Le nouveau PM n’était pas seulement le président du Comité Stratégique du M5-RFP, puisqu’il est aussi et avant tout, le président-fondateur du Mouvement Patriotique pour le Renouveau (MPR), un parti né sur les cendres de l’Union Démocratique du Peuple Malien (UDPM), l’ex-parti unique. Qui a été emporté, avec le président Moussa Traoré, par l’insurrection populaire de Mars 1991. Choguel Kokalla Maïga est demeuré ce combattant politique qui a pu résister vaillamment face aux acteurs politiques du Mouvement démocratique. Lesquels ont dominé le pouvoir politique pendant deux décennies.
Sa conviction à défendre ses idées et son obstination lui ont permis de se maintenir sur la scène politique malienne. Entre fin des années 90 et début 2000, il est devenu fréquentable par certains cadres du mouvement démocratique. Dont l’ancien PM d’Alpha Oumar Konaré, Ibrahim Boubacar Keita. Mais Choguel ne devient pas ministre d’IBK.
Ingénieur en télécommunications, il a été un élève puis un étudiant très brillant. Car, il obtient son Doctorat avec la mention Honorable. Originaire du nord du Mali, Choguel, il y effectue ses études primaires mais il poursuit ses études secondaires dans les années 1970 au lycée technique de Bamako. D’où il décroche son Baccalauréat série technique avec option « mathématiques et techniques industrielles » (MTI) en tant que major de sa promotion. Il poursuit ses études supérieures en ex-Union des républiques socialistes soviétiques (URSS).
La récompense de 30 ans de lutte politique
Ce lundi 7 juin 2021, un peu plus de trente ans après l’insurrection de mars 1991, Choguel accède in fine à la primature. C’est certainement la récompense de ses 30 ans de lutte politique. Dont le parcours était plein d’embûches. En 1997, il boycotte les élections présidentielles et législatives. En 2002, pour la première fois, il est candidat à une élection présidentielle. Il n’obtiendra pas le remboursement de sa caution, ayant obtenu un score inférieur à 5 % des suffrages exprimés. Au second tour, il appelle à voter pour le général Amadou Toumani Touré qui succède à Alpha Oumar Konaré.
Au cours des cinq premières années de l’ère IBK, Choguel Maïga se retrouve politiquement sur un chemin étriqué. Son parti n’a que cinq députés sur les 147 que compte l’hémicycle en 2002. Mais, il en aura huit en 2007. Il ne se décourage pas, puisque, homme de compromis, il parvient à nouer des alliances avec des partis du Mouvement démocratique. Cela permit à Choguel de devenir ministre de l’Industrie et du Commerce de 2002 à 2004 sous ATT. En 2015, il revient au gouvernement, comme ministre de l’Économie numérique et de la Communication sous IBK.
Président du Comité Stratégique du M5-RFP
Toutefois, Choguel redevient un opposant farouche du régime IBK. Il fonde, avec des ténors de partis politiques et de la Société civile, le Mouvement du 05Juin-Rassemblement des Forces Patriotiques (M5-RFP). Ce mouvement hétéroclite a été à la base de la chute de l’ex-président IBK. Et Choguel en était le président du Comité Stratégique. Il connut la garde-à-vue. Dans un rapport, la gendarmerie où il était détenu précise : « Monsieur Maïga n’avait pas du tout l’air affecté par la détention. […] Il recevait des appels téléphoniques d’un peu partout. ».
Au sein du M5-RFP, Choguel Maïga s’impose comme « la voix » de la contestation. Porte-parole du mouvement, c’est lui qui communiquait à la presse. À la chute de l’ancien président malien IBK, le 18 août 2020, le M5-RFP et le président de son Comité stratégique en tête – ont cru devoir gouverner avec les militaires du CNSP. Mais ces derniers et l’Imam Dicko, « la caution morale » de leur mouvement, les driblèrent. L’homme continue de s’opposer, pendant les neufs (9) mois que dure la première phase de la Transition. Il continue de critiquer les orientations des Autorités, tout en faisant des propositions afin que la Transition n’échoue pas. Cela fait qu’il garde des contacts avec la junte qui détient la réalité du pouvoir transitionnel.
Son obstination finit par payer
A cause des contradictions internes au sein de l’exécutif transitionnel, le col Assimi Goïta, vice-président de la Transition, est contraint de démettre le président de la Transition, Bah N’Daw et son Premier ministre. Il n’a plus d’autre choix que de nouer une alliance objective avec le M5-RFP dont il va charger son président du Comité Stratégique pour diriger la primature. Désormais, le camp du colonel Assimi Goïta et celui de Choguel Maïga sont des alliés. L’obstination de Choguel finit par payer.
Falaye Keïta