Le Mali, théâtre des attaques terroristes contre les forces armées maliennes, les casques bleus, Barkhane, les forces conjointes du G5 Sahel, et les populations civiles. Ni le Mali martyrisé depuis 2012, ni ses amis venus au chevet ne sont épargnés par des ennemis mal identifiés, qui s’attèlent méthodiquement à rendre des localités et régions maliennes ingouvernables une à une. C’est la nébuleuse ! Le réseau de « vases communicants » – entre ceux qui ont revendiqué à un moment donné, le statut de rebelles et des groupes terroristes – leur ayant permis de prendre le contrôle des régions du nord du Mali, a vécu ; mais si la signature de l’accord de paix en 2015 devrait permettre de faire le deuil des groupes armés signataires, la réalité est tout autre. A qui profite ledit accord de paix, si sa signature n’a pas permis d’accéder à la paix sur le territoire malien, mais au contraire, a été suivie d’une exacerbation de la crise sécuritaire qui s’est propagée, tel un orage couvrant le nord, le centre et le sud du pays ?
Tel un rouleau compresseur, la terreur frappe les camps de Boulkéssi et de Mondoro, après que ceux de Nampala, Dioura et Guiré aient été tour à tour la cible d’un déluge de feu. Ces évènements malheureux arrachent des mots de désolation au chef suprême des armées, et en rajoutent à la liste des promesses non tenues du Président de la République. «Dioura la martyrisée, Dioura la torturée, Dioura l’agressée, Dioura la violentée, Dioura la surprise. Que non ! Que ce ne soit plus le cas, que nous ne soyons plus surpris nulle part ! Messieurs les chefs militaires, je vous y engage instamment, en le nom de la patrie, nous sommes en guerre, aucune négligence ne saurait plus être tolérée, en tout cas, je ne la tolérerai pas, pour la vie de nos enfants, pour celle de la patrie », s’était indigné le Président IBK. Et les mêmes causes produisent les mêmes effets.
Le rapport de ces attaques et l’accord de paix d’Alger, n’est autre qu’elles persistent à vous assener la preuve que ledit accord ne doit plus rien dire aux partisans de l’intégrité territoriale du Mali, de la paix et la sécurité au Mali. Pour certains d’ailleurs, il n’y a jamais eu d’accord à Alger, le gouvernement malien étant retournés avec plusieurs projets d’amendements sans obtenir leur prise en compte. Parviendra-t-on jamais à mettre en œuvre l’accord issu du processus d’Alger ? Le processus de paix qui s’y adosse, fait de la réalisation de l’armée reconstituée, une condition pour le retour du Mali souverain dans certaines localités du nord, notamment Kidal. Or l’horizon de la mise en œuvre du Mécanisme opérationnel de coordination (MOC) demeure sombre, depuis l’attentat du camp du MOC à Gao en janvier 2017 et l’enlèvement de 22 éléments ex-combattants des groupes armés après leur formation à Bafo.
Les groupes signataires deviennent de plus en plus des acteurs non déterminants dans la jungle de l’insécurité, à moins que leurs liens avec le terrorisme ne soient établis. Aujourd’hui la terreur djihadiste, s’est exportée devenant une préoccupation des voisins du Niger, du Burkina Faso, mais aussi du Tchad. Elle est devenue une menace pour la Côte d’’Ivoire et le Sénégal. C’est la sous région et tout le Sahel qui connaissent le fléau de l’extrémisme violent des acteurs de la terreur : Alqaïda au maghreb islamique, Boko Haram, État islamique dans le grand Sahara et leurs groupes affiliés. Ils utilisent tous les moyens de terreur pour faire des victimes et rendre les régions ingouvernables, adaptant celles-ci aux conditions des trafics de drogues et des armes et le trafic humain.
Dans ce contexte, les groupes signataires de l’accord d’Alger, à moins d’être dans ces mêmes connexions mafieuses, ne détiennent pas la clé de la paix dans la région Afrique de l’Ouest et du centre, et dans le Sahel. Si tel est le cas, faut-il s’attarder sur la mise en œuvre d’un accord qui met les parties en désaccord ? L’accord de paix issu du processus d’Alger est dépassé et caduc au vu de la réalité sur le terrain, qui dépasse le seul cadre du Mali. Il est temps que le gouvernement malien, les groupes armés et la communauté internationale se rendent à l’évidence. Donner la priorité à la lutte anti-terroriste en dépassant le seul cadre national du Mali, pour élargir le champ du G5 Sahel aux pays de la CEDEAO est une piste à explorer sérieusement. Les responsables des groupes armés signataires vivent tranquillement à Bamako, sans inquiétude ; a-t-on besoin d’une armée reconstituée pour permettre aux autorités maliennes de venir en terre malienne de Kidal ? Le Président du Niger Mahamadou Issoufou ne mâche pas ses mots sur la question : « Le statut de Kidal est une menace pour la sécurité intérieure du Niger. Et en plus, nous constatons, avec beaucoup de regrets, qu’il y a des mouvements signataires des accords de paix d’Alger qui ont une position ambigüe et qu’il y a des mouvements signataires des accords de paix d’Alger qui sont de connivence avec les terroristes. Nous ne pouvons plus l’admettre».
Les ex-rebelles signataires de l’accord, peuvent bien vadrouiller, pavaner dans la capitale, Bamako, pendant que les hautes autorités maliennes sont interdites de fouler le sol kidalois du Mali. Dès lors que sa mise en œuvre ne permet de voir aucune évolution positive dans l’exercice de la souveraineté de l’Etat malien sur l’ensemble du territoire, on doit s’interroger sur la logique qui préside un tel accord. Plus de quatre ans après sa signature, son évaluation ne laisse aucune perspective heureuse pour le peuple malien au nom duquel le gouvernement agit. L’insécurité est plus que jamais grandissante et les populations plus que jamais désœuvrées au nord comme au centre, au sud et partout au Mali. Qui est à la manœuvre pour ce dessein malsain de désunir, démanteler et démembrer le grand Mali ? Qui, le Mali stable et havre de paix, stable et fier, gène-t-il dans le concert des Nations, pour qu’on puisse décider de son morcellement et de son lotissement, comme c’est le cas actuellement ?
B. Daou
Le Républicain