En mars 2012, une frange indisciplinée de l’armée a fait irruption sur la scène politique, provoquant le départ du président de la république et précipitant l’occupation des 2/3 tiers de notre territoire national par les terroristes, des jihadistes, des bandits armés et des narcotrafiquants.
Le 11 janvier 2013 la France lance l’opération Serval pour stopper la progression des forces du Mal vers Bamako et aider l’armée malienne à récupérer le territoire occupé. Insouciants de la présence des armées étrangères et de l’avenir du pays, des militaires maliens continuèrent de se livrer en spectacle jusqu’au 30 septembre 2013, où le président IBK s’est mis enfin dans la peau d’un véritable chef suprême des armées pour mettre fin au règne de la bande à Sanogo.
Depuis le coup d’Etat jusqu’à l’élection du nouveau président de la république, en août 2013, le pays était cogéré par le Chef des putschistes de Kati, la capitaine Amadou Haya Sanogo et le président de la transition, Dioncounda Traoré. Après avoir mis le Mali dans toutes les mauvaises postures, pendant les 18 mois d’intérim et de transition, l’armée des salons feutrés, des grosses cylindrées s’est négativement distinguée, à travers des guerres fratricides, la cassure de la chaine de commandement, le non respect de la hiérarchie, l’enrichissement illicite, la ruée sur les galons promo, etc. Au même moment, les armées des pays de la CEDEAO, du Tchad et de la France se battaient avec courage pour libérer le pays.
L’opération serval, lancée le 11 janvier 2013, a rassuré les maliens qui ont retrouvé leur souffle. Elle a permis à l’armée au front de reprendre le dessus après d’intenses combats à Konna. On pensait qu’au sud, à Bamako, l’armée, sous la coupole des putschistes, allait mettre en veilleuse ses pratiques déshonorantes pour soutenir les compagnons d’armes du front. C’était mal les connaitre, car leur objectif n’était nullement le nord et la reconquête militaire, mais le pouvoir, l’argent, les galons, des villas, des 4X4, etc. C’est pourquoi sont nées parmi eux des querelles de personnes et de corps. C’est ainsi que le vendredi 8 février 2013, à peine un mois après le déclenchement de l’opération serval, le 33ème Régiment des commandos parachutistes de Djicoroni fut attaqué par les forces de sécurité pochent du Capitaine Amadou Haya Sanogo, sous le couvert de l’état major général, faisant au moins deux victimes adolescentes. L’accalmie apparente qui existait entre les protagonistes militaires volait ainsi en éclat.
L’opération du 8 février 2013, officiellement décidée par l’Etat Major général des armées, disait-on, avait pourtant surpris, à l’époque, le président de la transition Dioncounda Traoré. Son discours, du même jour, adressé à l’armée l’atteste « Oui, j’aurais préféré m’adresser à vous pour vous féliciter de l’action que vous menez au Nord de notre pays et des victoires remportées en compagnie de nos frères et de nos alliés sur notre ennemi commun.
Hélas ! C’est suite au triste spectacle d’échanges de tirs fratricides entre vous, au grand désespoir du peuple Malien, et à un moment où la principale préoccupation de chaque malienne et de chaque malien devrait être constituée par les opérations que nous sommes entrain de mener au Nord contre le Terrorisme et le crime organisé, qui ont soumis pendant de trop longs mois déjà nos compatriotes du Nord à un véritable calvaire… L’Armée malienne a certainement bien d’autres choses à faire que ce à quoi nous avons assisté aujourd’hui. »
Deux jours avant, le mercredi 13 février 2013, le capitaine Amadou Haya, Sanogo a été officiellement investi président du Comité militaire de suivi de la réforme des forces de défense et de sécurité par le président Dioncounda Traoré. A titre de rappel, ce Comité a été créé en juin 2012, dit-on, pour l’amélioration des conditions de travail et de vie du personnel des Forces armées et de sécurité. La vie du comité se résumait officiellement à la vie de la transition.
Depuis le 30 avril 2012, date de l’offensive des bérets rouges sur des positions tenues par les hommes du Capitaine Sanogo, les deux camps se regardaient en chiens de faïences. Après la décision de restructurer le régiment, la justice a commencé à élargir en compte goutte des éléments du régiment et d’autres corps arrêtés courant 2012.
