Depuis 2009, l’Etat se fait appuyer par des organisations de la société civile particulièrement pour le règlement des conflits qui opposent les communautés dans le pays dogon. Force est de reconnaître que toutes ces missions de réconciliation ont réalisé des résultats médiocres parce que les conflits ont toujours repris dès le départ des délégations. Il y a donc lieu de se poser la question suivante : Pourquoi les missions successives de réconciliation furent des échecs ?
Primo, une mission de réconciliation n’est pas une promenade de santé dans son jardin. Il s’agit d’aller convaincre les populations qui ont été victimes d’un conflit (des gens qui ont perdu des biens et des vies) afin qu’elles pardonnent et redeviennent des acteurs de la paix. Dans une mission pareille, l’influence des individus et celle des organisations comptent pour que les belligérants acceptent de faire des compromis. Or, dans le cas de nos missions successives de réconciliation, l’Etat a exclusivement misé sur des associations (en perte de représentativités), des hauts fonctionnaires et grands opérateurs économiques (n’ayant de personnalité pour certain) pour donner un éclat particulier à ses activités de réconciliation sur le terrain.
Interrogés, plusieurs notables ont exprimé leur stupéfaction de ne pas trouver des personnalités représentatives dans la mission. En réalité, la plupart des personnes qualifiées de grand à Bamako, ne le sont pas dans les terroirs et leurs paroles n’influencent personne.
Secundo, l’approche de règlement qui consiste à dire : « Nous ne sommes pas venus pour savoir qui a tort et qui a raison, mais nous sommes venus vous dire de faire la paix. » En fait, une réconciliation est tout un processus avec des étapes clairement définies. Mais aucune de nos missions de réconciliation ne s’est donnée le temps de faire un diagnostic du problème pour savoir qui a commencé et qui a raison et qui a tort. Sans cela, aucune vérité sociale ne peut être établie et pas possible de procéder au pansement des frustrations. C’est pourquoi, dès leurs départs, les protagonistes reprennent leurs actions. Plus écœurant, les légitimités traditionnelles sont systématiquement exclues des missions de paix. Ni les Hogons , ni les grandes familles de marabouts encore moins les familles de chefs de cantons ne sont impliqués. Dans ce cas, quelle assise sociale et légitime peut avoir une telle mission?
En troisième lieu, il y a des personnes à Bamako, animées de mauvaises foi qui tirent les ficelles depuis Bamako parce qu’elles trouveraient leurs comptes dans ce désordre. L’Etat ne s’est jamais donné les moyens pour débusquer ces malfrats aux cols blancs et les mettre hors d’état de nuire.
Enfin le manque de suivi est le plus gros mal que nos missions de réconciliation connaissent. Une fois revenus à Bamako, ni les autorités ni les missionnaires, ne s’efforcent de donner une suite. La plupart du temps, ce sont les manques de moyens qui sont évoqués.
Cette analyse aboutissant à des critiques est faite pour améliorer le dispositif de recherche de paix et de réconciliation dans le pays dogon. Nous l’espérons constructive.
Adama Diongo, Président Dogon Vision
Source: Le Pays