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Chronique : A la table du Roi

« Pour la construction de ce pays, tout le monde est la bienvenue », déclarait le président Ibrahim Boubacar Keita. Y compris les ennemis de la nation, invités à diner au palais de Koulouba. Les formules standard véhiculées au sommet de l’État prouvent en réalité que nos autorités manquent de clairvoyance dans les choix stratégiques. On ne gouverne pas par standardisation de stratégie un pays comme le Mali, à une période particulière de son histoire. En invitant tout le monde, le Président IBK, a aussi invité n’importe qui. Or, si l’on se privait de ces nombreux n’importe qui qui s’autorisent à gérer la vie de la République, le Mali serait dans une bien confortable position.

 

La situation sécuritaire explosive et particulièrement incertaine, ne connait même pas un début de solutions, ni militaire, ni politique ni social. Que du tâtonnement. Un ballet désordonné dont l’écho retentit dans les hautes montagnes de Koulouba. Des lépreux tâtonneurs ont pris en otage le président de la République. Ces lépreux, incapables de traire la vache, sont potentiellement nuisibles, capables de renverser la calebasse qui contient le lait.

Des galeux, qui répandent dans nos contrées, un discours puant d’égoïsme. Ces hommes, jadis des intellectuels, autrefois critiques acerbes et vigilants défenseurs du peuple, se sont convolés en noces avec le régime. C’est la ‘’koitanisation’’, un nouveau concept d’hommes politique de tout acabit, dont le seul principe est de s’asseoir sur la table du maitre, avalant gloutonnement, rotant allègrement, et organisant de luxueux voyages à l’étranger.

Qu’ils appartiennent à l’opposition, au parti au pouvoir, à la société civile ou à des associations religieuses, ils forment le lot des béni oui oui de la politique actuelle du président IBK. Une politique dont on sait qu’elle s’engouffre dans le chaos, au risque d’entrainer le pays entier dans une chute inévitable, depuis les collines escarpées de Koulouba. Plaise à Dieu que la végétation abondante, en cette saison des pluies, amortisse le choc… Nos autorités ont l’obligation de pondre des solutions efficaces afin d’écourter les souffrances de ces millions de jeunes et femmes qui n’ont pas choisi de naitre sur la terre de leurs aïeux. Dans le cas contraire, le réveil sera douloureux pour les vendeurs d’illusions de la République, qui ont trompé le peuple pour se hisser au sommet de l’État, alors qu’ils n’avaient aucune solution prospère.

Comment peut-on restaurer l’autorité de l’État dans son ensemble, quand le chef de l’État lui-même, manque d’autorité, allant jusqu’à ‘’trainer’’ les symboles d’un État qui se veut laïc, à terre, selon les termes d’un journal de la place. Pardon, à Nioro pourrait-on dire ! Où est donc cette laïcité si chèrement acquise, nourrie du sang des martyrs ? Ne nous y trompons point : il n’y a pas d’autorité dans le copinage. Il n’y a plus d’autorité lorsque l’amitié et les valeurs républicaines sont confondues entre les mains d’un homme d’État. Le copinage politique aboutit aux scandales financiers et aux détournements de deniers publics. En voulant faire «la politique autrement », l’idéologie affichée par IBK dans son discours du 30 juin 2001 est devenue le fourre-tout d’une gouvernance avec des hommes et femmes sans visions, affamés les uns plus que les autres. Dans ce malaise politique, IBK va-t-il redresser la pente ? On le sait âgé. On le sait surtout éloigné de son parti et de ses cadres. Preuve de l’incapacité du président IBK à tenir le gouvernail de la nation, il s’en remet à Dieu. Et peut-être aussi, à ses valets locaux, déguisés en guides religieux, ministres, conseillers… Dans ce cafouillage présidentiel, IBK préfère donc remettre les clés de la nation « entre les mains de Dieu ».

Quand un président n’a plus de solutions pour son peuple, il s’en remet à Dieu pour justifier son incapacité à assumer le bonheur de tous. Il devient alors de porte-étendard des intérêts claniques, familiaux et amicaux. Le fils, tel le père, sans vision, préférant s’attaquer à des hommes de médias plutôt que de trouver des réponses aux questions fondamentales de la nation. Quand un député se préoccupe plus des richesses matérielles et financières, quand un député se préoccupe plus de son image que de la survie de son armée, il navigue à vue. Il n’a plus rien à proposer aux électeurs, puisqu’il s’est vidé de sa sève.

Quand un régime est incompétent, il fait appel à tout le monde. Puis ça devient la guerre des torpilles. IBK torpille son adversaire politique, Soumaila Cissé. Tiébilé Dramé, lui-même ne se retrouve pas dans ces scénarios de torpillages. On ne gouverne pas une grande nation avec des sentiments personnels, ni avec des émotions en semant la division par le pouvoir corrupteur de l’argent. Messieurs les représentants de l’autorité de l’État, vous avez assez dormi, il est temps de vous réveiller. La nation est en péril. Votre propre avenir n’est rien considéré au devenir de millions de Maliens.

Les prérogatives qu’offre une nation, en des moments tragiques de son histoire, ne seraient nullement comparables à une camisole usée, que le chef de l’État peut recoudre à souhait, en croyant qu’il effectuerait la magie de recoudre le tissu social. On ne bricole pas l’avenir des enfants des pauvres. On ne compromet pas impunément l’avenir des enfants des sans avenir. Le Mali risque encore de s’enfoncer dans le gouffre si son président persiste et signe sur la voie qu’il s’est choisi. La nation est en laisse-guidon, déferlant les pentes escarpées de Koulouba, en attendant la chute, imminente. Comme un château de cartes, la table du roi risque l’écroulement. Tant pis pour les invités qui croyaient souper éternellement…

Henri Levent

Source : Le Pays

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