Minimiser au départ par le pouvoir nigérian, qui misait visiblement sur un étouffement progressif, Boko Haram s’est bien enraciné dans le nord-est du Nigéria pour devenir la plus grande source d’instabilité pour la bande sahélo-saharienne. En dehors bien sûr du foyer libyen. Sa montée en puissance doit préoccuper les autorités maliennes à cause de sa connexion avec le Mujao et Aqmi au nord du pays.
Minimiser au départ par le pouvoir nigérian, qui misait visiblement sur un étouffement progressif, Boko Haram s’est bien enraciné dans le nord-est du Nigéria pour devenir la plus grande source d’instabilité pour la bande sahélo-saharienne. En dehors bien sûr du foyer libyen. Sa montée en puissance doit préoccuper les autorités maliennes à cause de sa connexion avec le Mujao et Aqmi au nord du pays.
«Nous sommes profondément horrifiés par la tragédie que Boko Haram continue d’infliger à nos populations. Kidnapper des jeunes filles dans les écoles, brûler des villages, terroriser des communautés entières et les tuer. Nous devrions tous déclarer cet état de fait comme inacceptable» ! C’est le coup de gueule de la présidente de la Commission de l’Union africaine (Ua), Mme Nkosazana Dlamini-Zuma. C’était à l’occasion de l’ouverture du conseil des ministres de l’Ua en prélude au sommet des chefs d’Etat tenu les 30 et 31 janvier 2015 à Addis-Abeba.
La sud-africaine souhaite une action commune pour enrayer une menace devenue régionale. « A l’origine, cela semblait être un groupe avec un impact purement local. Maintenant, on le voit s’aventurer de plus en plus loin en Afrique de l’ouest et du centre…» !
Aujourd’hui, l’Union africaine et les Nations unies n’ont plus le choix face à ce péril sociopolitique et économique. Elles vont devoir s’engager dans la lutte ! N’en déplaisent à Abuja. En effet, en pleine campagne électorale, une telle mobilisation générale n’est pas du goût du président Goodluck Jonathan car synonyme de son échec face au groupe terroriste.
Malheureusement pour lui, la menace d’instabilité voire de tragédie humaine que représente Boko Haram va au-delà du Nigéria. C’est la sécurité et la stabilité politique et économique de toute la bande sahélo-saharienne voire de toute l’Afrique qui est aujourd’hui en jeu.
Il est par exemple utopique de vouloir neutraliser le terrorisme dans le nord du Mali sans anéantir ses sources de financements. Et ce n’est en fait qu’un secret de polichinelle qu’il y a une connexion entre Boko Haram et des réseaux sahéliens comme AQMI et le Mujao qui écument le septentrion malien.
La présidente de la Commission de l’UA a donc raison de rappeler qu’on ne «doit pas voir le problème Boko Haram comme une seule menace pour le Nigeria et ses voisins. Si celle-ci n’est pas jugulée, nous serons tous en danger».
Un avis partagé par Ban Ki-moon qui dénonce «la brutalité sans nom» des miliciens de Boko Haram et estime qu’il faut une «coopération régionale et internationale» pour lutter contre cette organisation criminelle.
Boko Haram-Mujao-Aqmi : une connexion dangereuse pour le Mali
«Boko Haram est aujourd’hui une menace pour une grande partie de l’Afrique subsaharienne. Et il a toujours eu des connexions avec Aqmi et surtout avec le Mujao (Mouvement pour l’unicité et le jihad en Afrique de l’ouest) dont Gao est le principal sanctuaire depuis 2012», s’inquiète un jeune leader très actif dans les mouvements de défense de la Cité des Askia (Gao) pendant l’occupation Jihadiste. Une crainte partagée par d’autres leaders communautaires et des responsables d’Ong qui ne souhaitent pas ouvertement s’exprimer sur la question pour des «raisons de sécurité».
Même s’il ne les a pas ouvertement revendiqués, les récentes attaques contre les forces de la Minusma dans la région de Gao, notamment contre le contingent nigérien, sont imputés au Mujao par des experts militaires.
«Le Mujao a été très affaibli par l’opération Serval, mais il n’a pas été totalement anéanti parce qu’il est en connexion avec Boko Haram qui lui fournit non seulement des combattants, mais aussi les moyens logistiques», souligne un officier et ex-agent des services de renseignement maliens.
Un avis partagé par de nombreux experts des questions de sécurité dans la bande sahélo-saharienne. «Il y a beaucoup de similitudes entre les attaques contre le contingent nigérien ainsi que les récentes opérations contre l’armée malienne à Nampala et à Ténenkou. Comme Boko Haram, ces assaillants se déplacent à motos pour perpétrer leurs attentats ou préparer les attaques», nous explique l’un d’eux.
«Une stratégie qui leur permet non seulement d’échapper à la surveillance aérienne, mais aussi de s’infiltrer dans les villes sans éveiller des soupçons. C’est ainsi qu’ils ont réussi à surprendre nos soldats à Nampala et à Ténenkou», poursuit-il.
On sait que, en 2012, des éléments de Boko Haram ont combattu aux côtés du Mujao qui disposait de 100 à 200 combattants à Gao. En janvier 2013, des hommes de l’organisation nigériane ont aussi participé à la bataille de Konna contre les forces armées maliennes et les soldats français de l’Opération Serval. En mars 2013, dans une étude pour Al Arabiya Institute for Studies, l’académicienne tunisienne Alaya Allani écrivait que le MUJAO comptait environ 1 000 combattants qui se composaient en partie d’éléments étrangers, dont 300 membres du Polisario et 200 hommes de Boko Haram.
Aujourd’hui, analyse l’officier de la S.E, la montée en puissance de cette organisation terroriste a donc de quoi inquiéter au Mali. «Récemment, des assaillants avaient tenté d’enlever des enfants dans plusieurs localités du nord du pays, comme le fait Boko Haram au Nigeria. Heureusement que la présence des groupes d’auto-défense ne leur facilite pas la tâche dans cette région», indique l’ancien officier de la S.E.
Pis, poursuit cet ex-agent des services secrets maliens, «les contingents nigériens (Ansongo) et tchadiens (Aguelhok) sont aujourd’hui indispensables à la Minusma. Ces deux pays sont plus que jamais menacés de nos jours par Boko Haram à leurs frontières avec le Nigeria».
La stratégie vise sans doute à les occuper plus sur leurs propres territoires. Cela peut les affaiblir au Mali où ils rappelleront sans doute leurs éléments les plus aguerris. Sans compter que les alliés de Boko Haram, comme le Mujao, peuvent aussi bénéficier de cette montée en puissance en termes de financement et de moyens logistiques.
Ce qui expliquerait sans doute la multiplication des attentats contre la Minusma et des attaques contre l’armée malienne.
Avec l’offensive militaire antiterroriste en engagée au nord du Mali par les forces onusiennes (Minusma) et françaises (Serval puis Barkhane), de nombreuses organisations terroristes comme Aqmi, Mujao et Boko Haram se sont davantage rapprochés pour ne pas être anéanties.
Les services de renseignement des pays du Sahel, notamment ceux de l’Algérie, ont toujours établi des relations très étroites entre Boko Haram, Aqmi et le Mujao.
Raison de plus pour que les Nations unies appuient l’UA dans la formation d’une force panafricaine contre ces illuminés nigérians ! C’est l’une des conditions sine qua non de la réussite des missions assignées à la Minusma !
Moussa Bolly
SOURCE : LE MATIN