Fin avril 2023. Un avion quitte La Mecque pour Abidjan. Le vol a du retard. Deux passagers remarquent un homme à la tête rasée, les yeux chaussés de lunettes, un teint noir d’ébène. La discussion s’engage. L’un avance : “Ça c’est Cessé Komé”. Le second passager est plus réservé : “Non c’est un ministre ivoirien”… Quelques instants après, un troisième passager tranche : “C’est bien Komé. Il est tellement simple et discret…”
Simplicité et discrétion… Deux mots qui définissent bien l’homme. Une légende rapporte que ce ressortissant malien a commencé à gagner sa vie comme cireur de chaussures. Des informations qu’il a confirmées lors de son passage à Bamako ce week-end. L’homme fortuné d’aujourd’hui l’a déclaré à la jeunesse et aux étudiants comme s’il voulait secouer le cocotier, comme s’il voulait tirer la jeunesse malienne de sa torpeur :
“Mes très chers jeunes Maliens, ce que j’ai à vous dire, c’est qu’il n’y a pas de sot métier. On peut aller à l’école. On peut finir les études. Si l’Etat n’a pas pu vous employer, vous pouvez trouver, vous-mêmes, votre propre travail en créant vos business. Mais, quand les gens font de grandes écoles, si tu dis d’aller faire plantation, quelque part, ils vont dire non, je ne vais pas le faire parce que j’ai fait des études. Il n’y a pas de sot métier ! Vous pouvez commencer à partir de zéro, petit à petit, vous vous relevez pour avoir un fonds de commerce et aller où vous voulez. Il suffit, d’abord, d’avoir de la volonté, de la persévérance et oser. C’est tout. Voilà ce que j’ai à dire à la jeunesse malienne”, conseille-t-il.
Et d’ajouter, “les jeunes doivent savoir, aussi, qu’il y a trois catégories de personnes dans le monde : la première catégorie représente les 3 % de la population, qui sont des leaders, qui deviennent des chefs partout, même dans le village. La deuxième occupe les 27 % de la population, ce sont des gens qui se battent dans la vie. Ce qui veut dire que seulement 30 % de la population gère le monde. Et la troisième catégorie, les 70 % de la population, sont des gens qui suivent”.
Radisson Blu Bamako et Abidjan : propriétés de Cessé Komé
Lui ne veut pas suivre. Il est leader. Sa vie en quelques dates ?
1968 : naissance à Koïra (cercles de Nara) au Mali. 1984 : arrivée à Abidjan en Côte d’Ivoire. 1990 : activité de grossiste du textile. 2002 : construction de la Résidence Komé. Il se lance dans l’aventure hôtelière avec comme conseiller, Carrère, un ressortissant français.
Il enchaîne avec Radisson Blu de Bamako. 25 mai 2016 : ouverture du Radisson Blu Hôtel Abidjan Airport. Dans ce projet, Cessé Komé, a investi 55 milliards de F CFA, financés à moitié en fonds propres et pour le reste sur un prêt auprès, notamment d’Afreximbank et de BGFI Bank Côte d’Ivoire. Avec ses 261 chambres, plusieurs salles de réunions, un immense hall de conférences pouvant accueillir autour de 800 personnes, et sa piscine.
Patiemment il tisse sa toile. Il trouve sa voie dans la construction et la gestion des hôtels avec un maillage aux marques internationales.
Le 7 mai 2018, c’est l’ouverture officielle de l’hôtel Sheraton Bamako. Le projet est porté par le Groupe Koïra Holding de l’homme d’affaires malien Cesse Komé en partenariat avec la firme américaine Mariott International.
Coût de l’investissement ? 64 millions de dollars environ. Le chantier a été lancé en juin 2015. Neuf étages offrant 200 chambres dont des suites de luxe, avec un ensemble de commodités : installations de loisirs, restaurants, bars, salles de réunion, etc.
Mais comme le confie un proche collaborateur de l’homme d’affaires : “Komé est un homme sans histoire. Mais si tu le cherches, tu le trouves sur ton chemin”. Entre Cessé Komé, patron de Koïra Hôtel Investment (KHI) et le Groupe Sheraton, le divorce sera acté. Les raisons ? : Le non-respect des normes et frictions entre (hôtel Investment (KHI) et le Groupe Starwood) à propos de la gérance dudit hôtel. Chacun prend sa direction avec ses cliques et claques.
Dans tous ses établissements hôteliers, il emploie plus d’un millier de personnes.
Homme d’affaires et philanthrope
“S’il pouvait donner toute sa fortune pour que la Côte d’Ivoire, son pays d’adoption et le Mali deviennent ‘moteurs’ de l’Afrique de l’Ouest, il va le faire”, confie Moussa Diakité, membre de l’Association des Maliens résidents en Côte d’Ivoire.
L’homme a fait preuve d’une incroyable finesse lors de l’affaire des 49 militaires ivoiriens arrêtés à Bamako, jugés condamnés avant de bénéficier d’une grâce présidentielle. Il avait l’écoute des autorités maliennes et des autorités ivoiriennes. Modeste, il n’a jamais voulu reconnaître avoir joué un rôle. Mais tous les acteurs expliquent que son rôle a été très utile. Peut-être qu’un jour, il acceptera de livrer sa part de vérité dans ce dossier.
En attendant, le philanthrope continue à aider discrètement les uns et les autres.
Après avoir procédé à des recoupements nécessaires, Mali-Tribune votre bihebdomadaire d’investigations est en mesure de révéler qu’outre les hôtels dans plusieurs pays, Cessé Komé envisage de créer une usine de batteries à Abidjan.
Souleymane Diarra
Source: Mali Tribune