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Contraception et éthique médicale : Il n’y a pas d’opposition

La contraception pose beaucoup de problèmes aux religieux, qui, en dehors de l’abstinence, réfutent les autres méthodes. Cependant, qu’est-ce que l’éthique médicale permet et interdit en matière de contraception ? Que dit la loi ?

 

Les méthodes contraceptives sont des moyens mis en place pour réguler les naissances. La loi 02–044 du 24 juin 2002 autorise toutes les femmes, célibataires ou mariées, à opter pour une méthode de contraception de son choix sauf les méthodes irréversibles que sont la vasectomie et la ligature des trompes.

Mais cette contraception pose énormément de problèmes aux religieux pour qui, hormis l’abstinence, condamnent formellement toute autre méthode.

Pour Mohamed Cherif Haïdara, maître coranique, « l’islam interdit formellement qu’une femme, même mariée, recourt à une méthode contraceptive pour distancer les naissances. Dans le saint Coran, Dieu dit de nous multiplier, de remplir la terre pour qu’il y ait plus de fidèles pour le vénérer. Déjà si on met des barrières, on va à l’encontre du dessein de Dieu relevé dans le Coran. Il n’y a qu’une seule loi dans ce monde, c’est celle de Dieu. »

M. K., iman « la religion autorise la contraception aux couples, c’est-à-dire aux femmes et hommes mariés. Pour la femme non mariée, ça, il n’y a pas de débat. Elle ne doit pas avoir un rapport sexuel avant son mariage. Donc l’abstinence totale et c’est la raison pour laquelle on demande à la femme et à la fille non mariée de jeûner quand le corps réclame l’envie sexuelle», a-t-il expliqué.

Maïmouna Sanogo, ménagère après avoir été informée de toutes les méthodes de contraception a opté pour cette dernière. « Après mon deuxième accouchement, le médecin m’a fait savoir que le prochain accouchement sera compliqué. J’ai informé mon mari, qui est un grand marabout et il n’a pas posé de problème en me disant que nous sommes mariés et que la religion ne condamne pas. Ainsi j’ai opté pour la méthode jadelle. Jusqu’ici je n’ai jamais eu de difficultés avec ça. »

Fanta Cissé, activiste en SR et Présidente de l’Action pour le conseil et l’orientation, « ce n’est pas la contraception en tant que telle qui pose un problème aux religieux, mais le fait que les filles célibataires aient recours à ces contraceptions. Pour les religieux,  tant qu’une fille n’est pas mariée, elle n’a pas droit à une méthode contraceptive. Très généralement, les associations religieuses qui défendent les droits humains et luttent contre les violences basées sur les genres mettent l’accent sur les couples mariés légalement. Parce que la religion n’est pas d’accord avec la fornication, c’est la raison pour laquelle ils mettent l’accent sur les couples. Mais quand on prend la loi 02-044 / du 24 juin 2002 elle confère à toutes les femmes sans exception d’utiliser une méthode contraceptive de leur choix, qui ne sont pas contraires à la loi. L’éthique médicale dit accepter les méthodes permanentes pour toute personne qui vient pour opter pour une méthode de contraception de la planification familiale et tant que cette dernière a atteint l’âge de la puberté, elle a le droit de bénéficier d’une méthode de contraception. »

De l’AMPPF en passant par les centres de planification familiale de Magnambougou, Sogoninko on nous explique que la loi 02–044 garantie à toutes les femmes, jeunes et adolescents de choisir une méthode contraceptive de leur choix hormis les méthodes irréversibles (vasectomie et la ligature des trompes). « La loi et l’éthique dit que les méthodes de contraception ne sont pas faites uniquement pour les femmes mariées, mais toute personne qui est active sexuellement, qui risque de contracter une grossesse sans le vouloir », a fait savoir Djénéba Tessougué.

Dr. Mamou Sidibé, sage-femme et spécialiste en contraception et éthique : « l’éthique médicale travaille avec la loi 02–044 /du 24 juin 2002 qui explique en détail ce qui est permis ou interdit en matière de contraception. La loi dit que toutes les méthodes sont propres ainsi pour les non mariés mais aussi les couples qui sont mariés selon leur choix. L’agent de santé qui doit pratiquer une méthode à un prestataire doit faire recours à des moyens ou méthodes approuvés par l’autorité publique qui est autorisée sur l’ensemble du territoire national en aucun cas ce dernier ne doit faire le contraire. Au préalable cette même loi nous dit qu’il est interdit qu’un agent de santé en dehors de méthode contraceptive qui ne demande pas une autorisation express n’a pas droit d’appliquer la méthode irréversible sans au préalable avoir le consentement écrit de la femme non mariée et pour la personne mariée, l’accord de son conjoint est obligatoire », a-t-elle dit.

 

La protection de la loi

Selon Dr. Awa Guindo, spécialiste des méthodes contraceptives de l’Office national de la Santé et de la Reproduction, la contraception en tant que telle ne pose pas un problème aux religieux comme bon nombre le prétendaient. « Nous avons des religieux prêcheurs, qui prêchent en faveur de la planification familiale et des méthodes contraceptives. Nous avons aussi des religieux qui ont élaboré des documents qu’on appelle document des modèles rapides pour informer et sensibiliser la population par rapport à l’utilisation des méthodes de planification familiale. Il y a même des religieux champions. Seulement les religieux ne veulent pas des contraceptions chez les jeunes adolescents parce que pour eux ça favorise l’adultère. Les religieux ont un problème avec les cibles.

Quant à l’éthique médicale, notre spécialiste nous fait savoir que la loi et l’éthique médicale vont ensemble. « Dans ce cas de figure  la loi 02-044 / du 24 juin 2002 qui régit tout. Et cette loi n’est pas uniquement dédiée à la contraception, mais à la santé de la reproduction en général. Parce que celui qui parle de la santé de la reproduction parle forcément de la planification familiale mais aussi de la contraception qui est l’espacement des naissances. Cette loi parle de la contraception, elle donne aussi droit à la vie et à la santé. Si cette femme a droit à la vie et à la santé, elle a le droit aussi d’opter pour une planification familiale pour espacer les naissances et amener une vie harmonieuse et garantir sa santé, celui de son enfant et l’ensemble de sa famille. Une meilleure contraception garantit la santé de toute la nation à travers la santé de la mère, de l’enfant et de l’adolescent. La loi ne fait pas la différence. Toute vie est importante que ça soit la vie d’un jeune garçon, d’une jeune fille et d’une femme en couple et aussi d’une femme non mariée. La loi est en faveur de tout le monde. La loi protège non seulement la jeune fille qui a des problèmes en matière de santé. Si cette jeune fille se présente dans un centre de santé, le prestataire a le devoir de répondre à ses besoins pour sauver la vie de cette jeune fille. En plus de cela la femme qui est dans un foyer, même si son mari ne veut pas quand cette femme se déplace pour aller voir un prestataire dans un centre de santé, le prestataire a le devoir de répondre aux besoins de la femme parce que c’est un droit pour cette femme. En d’autres termes, la loi est en faveur de la contraception », conclut-t-elle.

 

Ousmane Mahamane

Ce reportage est publié avec le soutien de JDH et FIT en partenariat avec WILDAF et la Coalition des OSC-PF.

Source : Mali Tribune

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