’inventions et d’affabulations pour justifier son échec devant la lourdeur des missions qui lui sont assignées. Pour ce faire, il fallait ne pas laisser filer le moindre spectre d’éléments qui puisse mettre en exergue les facteurs accessoires du déficit électrique. C’est en définitive bien à dessein que les projecteurs sont orientés vers le phénomène du vol d’hydrocarbures à coups de récits légendaires. Selon nos sources, en clair, la fameuse histoire de citerne est partie de suspicions qui portaient au départ sur un total de 17 camions-citernes aux trousses desquels le département a déployé toute une armada de limiers. Il s’agit de camions estampillés Star Oil dont les contenus avaient été pourtant bel et bien réceptionnés dans les différentes centrales de la capitale dont celle de Badalabougou. Sauf que dans l’entendement de la ministre il était inadmissible que les contenus d’environ une vingtaine de camions soient avalés en moins de 48 heures par des machines. Pour apporter la preuve que c’est du fait d’un vol orchestré, le ban et l’arrière-ban ont été mobilisés à Faladié où stationnent des camions suspects. À coups de projecteurs, des agents de la Sécurité de l’Etat débarquent sur les lieux et ciblent deux des véhicules respectivement immatriculés BQ 2895 MD et AS 4272 MD. Sous les caméras de leurs bourreaux, les occupants sont conduits manu militari pour des interrogatoires musclés et servir d’échantillon de «voleurs» assez représentatif pour un coup médiatique avec l’entrée en action d’animateurs de réseaux sociaux. Avec la prouesses alchimistes de ces rabatteurs du département, les 17 camions de Star Oil initialement suspectés deviendront 59 citernes évaporés dans la nature, information que la ministre va confirmer dans sa grande opération de lapidation médiatique des employés d’EDM, à coups de promesses de démantèlement d’un réseau de fraude prétendument mis à nu par ses services. Quant aux preuves y afférentes, elles demeureront dans les gesticulations aussi longtemps que l’arbre du factice va se perdre dans la forêt d’évidences. Et pour cause : les premiers camions saisis, en plus de n’être pas du lot des 17 citernes Star-Oil suspectées, ne comportent aucun indice de destination aux centrales EDM, selon les bordereaux de livraison qui les accompagnent. Ils appartiennent plutôt à l’opérateur Mama Lah, lequel aurait même suspendu ses livraisons à la société pour cumul d’impayés, expliquent nos sources. Il n’y avait dès lors aucune raison de les retenir et de continuer à séquestrer leurs pauvres occupants, qui seront finalement libérés sans aucune charge contre leurs personnes. Saisis dans la foulée et présentés au public comme le cerveau de la machine frauduleuse, les ordinateurs du pôle-support de l’EDM n’ont produit également le moindre faisceau d’indices, pas plus qu’il n’y en avait du côté du ballet d’agents cuisinés par les services de sécurité.

Rattrapée par ses manœuvres ?

Au bas mot, les tentatives de s’illustrer sur le dos des travailleurs n’auront guère produit plus de résultats que l’approfondissement d’un malaise déjà latent avec l’échec du département à imposer son secrétaire général actuel comme Directeur général. Conséquence : les travailleurs, par le truchement de leur syndicat, ne se sont pas contentés de réagir par les cinglants démentis apportés aux allégations de la ministre sur les antennes de l’ORTM. Ils devaient aussi s’illustrer par un grand déballage sur le noyautage ayant prévalu à l’affectation de certaines responsabilités stratégiques. C’est le cas des postes d’auditeur en chef et de Directeur Central du Pôle Finance Comptabilité et Commercial, respectivement attribués à d’anciens collaborateurs du cabinet d’audit de la ministre, le même qui assurait par ailleurs le commissariat aux comptes d’EDM.

Le bras de fer entre la tutelle et les employés de cette société aurait pu aller au-delà de ces dénonciations si le battage médiatique de Mme Bintou Camara avait conduit aux arrestations massives annoncées dans la foulée. À défaut de quoi, le discrédit jeté sur une entreprise aussi stratégique n’aura pas seulement accentué la crise énergétique et pollué davantage une atmosphère interne impropice à sa résorption, il aura aussi plombé la notoriété d’EDM et compromis ses chances de rebondir par les apports extérieurs. Au lieu de l’alternative au lourd héritage de son prédécesseur, l’actuelle ministre de l’énergie est devenue en définitive un facteur de démultiplication des obstacles à l’épanouissement du secteur. Elle se doit d’en tirer les conséquences avant de s’illustrer dans l’histoire comme vecteur des ténèbres qui s’annoncent.

A KEÏTA

Le Témoin

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