Le 26 juin 2013, le président Dioncounda Traoré avait organisé une cérémonie dite de réconciliation à Koulouba entre les bérets rouges et bérets verts. Au cours de laquelle, il a annoncé la libération de toutes les personnes arrêtées dans le cadre de ce contentieux. Malgré cette annonce officielle et publique du président intérimaire Dioncounda Traoré, le colonel Abdina Guindo, chef de corps du régiment des commandos parachutistes avant le coup d’Etat était resté en détention.
Le 14 août 2013 le capitaine Amadou Haya Sanogo est nommé au grade de général de corps d’armée à titre exceptionnel, à compter du 1er août 2013. Deux semaines plus tard, le 28 aout 2013, le président Traoré abroge le décret portant nomination du général de corps d’armée, Amadou Haya Sanogo, en qualité de président du Comité militaire de suivi de la réforme des forces de défense et de sécurité.
A côté de ce contentieux entre des bérets rouges et bérets verts, la rivalité entre les putschistes eux-mêmes atteint son paroxysme, car le butin du coup d’Etat du 22 mars 2012 a été inégalement reparti. Comme annoncé un peu plus en haut, l’objectif pour la junte n’était pas le problème du nord encore moins l’amélioration des conditions de vie des militaires, mais le pouvoir, l’argent, les galons, les villas, les 4X4, les terres, etc. Au sein de la junte, trois clans rivalisent : le clan du chef de la junte, Capitaine Amadou Haya Sanogo ; celui qui a lu le premier communiqué annonçant le coup d’Etat du 22 mars 2012, le Capitaine Amadou Konaré et enfin celui du parrain du Coup d’Etat le Colonel Youssouf Traoré.
Les deux derniers camps n’ont pas apprécié le comportement léonin du capitaine « Sac à Dos » dans le partage des dividendes du Coup d’Etat (cogérance du pays avec Dioncounda, enrichissement à outrance, mine de 4×4, bombardement au grade de général, propriétés terriennes, etc.).
En outre, la gestion de la campagne électorale pour l’élection présidentielle du 28 juillet 2013 a creusé davantage le fossé entre les différents camps. Les militaires putschistes étaient divisés entre des candidats, au même moment leurs compagnons d’armes partagés entre les régions du Nord du Mali, se battaient avec courage pour la sécurisation des élections.
Et ce qui devrait arriver arriva, le clash entre les putschistes. IBK est élu à la magistrature suprême. Seulement 11 jours après son investiture populaire, le 19 septembre 2013, les putschistes se font entendre, encore de manière honteuse. Le 30 septembre 2013, ils se mutinent entre eux à Kati pour réclamer encore des galons et d’autres avantages. La suite est connue, des exactions et des disparitions. C’était la mutinerie de trop pour le Mali et le signal de la nécessité de l’avènement d’une nouvelle armée pour IBK.
Armée version IBK
Comme dit l’adage, on ne sait qu’on était heureux que quand on devient malheureux. Cette assertion sied beaucoup aux putschistes du 22 mars 2012. Depuis le 30 septembre 2013, le président IBK s’est mis dans la peau du chef suprême des armées, en mettant fin à 18 mois d’influence de la junte militaire sur le pays. A cet effet, le lundi 30 septembre, l’opération de Saniya a été lancée à Kati. Elle a permis d’arrêter des mutins et de saisir leurs armes ainsi que celles détenues à la résidence de l’ex-chef de la junte, le Général Amadou Haya Sanogo. D’autres militaires très proches du Général Sanogo seront également arrêtés.
A l’époque, le président Ibrahim Boubacar Kéita avait déclaré que Kati ne fera plus peur à Koulouba ni à Bamako. Dans cette optique, le dimanche 13 octobre 2013, l’Etat a délogé le général Sanogo et toute sa famille de son bunker de Kati, mettant ainsi fin au règne de Sanogo dans la « république de Kati», Créée depuis le 22 mars 2012.
