Ces dernières années, la Chine est devenue le principal partenaire des pays africains dans plusieurs domaines clés de leur développement. Mais du 4 au 5 décembre 2015 à Johannesburg (Afrique du Sud), la coopération sino-africaine a franchi un autre palier plus ambitieux. Accordant au continent plus de considération politico-diplomatique, la République populaire de Chine lui offre de réelles conditions d’émergence et, en retour, s’assurer des ressources de son essor économique.
C’est sans doute l’un des passages du discours du président Xi Jinping qui ont le plus retenu l’attention des dirigeants africains au Forum de la Coopération sino-africaine de Johannesburg (Afrique du Sud, du 4 au 5 décembre 2015). «L’Afrique ne devrait pas se voir dicter la façon dont elle résout ses problèmes, mais devrait plutôt être aidée pour les résoudre à la manière africaine», a plaidé le leader la seconde économie mondiale. Respect et considération ! L’Afrique en a rarement droit dans le concert des nations. Bien au contraire, elle a le plus droit au dédain et à l’arrogance de ceux qui ont en partie bâti leur prospérité socioéconomique, leur «puissance» sur l’exploitation de ses richesses, aussi bien naturelles qu’humaines.
Et pourtant, comme le rappelle si pertinemment Xi Jinping, l’Afrique est «le continent le plus prometteur et ayant le rythme de croissance le plus rapide au monde». Il le dit sans la traditionnelle démagogie diplomatique des Occidentaux en rappelant que le dynamique processus d’industrialisation et d’urbanisation de l’Afrique avait donné un «nouveau souffle à la croissance économique mondiale». L’une des caractéristiques de cette coopération a toujours été le sceau du concret, du pragmatisme.
Le président Xi Jinping n’a pas dérogé à la tradition à Johannesburg. Il a formulé une proposition en cinq points sur l’approfondissement de la «coopération gagnant-gagnant» entre la Chine et l’Afrique à la clôture de la 5e Conférence des entreprises sino-africaines. Ainsi, l’Empire du Milieu souhaite «sincèrement partager son expérience d’industrialisation» avec les pays africains et aider le continent à «progresser dans son industrialisation» en lui fournissant un appui financier et technologique et en soutenant la formation d’une main-d’œuvre qualifiée. Un essor industriel qui ne se fera pas aux dépens du respect de l’environnement car les deux parties ne cachent pas leur volonté de privilégier «un développement vert et durable».
En effet, la Chine réaffirme sa volonté d’aider ses partenaires africains à lutter contre les changements climatiques, à améliorer la protection de l’environnement et à former un personnel qualifié dans les domaines concernés. La coopération est aussi appelée à se bonifier sur un axe prioritaire pour l’Afrique : des infrastructures pour concrétiser la croissance économique en renforçant la compétitivité des industries africaines ! Pour M. Xi, la coopération entre son pays et l’Afrique dans les domaines de l’agriculture moderne, du développement vert, de la réduction de la pauvreté et de l’amélioration du bien-être de la population aidera les pays africains à «établir des modèles de développement durable, à renforcer leurs capacités de développement autonome et à améliorer la gouvernance publique et la qualité de vie de la population africaine».
Un palier «historique» franchi à Johannesburg
La Chine a réellement pris du poids (politique, économique et diplomatique) en Afrique à cause du pragmatisme dans ses interventions. À la fin de l’année 2014, les investissements cumulés chinois en Afrique ont atteint 101 milliards de dollars et bénéficié à plus de 3.100 entreprises africaines. «En 2014, nos échanges commerciaux ont atteint 221,9 milliards de dollars», a indiqué M. Xi à Johannesburg. Son pays promet 60 milliards de dollars pour faire face à l’impact du ralentissement de la croissance chinoise sur le continent, notamment l’effondrement des cours des matières premières. «La Chine a décidé d’octroyer un total de 60 milliards de dollars d’aide financière, incluant 5 milliards de prêts à taux zéro et 35 milliards de prêts à taux préférentiels», a annoncé le président Xi Jinping.
Ces 60 milliards de dollars sont destinés à financer dix programmes de coopération sur trois ans dans les domaines notamment de l’agriculture, de l’industrialisation, de la réduction de la pauvreté, de la santé, de la culture, de la sécurité, de la protection de la nature ou encore du développement vert. Le président de la République populaire de Chine s’est également engagé à effacer les «dettes gouvernementales sans intérêt déchues fin 2015» des pays africains les moins avancés. Il a aussi promis «une aide sans contrepartie à l’Union africaine (UA) de 60 millions de dollars» pour notamment financer ses opérations de maintien de la paix.
«Voici un homme qui représente un pays considéré autrefois comme pauvre, un pays qui ne nous a jamais colonisés. Il fait avec nous ce que nous attendions de ceux qui nous ont colonisés hier», a souligné Robert Mugabé, président du Zimbabwé et de l’Union africaine.
Les dirigeants chinois et africains s’étaient retrouvés dans la capitale sud-africaine pour le second Sommet du Forum sur la coopération sino-africaine (FCSA). Créé il y a 15 ans, c’est un mécanisme qui regroupe la Chine, 50 pays africains ayant établi des relations diplomatiques avec la Chine, et la Commission de l’UA. Il est en train de permettre à la Chine de damner le pion aux partenaires «traditionnels» de l’Afrique, notamment les «puissances» coloniales qui avaient réussi à faire de notre continent leur «pré-carré», leur chasse-gardée !
Moussa BOLLY (Avec Xinhua)
source : Le Reporter