« Bah N’Daw n’a rien fait depuis qu’il a prêté serment »
« Bah N’Daw n’a rien fait depuis qu’il a prêté serment », est la réponse toute trouvée par Soumeylou Boubèye Maïga, a une question du journaliste qui voulait sa voir si la première phase de la transition a permis d’avancer sur certains des dossiers principaux.
Selon lui, le Mali a « accusé beaucoup de retard dans la mise en place d’un calendrier précis sur les réformes nécessaires qui doivent permettre la conduite des élections ». Il a rappelé que lors de sa prestation de serment, Bah N’Daw s’était solennellement engagé à mettre en place le comité de suivi des conclusions du Dialogue national inclusif, qui englobait l’ensemble des réformes ayant fait consensus dans le pays. « Neuf mois après, il n’y a rien », a-t-il déclaré sans ambages. Avant d’ajouter que « nous sommes à dix mois de la fin de la transition, et on ne peut pas aussi garantir que le calendrier électoral sera respecté. Dans un pays vaste, en proie à l’insécurité, cela demande une préparation rigoureuse. Ce qui n’a pas été fait ».
Sur un tout autre registre, par rapport au responsable du clash qui a pu opposer les leaders de la transition malienne, Soumeylou Boubèye Maïga a été on ne peut être plus clair. « Nous ne comprenons pas les réelles motivations qui ont conduit à limoger Sadio Camara et Modibo Koné [ministres de la Défense et de la Sécurité dans le précédent gouvernement, mis à l’écart dans le gouvernement présenté le 24 mai] », a-t-il déclaré. Avant de préciser qu’ « ils comptent parmi les acteurs les plus importants du 18 août 2020 ». Et, d’ajouter que « Bah NDaw a fait une erreur ».
Soumeylou Boubèye Maïga se dit d’autant plus surpris que « ces deux colonels n’ont jamais été étiquetés comme étant une entrave au processus de transition ». Il a estimé que « ce limogeage les a mis en totale insécurité, puisqu’il ne faut pas oublier qu’en faisant le coup d’État du 18 août, ils ont contrarié de nombreux intérêts tant au sein de l’armée que de la société civile ». Pour cela, il a estimé que « les sortir du gouvernement revenait à les jeter en pâture à leurs adversaires ». Et, Soumeylou Boubèye Maïga est formel. « Je pense que si ce limogeage avait prospéré, il aurait mis en danger non seulement les intéressés mais aussi tous les soutiens civils qui les ont accompagnés », a-t-il déclaré.
Aussi, partant du fait que Bah N’Daw, selon lui « tirait sa légitimité des militaires », la logique aurait voulu qu’il entretienne une relation plus étroite avec eux. « Il fallait remanier le gouvernement en faisant entrer de nouvelles personnalités provenant de différentes forces politiques et sociales du pays. Mais le président pouvait le faire sans toucher aux deux colonels. En tout état de cause, les militaires sont une composante essentielle du processus de transition, puisqu’ils sont à l’origine de ce qui est arrivé le 18 août. Et qu’ils en sont les garants », a-t-il conclu.
« … La feuille de route de Moctar Ouane n’était pas tenable… »
« Nous avons toujours été un peu intrigués par l’inadéquation entre les tâches énumérées dans ce plan et la durée de la transition ». Est la déclaration que fait Soumeylou Boubèye Maïga, suite à une question du journaliste qui a voulu savoir si la feuille de route du Premier ministre Moctar Ouane, était à la hauteur.
« Pour nous, cela n’était pas tenable », a-t-il ajouté. Avant de critiquer. « Vous ne pouvez pas présenter un plan dans lequel certaines mesures demandent plusieurs années avant d’être effectives alors que la durée de votre mandat est de dix-huit mois », a-t-il fait comprendre.
Au sujet des élections, il dira que le Gouvernement Moctar Ouane était particulièrement trop ambitieux, en voulant organiser cinq scrutins en trois mois (référendum, présidentiel, législatif, communal, élections locales et régionales) dans un pays où il y a l’insécurité à tous les niveaux. Pour Boubèye Maïga, « c’était un défi impossible à relever ».
Comme pour dire que Moctar Ouane n’a pas su se donner des priorités, il a déclaré : « La transition devait identifier ses priorités et mettre en œuvre les réformes compatibles à son agenda, en laissant le soin aux futures autorités de mener celles de plus long terme, par la suite ».
Assane Koné