Depuis, c’est le renouvellement de la chaine de commandement au sein de l’armée, pour l’avènement d’une nouvelle armée que le président IBK a promis et rappelé après la mutinerie du 30 septembre. Pour l’avènement de la nouvelle armée, le président Kéita a jeté son dévolu sur Soumeylou Boubèye Maïga, ministre de la défense, un fin connaisseur des arcanes militaires.
Le vendredi 8 novembre 2013, le général de division, Mahamane Touré, ancien chef de corps du Régiment des Commandos Parachutistes (RCP), a été nommé chef d’état major général des armées. Auparavant, le président Kéita avait demis le chef d’Etat major général adjoint des armées, le commandant militaire de Kati, le chef d’Etat major de la garde nationale, le directeur de la sécurité d’Etat, le directeur des écoles militaires. Le vendredi 27 décembre 2013, le dernier verrou des putschistes a sauté, avec le limogeage du directeur général de la gendarmerie, Diamou Kéita. Celui-là même qui a montré à la télé nationale les « fameuses » armes saisies entre les mains des « fameux mercenaires », après l’offensive des bérets rouges, le 30 avril 2012, sur les positions tenues par des putschistes du 22 mars 2012.
Rappelons qu’entre ces révocations, le colonel Abdina Guindo arrêté depuis le 11 juillet 2013 fut libéré le samedi 9 novembre 2013.
Le calvaire des putschistes
Dix huit, (18) jours après la libération d’Abdina Guindo, soit le mercredi 27 novembre 2013, le général Amadou Haya Sanogo fut arrêté et inculpé pour complicité d’enlèvements de personnes dans l’affaire dite des bérets rouges. Depuis l’arrestation de Sanogo, c’est le festival des découvertes des charniers contenant des corps de militaires froidement assassinés lors des événements du 30 avril 2012 et du 30 septembre 2013. Dans la nuit du 3 au 4 décembre 2013, un premier charnier de 21 corps des bérets rouges a été découvert dans une fosse commune de Diago. Le 16 décembre 2013, un autre a été découvert au cimetière d’Hamdallaye, un autre au Daral de Kati sur la route de Bèmasso, le 24 février 2014 où cinq (5) corps avaient également été exhumés. La dernière découverte fut celle du samedi 1er mars 2014, où a été exhumé un corps enfoui dans un puits dans l’enceinte d’une concession sise au quartier Malibougou de Kati d’un responsable de l’ex-CNDRE. Le dernier corps découvert serait celui du colonel Youssouf Traoré, un fidèle compagnon de Sanogo aux premières heures du coup d’Etat du 22 mars 2012.
Inculpés et arrêtés
Les Généraux Amadou Haya Sanogo ex patron de la junte, Yamoussa Camara ex ministre de la défense, Sidi Alassane Touré ex patron de la sécurité d’Etat. Le Colonel Blonkoro Samaké, ancien patron de la sécurité de Sanogo. Les Capitaines Amadou Konaré ex n°2 de la junte, Christophe Dembélé, Issa Tangara et Amassongo Dolo (tous des gardes rapprochés de Sanogo. Ont été également mis aux arrêts les sous-lieutenants Seyba Diarra, Mamadou Oulé Dembélé, Cheickna Siby, Lassina Singaré, Oumarou Sanafo, le lieutenant Dahirou Mariko, adjudant chef Fousseyni Diarra, adjudant Mamadou Koné, sergent Amara T Diarra ainsi que adjudant chef de police Siméon Kéita, sergent chef de Police Siriman de Fané, récemment rappelé à Dieu, le capitaine Drissa Coulibaly (mercenaire), etc.
Ils ont été arrêtés pour complicité d’enlèvement et de meurtre.
Inculpés mais libres
Ce sont le général Dahirou Dembélé, ancien chef d’Etat major général des armées, le colonel Diamou Kéita, ancien directeur de la gendarmerie nationale ; les lieutenants Abdoulaye Coulibaly et Boua Koné, les capitaines Adama Diarra et Mohamed Ouédraogo, l’adjudant Seydou Samaké.
Les dossiers des événements du 30 avril 2012 et du 30 septembre 2013 sont loin d’être bouclés. C’est le triste sort qui été réservé aux putschistes à l’occasion du 2ème anniversaire du coup d’état du 22 mars 2012.
Ahmadou Maïga
Source: Le Guido