Le Bureau du Vérificateur général (BVG) a rendu public son rapport de vérification de performance sur la gestion de la Compagnie malienne des Textiles (COMATEX) pour la période allant du 1er avril 2023 au 16 août 2024. Ce document fait constater plusieurs faiblesses structurelles et organisationnelles qui freinent la relance de cette industrie clé pour l’économie malienne.
Créée en 1968, la COMATEX, fierté industrielle de Ségou et du Mali dans son ensemble, est aujourd’hui entièrement détenue par l’État malien. Malgré un appui financier de 922 millions de FCFA en 2023, à l’occasion de sa relance après trois ans d’arrêt de travail, elle peine à retrouver son souffle. Le rapport révèle que « l’exercice 2023 s’est soldé par une perte de plus de 300 millions de FCFA » tandis que la consommation énergétique absorbe plus de 80 % des charges décaissables.
Un Conseil d’administration inefficace
Le rapport souligne un sérieux dysfonctionnement dans la gouvernance : « Le Conseil d’administration ne fonctionne pas efficacement en matière de prise de décisions ». Sur les cinq sessions tenues durant la période sous revue, seuls deux procès-verbaux ont été adoptés. En outre, les états financiers de 2023 n’étaient toujours pas validés au 2 septembre 2024, soit au-delà du délai réglementaire de six mois.
L’organisation interne souffre également d’irrégularités. Des postes clés ont été supprimés ou fusionnés sans validation du Conseil d’administration. À titre d’exemple, « le chef du service audit cumule deux fonctions incompatibles : l’audit et la planification ». Ces dérives, selon les experts du BVG, compromettent la répartition optimale des tâches et nuisent à la performance globale de l’entreprise.
Un outil de production vétuste
Le Bureau de Samba Alhamdou Baby met aussi le doigt sur des pratiques d’approvisionnement peu orthodoxes. Il note que « 15 opérations d’achats de carburant ont été effectuées sans expression préalable des besoins des services utilisateurs ». Pire encore, sur 30 achats analysés, aucun n’a été soumis à une mise en concurrence, violant ainsi les principes de transparence et de bonne gestion des ressources.
La vétusté des équipements est un autre point noir. Les ateliers fonctionnent avec des machines obsolètes, certaines datant de 1966. Les quatre groupes électrogènes sont hors service depuis 1995, et le système de ventilation est à l’agonie. En 2023, la COMATEX n’a réalisé que 59,43 % de sa production prévue, soit 1 277 675 mètres de tissus sur une cible de 2 150 000.
Des recommandations pour sauver la COMATEX
Face à ces constats alarmants, le BVG a formulé plusieurs recommandations :
- Au Conseil d’administration : adopter rapidement les procès-verbaux en retard et valider l’organigramme.
- Au directeur général : établir un plan annuel de performance et formaliser les procédures d’achats.
- Au ministre de l’Industrie et du Commerce : allouer les ressources nécessaires à la rénovation des équipements vétustes.
Malgré les failles relevées, les experts du BVG reconnaissent que la COMATEX, grâce au soutien de l’État, affiche des « résultats fort appréciables au niveau de la production ». Toutefois, une restructuration urgente est indispensable pour que cette entreprise retrouve sa place de fleuron de l’industrie textile malienne.
Alassane Diarra